La Fed « couche »-t-elle avec Wall Street?

Par La rédaction | 26 novembre 2014 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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La Réserve fédérale américaine est-elle suffisamment indépendante des milieux financiers de Wall Street? Plusieurs affaires récentes de connivence avec le secteur privé l’ont en tout cas placée sur le gril, rapporte Le Monde.

Ainsi, vendredi dernier, le patron de son antenne new-yorkaise, William Dudley, a dû répondre à de nombreuses questions des sénateurs au cours d’une audition à Washington. La veille, l’organisme avait en effet annoncé qu’il allait évaluer ses procédures de surveillance des grandes banques.

Et pour couronner le tout, on apprenait aussi jeudi que Goldman Sachs avait licencié l’un de ses collaborateurs, ex-salarié de la Fed, au motif qu’il avait transmis à son nouvel employeur des données confidentielles de la banque centrale de New York.

« Problème de culture »

Il n’en fallait pas plus pour que les politiciens montent au créneau.

« Existe-t-il un problème de culture à la Fed de New York ? Je pense que les faits montrent que c’est le cas », a par exemple lancé la sénatrice démocrate du Massachusetts, Elizabeth Warren, lors de l’audition.

Elle réagissait ainsi aux révélations du site ProPublica.org, qui a publié les enregistrements d’une ex-employée de la Fed, Carmen Segarra.

Dans ces extraits, les enquêteurs ont notamment découvert l’extrême prudence, pour ne pas dire plus, avec laquelle les équipes de la banque centrale américaine avaient supervisé une transaction, jugée douteuse par Carmen Segarra, entre Goldman Sachs et Santander en 2012. À l’époque, la jeune femme avait alerté sa hiérarchie sur ses soupçons, mais en vain.

Pas là pour « faire la police »

« Je n’accepte pas l’idée que ces enregistrements accréditent la thèse selon laquelle la Fed ne fait pas son travail correctement. […] Nous avons enquêté sur ces problèmes », s’est toutefois défendu William Dudley.

Ce dernier a en outre rejeté la description qu’Elizabeth Warren avait faite du rôle de la Réserve fédérale. Le régulateur n’est pas là pour « faire la police », a-t-il déclaré en substance, mais pour veiller à la solidité du système financier en rapportant des crimes potentiels aux autorités chargées de maintenir la loi.

« Je crois qu’il s’agit davantage d’un rôle de “sécurité incendie” destiné à s’assurer que les institutions fonctionnent bien et qu’elles ne prendront pas feu », a-t-il conclu.

Manque de vigilance

Un plaidoyer qui n’a visiblement pas convaincu tout le monde, d’autant que ce rôle de prévention avait justement été ébranlé par un rapport de l’Office of Inspector General (OIG) publié en octobre, dans lequel des experts du gouvernement fédéral déploraient notamment le manque de vigilance de la Fed de New York dans plusieurs dossiers.

Pour expliquer cette situation, l’OIG pointait plusieurs facteurs, dont le nombre trop élevé de procédures de contrôle engagées, le manque de ressources et la perte de « savoir institutionnel » provoquée par une réorganisation à l’interne menée en 2011.

Enfin, la porosité entre la Fed et les grandes banques en matière de recrutement a également alimenté nombre de soupçons, achevant ainsi de ternir l’image d’efficacité et d’impartialité de l’institution.

La solution ? Interdire, ou tout au moins mieux encadrer le passage d’un univers à l’autre, préconise notamment Elizabeth Warren.

« Il est impossible de disposer d’un système de régulation fiable si on laisse d’anciens dirigeants de banques jouer le rôle de flics temporaires », a conclu la sénatrice démocrate.

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