Finance : les femmes doivent prendre leur place

Par Pierre-Luc Trudel | 24 janvier 2017 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Le manque de diversité dans les hautes sphères décisionnelles des entreprises est toujours criant, et l’industrie financière ne fait pas exception à la règle, selon Isabelle Hudon.

« À la Sun Life, on a pris le pari de la mixité des talents pour générer de la croissance », a affirmé lundi la vice-présidente, solutions clients, de l’assureur lors d’une allocution devant les membres du Cercle canadien de Montréal.

À l’heure actuelle, seulement 18 % des postes de haute direction au Canada sont occupés par des femmes, alors que celles-ci sont pourtant majoritaires dans la plupart des facultés universitaires.

« Les femmes doivent prendre tout la place qui leur revient, elles ont la capacité de le faire. Notre société vieillit, on ne peut pas se permettre de gaspiller des talents », assène-t-elle.

DÉFI AUX PDG

Citant une étude de la firme Catalyst réalisée en 2012, Isabelle Hudon indique que les entreprises comptant des femmes au sein de leur haute direction obtiennent de meilleurs résultats financiers.

Mme Hudon lance d’ailleurs un défi aux PDG du Québec : « Identifiez les femmes en ascension au sein de votre organisation, vos futures leaders. Vous réaliserez que le problème n’est pas le manque de candidatures. Si vous n’avez pas de femmes dans votre pipeline de talents, vous accuserez un retard important sur vos concurrents. »

La femme d’affaires rejette du même coup les « idées reçues » selon lesquelles les femmes auraient moins d’ambition que les hommes.

« Les femmes identifient deux principaux obstacles à la progression de leur carrière : le manque d’occasions et la culture masculine de leur organisation. Les obligations familiales ne viennent qu’au quatrième rang. »

Pour donner libre cours à l’ambition des femmes, les entreprises devraient notamment investir dans la formation des employés, assurer l’équité salariale, mesurer la progression des femmes dans les postes décisionnels et reconnaître leurs succès, juge-t-elle

CONSEILLÈRE, UNE PROFESSION IDÉALE POUR LES FEMMES

Le manque de diversité dans l’industrie des services financiers est un réel problème, croit Isabelle Hudon. Elle encourage justement les femmes à se diriger vers une carrière de conseillère.

« Beaucoup de femmes croient que la finance est un domaine trop exigeant pour elles, mais de nombreuses conseillères m’ont au contraire expliqué que leur profession leur permet une très grande flexibilité par rapport à d’autres emplois. »

Les préjugés étant encore bien présents, les clients se sentent-ils plus en confiance lorsqu’un homme gère leur argent? Pas du tout, affirme Mme Hudon. Et même que de nombreuses occasions d’affaires s’offrent aux femmes conseillères.

« Après la mort de leur mari, on voit souvent des femmes qui décident de changer de conseiller et se tournent vers une conseillère, qui saura peut-être mieux prendre en compte leurs objectifs et leurs besoins. »

Dans le même ordre d’idées, Isabelle Hudon dit essayer de favoriser une bonne diversité parmi les conseillers de Sun Life (femmes, hommes, jeunes, expérimentés, etc.), de façon à répondre le mieux possible aux différentes attentes de la clientèle.

LES EFFETS PERVERS DE LA CONCILATION TRAVAIL-FAMILLE

Lors de son allocution, la dirigeante a expliqué être « terriblement agacée » par le concept de conciliation travail-famille. « En misant sur la conciliation, on envoie le message que les femmes, contrairement aux hommes, ne devraient pas progresser dans leur carrière au détriment de la famille. Pour les femmes, c’est encore mal vu de choisir la carrière », se désole-t-elle.

Les discours sur les vertus de la conciliation travail-famille, plutôt que de soulager les femmes, leur infligeraient une pression supplémentaire, selon Mme Hudon.

« Je dis aux femmes qu’elles ont le droit d’être imparfaites, qu’elles peuvent viser le déséquilibre. »

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Pierre-Luc Trudel