Front commun contre les paradis fiscaux

Par Rémi Maillard | 7 février 2017 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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L’« ampleur démesurée » du recours aux paradis fiscaux cause « un tort considérable à la société et chacun en subit les conséquences », dénonce une nouvelle campagne menée par plusieurs organismes québécois.

Lancée jeudi à l’initiative d’Oxfam-Québec, celle-ci rassemble plus d’une centaine d’organisations et de personnalités publiques de la province et a pour but de sensibiliser les Québécois au manque à gagner pour les finances publiques que représente l’évasion fiscale à grande échelle effectuée par des multinationales et certains riches particuliers.

Outre Oxfam-Québec, le Mouvement d’éducation et de défense des actionnaires (MÉDAC), FAIR Canada, le Réseau pour la justice fiscale/Québec, l’Union des consommateurs, ATTAC-Québec, la Caisse d’économie solidaire Desjardins, ainsi que les principales centrales syndicales de la province y prennent part. Des personnalités telles qu’Alain Deneault, philosophe et auteur de plusieurs ouvrages sur les paradis fiscaux, André Lareau, professeur de droit fiscal à l’Université Laval, et Jean-Pierre Charbonneau, ancien député péquiste et ex-président de l’Assemblée nationale, y participent également.

LE CANADA N’ÉCHAPPE PAS AU PHÉNOMÈNE

« Le MÉDAC appuie depuis longtemps la déclaration commune [des participants à la campagne] intitulée Mettons fin aux paradis fiscaux, qui met l’accent sur le rôle de l’impôt en matière d’accès aux services publics indispensables et d’encadrement d’une activité économique socialement responsable et écoresponsable, ainsi que de lutte pour l’égalité des chances et contre la pauvreté », indique le Mouvement dans un communiqué.

Selon Oxfam-Québec et le MÉDAC, l’un des objectifs de cette initiative est de « montrer aux gouvernements que des acteurs représentant l’ensemble de la société s’unissent pour mettre fin à l’ère des paradis fiscaux », qui « permettent à des multinationales et à des détenteurs de grandes fortunes d’aisément contourner l’impôt et de priver ainsi la société de milliards de dollars qui pourraient servir à financer les infrastructures publiques et les services sociaux, comme la santé et l’éducation ».

De l’aveu même de la Banque des règlements internationaux, une institution internationale dirigée par les banques centrales des principaux États du monde, plus de la moitié des transactions financières effectuées sur la planète passent par des paradis fiscaux, rappelle Oxfam-Québec. Résultat : les pays en développement perdent chaque année au moins 170 milliards de dollars de recettes fiscales. Et le Canada n’échappe pas à ce phénomène puisque d’après Statistique Canada, les entreprises canadiennes avaient placé quelque 200 milliards de dollars dans les 10 principaux paradis fiscaux en date de 2014.

LE MÉDAC EXIGE DAVANTAGE DE TRANSPARENCE

« Puisque ce sont des décisions législatives et commerciales de gouvernements qui ont pavé la voie au développement de ces paradis fiscaux, il est tout à fait justifié et nécessaire pour la société civile de faire pression auprès des gouvernements pour qu’ils corrigent la situation, d’autant plus dans des contextes de coupures budgétaires », souligne le MÉDAC.

Ce dernier rappelle d’ailleurs qu’« il livre bataille aux paradis fiscaux depuis le début de son existence » et qu’il a pris « plusieurs actions récemment en matière de citoyenneté fiscale », notamment dans le cadre du dossier des Panama Papers.

Le Mouvement a par exemple demandé au conseil d’administration de la Banque Royale qu’il révèle, lors de l’assemblée annuelle 2017, « les mesures que l’institution a mises en place pour s’assurer d’être un citoyen fiscal exemplaire ». Cette proposition devra être soumise au vote des actionnaires.

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Rémi Maillard

Journaliste multimédia. Santé, environnement, société, finances personnelles. Également intéressé par les affaires publiques, les relations internationales, la culture… Passionné de cyclisme.