Fusion Fiera-Sceptre : « nous étions prêts pour le mariage »

21 juin 2010 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Fiera Capital continue de se faire remarquer dans l’industrie financière. Son dernier coup d’éclat : une fusion de ses activités avec celles de Sceptre Investment Counsel. Réunies, les deux sociétés géreront quelque 30 milliards de dollars, dont plus des deux tiers du côté institutionnel. Jean-Guy Desjardins, président du Conseil d’administration chez Fiera Sceptre, nous parle de cette fusion et des futurs projets de la société.

Selon M. Desjardins, la fusion entre les deux sociétés allait de soi pour plusieurs raisons stratégiques. « D’abord, la philosophie de gestion des deux sociétés, axée sur des politiques de placement visant des rendements à long terme, se ressemble beaucoup, souligne-t-il. Puis, nos valeurs d’entreprise sont similaires et, tout comme nous, Sceptre mise sur des gestionnaires dont la réputation n’est plus à faire dans l’industrie. Ça devrait être relativement facile d’intégrer les opérations des deux entreprises.»

M. Desjardins y va même d’une analogie amusante pour raconter comment les négociations se sont déroulées. « Ça faisait deux ans que nous nous fréquentions en regardant le comportement de l’un et de l’autre. Nous étions maintenant prêts pour la grande demande de mariage », explique fièrement M. Desjardins.

Plus sérieusement, il indique que des discussions préliminaires avaient eu lieu en 2008 avec Glenn Inamoto, le président de Sceptre à l’époque, mais qu’ils avaient décidé d’attendre à ce moment. Ce n’est qu’il y a cinq mois que les pourparlers avec Sceptre sont devenus plus sérieux.

« Pour diverses raisons, les membres du Conseil d’administration de Sceptre envisageaient activement de vendre la société. Plusieurs acheteurs ont démontré de l’intérêt, mais c’est notre offre qui était la plus avantageuse pour les actionnaires de la société », soutient M. Desjardins.

Une transaction stratégique et avantageuse économiquement Sur le plan financier, la fusion représente un élément de levier important puisqu’elle ajoute 7 milliards de dollars au portefeuille de gestion de Fiera. Cette transaction permettra donc aux actionnaires et à la clientèle des deux sociétés de profiter d’une synergie nouvelle. Cette complémentarité se reflète notamment à travers les forces de chaque société, ses produits offerts et ses réseaux de distribution.

« Fiera offraient déjà une gamme complète de produits très performants; notre expertise étant entre autres reconnue en titres à revenu fixe et en produits alternatifs. Mais malgré nos excellents rendements en actions canadiennes et internationales, il nous restait à établir notre réputation dans ces catégories d’actifs. À l’inverse, la réputation de Sceptre en actions canadiennes, particulièrement les titres de sociétés de petites capitalisations, n’est plus à faire, surtout dans le reste du pays. La combinaison est donc des plus intéressante. »

D’autre part, la transaction est également profitable pour les deux parties en ce qui concerne le réseau de distribution puisque Sceptre possède une gamme complète de fonds communs traditionnels, ce que Fiera n’avait pas jusqu’ici. « La capacité de distribution de Sceptre à l’extérieur du Québec est excellente, ce qui devrait nous aider à augmenter notre taux de pénétration dans le reste du Canada. Les clients de Sceptre, quant à eux, auront maintenant accès aux produits de Fiera, notamment les produits non traditionnels », enchaîne M. Desjardins.

Tel qu’annoncé lors de la fusion, M. Desjardins demeura président du conseil d’administration, chef de la direction et chef des placements de Fiera Sceptre et en sera l’actionnaire de contrôle. Sylvain Brosseau deviendra président et chef de l’exploitation de la société fusionnée, alors que David Pennycook, jusque-là président et chef de la direction par intérim de Sceptre, deviendra quant à lui vice-président du conseil et vice-président exécutif.

Autre aspect intéressant, la gestion des actifs ainsi que la recherche continueront de se faire principalement à Montréal, puisque la majorité des actifs seront transférés ici.

« Des 7 milliards de dollars sous gestion qu’apporte Sceptre, six milliards proviennent d’investisseurs institutionnels, le reste étant répartie équitablement entre la gestion privée et les fonds communs traditionnels », fait remarquer M. Desjardins.

Favoriser la croissance Pour M. Desjardins, cette fusion permettra à la nouvelle société d’accélérer de façon importante sa croissance organique. « Au-delà de la valeur des actifs sous gestion qui augmente, cette transaction représentait une occasion en or de créer de la valeur pour nos actionnaires. Il ne s’agit pas de faire des acquisitions pour le simple fait de devenir gros », insiste-t-il.

D’ailleurs, questionné sur d’autres projets d’expansion à court terme, M. Desjardins a indiqué qu’il était peu probable que Fiera bouge dans les deux prochaines années. « Nous allons plutôt nous concentrer sur la présente fusion pour les prochains mois », a-t-il révélé.

Toutefois, il ne cache pas son intérêt pour ouvrir éventuellement un bureau aux États-Unis. New York serait dans la mire. « Les fonds de couverture et les fonds en infrastructure sont très en demande par les clients institutionnels américains, ce qui représente une belle occasion pour nous.»

Du côté des fonds communs, la nouvelle société regardera de plus près son réseau de distribution, maintenant qu’elle possède une gamme de produits plus complète à offrir à sa clientèle. « Auparavant, notre offre de produits n’était pas assez vaste, mais maintenant, il nous faudra développer un réseau de distribution plus étendu.»

M. Desjardins estime que la croissance de la nouvelle société passe notamment par la création de nouveaux instruments d’investissement non traditionnel pour le marché institutionnel canadien. « Le marché des actions et des obligations ne répond pas parfaitement aux attentes des caisses de retraite en matière de rendement. C’est pourquoi elles voudront explorer d’autres avenues dans un avenir rapproché, comme c’est le cas aux États-Unis. »

En terminant, pour ceux qui croient que Fiera pourrait éventuellement se faire avaler par un gestionnaire de plus grande envergure, M. Desjardins a insisté fermement pour dire que cela était impossible, « Au contraire, notre but consiste plus que jamais à devenir un chef de file canadien en gestion de placements, reconnu pour sa gestion de portefeuille de qualité supérieure, ses solutions de placement innovatrices et sa capacité à dépasser les attentes de ses clients. Cette transaction accentue notre désir d’y arriver », a conclu M. Desjardins.