Hardbacon continue de dénigrer les conseillers

Par La rédaction | 12 janvier 2017 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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L’intermédiaire financier Hardbacon fait de nouveau parler de lui chez les conseillers, et pas nécessairement en termes positifs. Un texte publié lundi par la firme, qui remet en cause l’intégrité des professionnels en services financiers, a suscité des réactions indignées.

Dans « Ce que votre conseiller devra vous révéler grâce à MRCC2 », l’un des responsables du site, Charles Bouchard, s’en prend en effet à la profession.

Il y évoque ainsi le cas d’« un conseiller de plein exercice d’une grande banque canadienne », qui serait l’« un des rares conseillers mettant les besoins de ses clients au premier plan », et écrit également que « les meilleurs 10 % de tous les conseillers de l’industrie méritent leur rémunération ».

POURQUOI S’ACHARNER SUR LES CONSEILLERS?

Interrogé par Conseiller, Fabien Major, conseiller en sécurité financière et représentant en épargne collective, fustige « la pauvreté de l’argumentation » du texte et trouve déplorable qu’« au lieu de vanter la qualité de ses outils ou autres, Julien Brault [le fondateur du site] ait choisi de consacrer toutes ses énergies à détruire le modèle du conseil financier, alors que, études à l’appui, celui-ci a fait ses preuves ».

Fabien Major s’en prend par ailleurs à certains passages de l’article. « Quelles études, analyses ou recherches concluent que 10 % des professionnels sont compétents? Cette affirmation biaisée soutient donc que 90 % sont incompétents et, donc, que l’Autorité des marché financiers ne protège pas adéquatement les investisseurs. C’est une accusation très lourde », dénonce-t-il.

« Les vrais chiffres sur lesquels on peut se baser sont les plaintes et notes aux dossiers des individus à la Chambre de la sécurité financière, à l’AMF ou à l’Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières, explique le conseiller. Les services de conformité des cabinets ont l’obligation d’encadrer, et même d’expulser, les représentants fautifs. »

« Le taux de défaillance (plaintes fondées) dans les services financiers est inférieur à 1 % et n’est pas plus élevé que dans le cas des notaires, comptables, avocats et autres professionnels. Affirmer le contraire mérite des preuves et une documentation solide », conclut-il.

DES DOUTES SUR LES DONNÉES

Également interrogé par Conseiller, Daniel Guillemette se montre tout aussi mordant. « L’auteur du texte est chanceux d’avoir pu parler directement à l’un des rares conseillers qui pense à ses clients avant de penser à lui-même. D’ailleurs, comment a-t-il pu le trouver, considérant que, selon ses propos, il n’y en a que 10 % de bons? », ironise le président du cabinet de services financiers Diversico.

« Est-ce qu’il a personnellement enquêté sur tous les dossiers clients de ce super conseiller? poursuit-il. Si oui, pourrait-il nous faire partager la liste des questions qui lui permettent d’arriver à sa conclusion? Sur la base de quelle étude scientifique a-t-il pu découvrir que 90 % des conseillers sont mauvais? Il doit avoir une véritable armée de recherchistes à sa disposition pour faire ses sondages, car on dénombre certainement plus de 100 000 professionnels au Canada! »

« UNE MÉCONNAISSANCE GROSSIÈRE »

Enfin, Gino Savard n’est pas plus tendre envers le texte publié par Hardbacon, jugeant que « le chiffre de 10 % [qui y figure] ne représente que l’opinion de celui qui a réalisé l’article » et qu’il « n’est basé sur aucune étude ».

Le président de Mica Cabinet Services Financiers ajoute que « depuis le tout début du processus entourant le MRCC 2, les conseillers réclament la pleine divulgation des frais, et non uniquement celle de leur commission ». Dans ces conditions, assène-t-il, « nous faire porter l’odieux du manque de clarté de la solution que les régulateurs ont choisie, c’est-à-dire de ne divulguer que la commission du courtier, dénote une méconnaissance grossière du sujet ».

D’où proviennent donc les chiffres avancés par Hardbacon?

Contacté par Conseiller, Charles Bouchard, cofondateur de la firme et chef des finances, répond ainsi : « Nous avons fait une entrevue anonyme avec un conseiller en placement dans une grande firme de courtage canadienne [NDLR : même si le texte parle plutôt d’une banque] et il était d’avis qu’une forte concentration de conseillers n’ont pas les besoins de leurs clients au premier plan, en raison de la structure et des incitatifs dans l’industrie qui ne sont pas alignés avec les besoins des clients. »

M. Bouchard travaille dans le domaine de la finance et de la comptabilité. Il possède un baccalauréat en administration des affaires et un diplôme d’études supérieures spécialisées en comptabilité professionnelle (CPA, CA), obtenus à HEC Montréal. Il détient également le titre de CPA auditeur, CA.

PAS LA PREMIÈRE FOIS

Ce n’est pas la première fois que la firme Hardbacon fait parler d’elle. En septembre dernier, ce site, qui entend « rendre l’industrie de la finance plus transparente » ainsi qu’aider les petits investisseurs « à faire fructifier » leur argent et à leur « éviter de se faire fourrer », avait notamment provoqué l’ire de Fabien Major.

L’objectif affiché de cette start-up est d’éduquer sur le placement, les produits financiers et les frais, mais aussi de se poser en intermédiaire entre les plateformes de courtage ou de robots-conseillers et les investisseurs, expliquait alors Conseiller, ajoutant que Hardbacon prévoyait signer des ententes avec ces entreprises, qui la paieraient pour les clients qu’elle lui référerait.

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