Hypothèques : l’exception canadienne

Par La rédaction | 13 janvier 2020 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Petite cabane d'oiseau en bois rouge sur un clavier d'ordinateur.
Photo : Maitree Boonkitphuwadon / 123RF

On croit généralement qu’une hausse des taux d’intérêt conduit inexorablement à une augmentation des hypothèques en défaut de paiement. Les propriétaires qui sont déjà pris à la gorge par leurs dettes se retrouvent dans l’incapacité de payer l’augmentation causée par le rehaussement des taux. C’est la proverbiale goutte d’eau qui fait déborder le vase et plusieurs finissent par perdre leur propriété. 

Aux États-Unis, la crise des subprimes en 2008 a douloureusement rappelé qu’en général, lorsque des prêts hypothécaires court terme très avantageux étaient remplacés par des prêts long terme avec un taux plus élevé, un grand nombre de propriétaires perdaient leurs maisons. Pourtant, un regard jeté à de récentes données remet en question cette idée reçue, du moins pour le Canada, peut-on lire dans le Financial Post. 

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L’article est écrit par Murtaza Haider, professeur de gestion immobilière à l’Université Ryerson et Stephen Moranis, un vétéran de l’industrie immobilière. Il se base sur une étude présentée récemment lors d’une rencontre de l’American Economic Association. Elle a été rédigée par Katya Kartashova, de la Banque du Canada, et Xiaoquing Zhou, de la Réserve fédérale de Dallas, à partir de données de TransUnion. Celles-ci portent sur l’ensemble des dettes de consommation et hypothécaires d’un grand nombre de Canadiens. 

Les auteurs soutiennent qu’une augmentation des taux ou des paiements hypothécaires ne semblait pas « décourager les dépenses durables, rendre les consommateurs plus endettés ou augmenter les chances de défaut de paiements ». 

Les auteurs ont pu comparer des propriétaires qui ont renouvelé leur hypothèque dans des conditions favorables (lorsque les taux avaient baissé entre janvier 2015 et janvier 2017) et défavorables (lorsque les taux avaient monté entre juillet 2017 et juin 2019). Ils ont constaté que lorsque les taux baissaient, le nombre de retards ou de défauts de paiement d’hypothèques diminuait. Toutefois, lorsque les taux grimpaient, le nombre de retards ou de défauts de paiement d’hypothèques ou d’autres dettes ne montaient pas. 

Au Canada, le taux de défaut sur l’hypothèque est de 0,1 %, selon cette étude. D’après l’Association des banquiers canadiens, ce taux n’a pas dépassé 0,5 % depuis 2005.

DES RÈGLES PLUS STRICTES

La sévérité des règles encadrant l’octroi d’hypothèque au Canada, qui a été encore rehaussée ces dernières années, pourrait expliquer cette différence par rapport au marché américain. En 2008, une grande partie des défauts de paiement aux États-Unis provenait de prêts à risque qui avaient été octroyés à des gens qui n’avaient ni revenu, ni emploi, ni actifs (NINJA). Ce type de prêt hypothécaire est à peu près impossible à obtenir au Canada. 

De plus, les prêts hypothécaires au Canada sont généralement de courte durée (de deux à cinq ans) et la période d’amortissement est très longue (de 25 à 30 ans). Aux États-Unis, les prêts hypothécaire à taux fixe et à long terme sont plus fréquents. Le nombre de prêteurs est aussi beaucoup plus petit au nord qu’au sud de la frontière, dans un marché dominé par les cinq grandes banques (en plus de Desjardins au Québec). 

Les législateurs doivent tenir compte de ces différences lorsqu’ils réfléchissent à l’encadrement des prêts hypothécaires au pays, soutient le Financial Post.

La rédaction