Gestion active c. passive : un débat inutile?

Par Christine Bouthillier | 16 mai 2019 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Le fondateur de Vanguard a beau être celui qui a inventé le premier fonds indiciel, la firme ne renie pas pour autant la gestion active. Un an après le lancement de quatre fonds communs à faible coût au Canada, elle revient sur cette rivalité qui, pour elle, n’en est pas une.

« Les 11 premiers fonds de Vanguard étaient activement gérés », rappelle Tim Huver, chef des produits, à Vanguard Canada, en entrevue avec Conseiller.

« Pour nous, ça n’a jamais été une question de choisir entre gestion active ou passive, mais plutôt de se concentrer sur les faibles coûts. »

Un professionnel en services financiers peut très bien utiliser un mélange de produits indiciels et à gestion active avec ses clients, selon lui. Par exemple, on peut se servir des fonds à gestion passive pour tempérer la volatilité associée à ceux à gestion active, illustre-t-il.

« Ou certains conseillers peuvent prendre les FNB pour exposer leurs clients au marché américain, mais utiliser la gestion active dans les marchés émergents », ajoute Félix Duchaîne, directeur régional des ventes à Vanguard Canada.

PAS DE RENDEMENT EN INDICIEL?

Les détracteurs de la gestion passive soutiennent parfois qu’il n’y a pas de rendement à en tirer, car elle ne surpasse pas le marché et qu’il faut en plus payer des frais de gestion, annulant les possibilités de gain.

« Au contraire, si tu détiens le S&P 500 depuis 30 ans, tu as eu de très bons rendements », rétorque M. Duchaîne.

Une étude de Spiva Canada souligne par ailleurs que 75 % des gestionnaires actifs de fonds d’actions ont fait moins bien que leur indice de référence en 2018.

« Un fonds commun peut réaliser un très bon rendement, mais si tu n’as pas investi ou n’es pas sorti du marché au bon moment, tu peux tout de même obtenir une mauvaise performance. D’où l’intérêt de travailler avec un conseiller », ajoute-t-il.

Pour qu’un fonds à gestion active réussisse, trois critères doivent être réunis, selon Tim Huver : le talent du gestionnaire, de faibles frais et la patience. Investir à long terme est la clé, insiste-t-il.

LA VALEUR DU CONSEIL

Mais peu importe le type de fonds choisi, pas question d’écarter les conseillers de l’équation, lancent-ils. Dès l’arrivée de Vanguard au Canada en 2011, la firme a commencé à travailler avec un réseau de professionnels rémunérés à honoraires. Si elle possède également une plateforme de placement en ligne pour les investisseurs autonomes, elle soutient que le conseiller conserve toute sa pertinence.

« Avec les nouvelles technologies, il devrait se consacrer moins à la gestion de portefeuille et plus à la planification financière, au coaching comportemental, à la planification successorale, etc. » souligne M. Huver.

« Aux États-Unis, Vanguard a commencé à travailler directement au détail. Sur dix ans, le secteur qui y a connu la croissance la plus rapide est celle des clients qui traitent avec un conseiller. Pour nous, la collaboration avec les professionnels est essentielle », ajoute Kathy Bock, directrice et responsable de Vanguard Canada.

La firme est notamment l’instigatrice d’une étude sur la valeur du conseil, qui démontre que les professionnels de la finance ajoutent 3 % de rendement net aux investisseurs qui font affaire avec eux.

« Il existe tellement d’options, les gens ont besoin d’aide pour y voir plus clair, maintenant plus que jamais », estime Mme Bock.

LA GRANDE QUESTION DES PETITS FRAIS

La marque de commerce de Vanguard reste les faibles frais de gestion de ses produits. Les fonds communs lancés l’an dernier au Canada ne font pas exception, avec des frais de 0,5 %, alors que le ratio de frais de gestion médian des fonds d’actions canadiens s’élève à 2,23 %, selon Morningstar.

Mais faibles frais ne veut pas dire faible qualité, soutient Tim Huver. « Les clients se concentrent davantage sur la valeur qu’ils obtiennent pour le prix qu’ils paient. L’un n’exclut pas l’autre. »

Cette approche a fait des petits, instaurant lentement une guerre des frais sur le marché américain, mais aussi canadien.

« Après 7 ans au Canada, dans les secteurs où nous sommes présents, les prix ont baissé », note M. Huver.

Va-t-on voir apparaître ici des fonds sans frais de gestion comme chez nos voisins du Sud? Ce n’est pas nécessairement l’objectif, répond Kathy Bock. Vanguard vise de bas frais pour tous ses produits, pas seulement quelques-uns de ses fonds comme d’autres firmes, ajoute Tim Huver.

Avec des frais aussi bas, y a-t-il un risque que les investisseurs autonomes se retirent plus souvent du marché en période de volatilité? Un tel phénomène leur ferait potentiellement perdre des gains.

« Notre expérience des 15 dernières années avec les FNB montre que les gens ne font pas ça » répond la dirigeante de Vanguard Canada.

« Nous croyons vraiment à l’investissement à long terme », conclut M. Huver.

Christine Bouthillier

Titulaire d’un baccalauréat en science politique et d’une maîtrise en communication de l’Université du Québec à Montréal, Christine Bouthillier est journaliste depuis 2007. Elle a débuté sa carrière dans différents hebdomadaires de la Montérégie comme journaliste, puis comme rédactrice en chef. Elle a ensuite fait le saut du côté des quotidiens. Elle a ainsi été journaliste au Journal de Montréal et directrice adjointe à l’information du journal 24 Heures. Elle travaille à Conseiller depuis 2014. Elle y est entrée comme rédactrice en chef adjointe au web, puis est devenue directrice principale de contenu de la marque (web et papier) en 2017, poste qu’elle occupe encore aujourd’hui.