La provenance des fonds de vos clients davantage surveillée

Par La rédaction | 26 février 2019 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Photo : 123RF

Les professionnels du secteur devront se montrer encore plus vigilants en matière de lutte contre « l’argent sale » à la suite de la mise à jour des directives du Centre d’analyse des opérations et déclarations financières du Canada (CANAFE) dans ce domaine, rapporte Blakes.

Le cabinet d’avocats spécialisé en droit des affaires estime qu’ils devront rapidement intégrer les nouvelles règles édictées par l’organisme fédéral en matière de déclaration d’opérations douteuses (DOD). Autrement dit, lorsqu’il existe « des motifs raisonnables de soupçonner » que des fonds proviennent de sources illicites. Blakes précise que, selon la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, ces motifs concernent toute opération pouvant être liée à la perpétration, réalisée ou planifiée, d’une infraction de blanchiment d’argent ou de financement du terrorisme.

Les nouvelles règles du CANAFE stipulent que, « à lui seul, un indicateur [de blanchiment d’argent ou de financement du terrorisme] peut ne pas sembler douteux. Toutefois, le fait d’observer un indicateur ou plusieurs indicateurs [d’une possible infraction] pourrait vous inciter à effectuer une évaluation des opérations pour déterminer s’il y a d’autres faits ou éléments contextuels ou d’autres indicateurs qui nécessitent la soumission d’une DOD ».

UN CHANGEMENT IMPORTANT

Blakes souligne qu’il s’agit là d’un changement « important » par rapport à la précédente ligne directrice du Centre. En effet, poursuit la firme, « si le CANAFE ne trouve qu’un seul indicateur de blanchiment d’argent ou de financement du terrorisme, il s’attendra à ce que les entités réglementées déposent une DOD à l’égard de cette activité » et la modification du libellé de ses directives « reflète cette attente ».

Par conséquent, écrit le cabinet d’avocats, les « entités réglementées » ont intérêt « à prêter une attention particulière aux indicateurs sectoriels inclus dans les directives pour s’assurer que leurs politiques et procédures de conformité font un suivi à l’égard des indicateurs et qu’une DOD soit déposée même pour un seul indicateur, en l’absence de preuve convaincante ». Blakes insiste sur le fait que les professionnels ont d’autant plus intérêt à se plier aux nouvelles directives que celles-ci correspondent en fait aux nouvelles exigences réglementaires du CANAFE en matière de déclaration d’opérations douteuses.

Le cabinet ajoute que les directives du Centre font une distinction entre les « motifs raisonnables de soupçonner » et les « motifs raisonnables de croire », les premiers constituant « un seuil inférieur » par rapport aux seconds. Le CANAFE note ainsi que les motifs raisonnables de soupçonner ne sont qu’un peu plus qu’un « simple soupçon », c’est-à-dire qu’il est possible qu’il s’agisse d’une infraction de blanchiment ou de financement du terrorisme. Par conséquent, explique Blakes, « il n’est pas requis de prouver les faits qui portent à soupçonner, mais plutôt d’évaluer les faits, le contexte et les indicateurs de blanchiment d’argent ou de financement du terrorisme associés à l’opération afin de déterminer s’il existe ou non des “motifs raisonnables” de soupçonner une infraction » dans l’un de ces domaines.

LES ATTENTES DU CANAFE

Les nouvelles directives du Centre décrivent également quelles sont ses attentes en matière de préparation des déclarations d’opérations douteuses. Blakes les résume ainsi :

  • les politiques de lutte contre le blanchiment d’argent d’une entité réglementée doivent inclure des informations détaillées sur le processus utilisé afin de déterminer et d’évaluer les opérations douteuses et de soumettre les DOD au Centre;
  • une personne ayant les connaissances et la formation appropriées devrait être en mesure de déterminer si une opération est liée au blanchiment d’argent ou au financement du terrorisme;
  • la formation offerte aux employés pour leur permettre de déterminer les opérations qui pourraient être liées à ces domaines est considérée comme faisant partie du programme de conformité;
  • les DOD soumises doivent être complètes et de qualité élevée.

En ce qui concerne ce dernier point, le CANAFE indique qu’une déclaration bien remplie devrait passer en revue les questions suivantes : qui sont les parties à l’opération? quand l’opération a-t-elle été effectuée ou tentée? quels sont les instruments financiers ou les mécanismes qui permettent ou ont permis de la réaliser? où l’opération a-t-elle eu lieu? en quoi est-elle liée à la perpétration d’une infraction de blanchiment d’argent ou de financement du terrorisme?

Autre question abordée dans les directives : les cas où une entité réglementée a déjà déposé une déclaration d’opérations douteuses à l’égard d’un client. Plus précisément, le Centre indique qu’« [u]ne fois que vous avez des motifs raisonnables de soupçonner, vous devez présenter des déclarations tant et aussi longtemps que vous avez des soupçons ». Sur le plan pratique, explique Blakes, cela signifie que si une entité réglementée soupçonne un client d’être impliqué dans des activités illicites et qu’elle a déposé une DOD à son égard, elle devra continuer à déposer des déclarations concernant toutes ses activité aussi longtemps qu’elle conservera des doutes. Cela concerne, par exemple, les opérations liées à ses comptes (dépôts, opérations dans un guichet automatique, émissions de chèques, etc.).

La rédaction