Le secteur réglementaire en pleine ébullition

Par Jean-François Venne | 25 avril 2018 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Photo : 123RF

L’Autorité des marchés financiers (AMF) a profité du 12e Colloque de conformité du Conseil des fonds d’investissement du Québec mardi pour faire le point sur les changements réglementaires en cours… et à venir. Parce que non, ça n’a pas fini de bouger.

Il ne faut guère s’étonner que le premier sujet abordé par Hugo Lacroix, directeur principal des fonds d’investissement de l’AMF, ait été les commissions intégrées. Le sujet a fait énormément jaser au cours des deux dernières années, certains intervenants de l’industrie craignant qu’on assiste à leur abolition. Il semble que la solution proposée sera moins radicale, ou plus « pragmatique », pour reprendre le terme de Hugo Lacroix.

L’AMF fera connaître ses orientations à cet égard en juin 2018, en même temps qu’elle annoncera des réformes ciblées dans le dossier du rehaussement des obligations des conseillers, courtiers et représentants envers leurs clients (33-404) afin de bien arrimer les deux.

« La solution sur les commissions intégrées répondra aux enjeux énoncés dans le document [de consultation], mais en réduisant le risque de conséquences inattendues, précise Hugo Lacroix. Je ne crois pas que l’accueil sera unanime, mais nous arriverons à un consensus raisonnable. »

De son côté, Louise Gauthier, directrice principale des politiques d’encadrement de la distribution de l’Autorité, a rappelé que cela faisait déjà plus de cinq ans que les travaux au sujet du rehaussement des obligations en valeurs mobilières étaient en cours. Ils concernent les parties 11, 13 et 14 du règlement 31-103, mais plus particulièrement la partie 13 portant sur les relations avec les clients.

« Nos réflexions se sont concentrées sur les obligations qui n’existent pas explicitement dans le règlement et visent à établir une obligation de convenance beaucoup plus holistique, explique-t-elle. Quant aux titres et désignations, ils seront abordés dans une deuxième phase, après de nouvelles consultations. »

DU PAIN SUR LA PLANCHE

L’AMF n’a pas manqué de réitérer son soutien total au projet de loi 141 (PL 141), ni d’affirmer que les activités de la Chambre de la sécurité financière et de la Chambre de l’assurance de dommages seraient simplement transférées à l’AMF et non abolies, comme le craignent de nombreux intervenants de l’industrie.

L’adoption de l’article 632 du PL 141 lui semble aussi importante. Depuis 2009, le partage de commissions d’un représentant en épargne collective avec son entreprise incorporée dans une autre discipline n’est plus permis. Le PL 141 l’autorisera de nouveau. Un règlement sera adopté par l’AMF pour en déterminer les modalités.

L’harmonisation réglementaire des fonds distincts et des fonds communs de placement est aussi sur le radar de l’organisme. L’AMF a émis une trentaine de recommandations, visant par exemple à harmoniser l’aperçu du fonds, la méthode de classification du risque, l’obligation de connaissance du client et le contrôle diligent du produit. « Mais la principale recommandation demeure l’adoption d’un relevé sur les frais et placements que nous nommons MRCC 2+, car il inclut aussi les frais du manufacturier », précise Louise Gauthier.

Un prototype de relevé verra le jour dans les prochaines semaines. Il sera en partie fondé sur les conclusions tirées de la tenue de groupes de discussion avec des investisseurs. Ces derniers souhaitent voir le rendement affiché dès la première page, accompagné d’un graphique.

L’AMF planche sur bien d’autres sujets, dont les répercussions systémiques de la gestion passive, l’évolution du risque des portefeuilles à revenu fixe ou encore l’effet de levier dans les fonds négociés en Bourse. « Nous voulons être un régulateur de proximité, avance Hugo Lacroix. Nous voulons que les gestionnaires d’actif soient bien réglementés, mais en évitant des effets pervers limitant leur éclosion et leur développement. »

SE RAPPROCHER DE L’INDUSTRIE

« Le secteur financier est en ébullition et je veux contribuer à doter le Québec d’un cadre réglementaire moderne et ambitieux », renchérit Frédéric Pérodeau, nouveau surintendant de l’assistance aux clientèles et de l’encadrement de la distribution à l’AMF.

Il croit que le plan stratégique 2017-2020 de l’Autorité aidera à franchir des pas importants en ce sens. Il repose sur trois axes : le leadership et l’innovation, le renforcement du rôle de l’AMF comme régulateur de proximité et l’investissement dans sa performance en augmentant sa flexibilité, en raffinant ses outils et en développant ses talents.

« Nous avons presque 800 ambassadeurs sur le terrain, qui interagissent avec l’industrie sur une base quotidienne, je veux qu’ils se sentent libres de nous dire ce qui s’y passe vraiment, afin que nos propositions répondent réellement aux besoins », conclut-il.

Jean-François Venne