La « finance de l’ombre », une menace pour l’économie mondiale?

Par Rémi Maillard | 18 février 2015 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Le shadow banking, ou « système bancaire parallèle », de plus en plus souvent montré du doigt par le Fonds monétaire international (FMI) ou la Banque centrale européenne (BCE), constitue une menace pour l’économie mondiale, rapporte le site Web français Challenges.fr.

En l’espace d’un an, cette « finance de l’ombre » a en effet progressé de 7 % et « pèse » désormais entre 60 000 et 75 000 milliards de dollars, soit l’équivalent de 120 % du produit intérieur brut (PIB) des principales économies de la planète, selon le Conseil de stabilité financière (Financial Stability Board, ou FSB) créé par le G20 en 2009.

D’après une récente étude de la BCE, l’ensemble des actifs gérés par ce pan occulte de la finance en zone euro serait passé de 19 milliards d’euros (21,6 G $US) fin 2013 à 23 milliards (26,2 G $US) à la mi-2014.

« Échapper aux règles trop contraignantes »

Le shadow banking est « une activité de banque, menée par des entités qui, ne recevant pas de dépôts, ne sont pas régulées en tant que banques et donc ne sont pas soumises à la réglementation bancaire en vigueur », explique le site.

« Ce secteur parallèle regroupe les activités de financement qui ne sont pas menées par les banques, mais par des hedge funds [fonds spéculatifs], les fonds de private equity et des trusts », précise sur le site Dominique Plihon, professeur d’économie à l’Université Paris-XIII et co-auteur d’un rapport sur la question.

« Les banques veulent développer une activité hors de contrôle des autorités, poursuit-il. Elles veulent échapper aux règles trop contraignantes relatives aux fonds propres. Cela concerne essentiellement le marché de gré à gré et les hedge funds, qui sont très opaques, très peu régulés. »

D’abord aux États-Unis, puis en Europe

Apparu dans les années 1990 aux États-Unis, le phénomène s’est ensuite développé en Europe, au début des années 2000, avant de s’étendre en Asie, rappelle Challenges.fr. Résultat : nos voisins du Sud et la zone euro abritent les deux tiers de cette activité, avec environ 25 000 milliards de dollars chacun, selon le FSB.

Avec quelque 9 300 milliards, soit 12 % du total, le Royaume-Uni arrive en troisième position, suivi par la Chine, dont la part dans ce « gâteau » a explosé en quelques années, passant de 1 % en 2007 à 4 % en 2013. L’Académie chinoise des sciences sociales affirme même que la finance parallèle représenterait la moitié du PIB du pays, et 20 % des actifs détenus par le secteur bancaire chinois contrôlé.

Le FMI juge que le shadow banking peut néanmoins « être positif pour stimuler l’activité dans les pays émergents, où le secteur bancaire est limité par ses “capacités” ou par des obstacles “réglementaires” », relève Challenges.fr.

« Une énorme erreur »

Toutefois, l’organisme international pointe également les risques d’une croissance excessive du secteur.

En effet, « si tous les investisseurs réclamaient leur dû en même temps, les acteurs de ce marché pourraient être incapables de les rembourser et de vendre rapidement leurs créances », met-il en garde dans un rapport publié en octobre. Et cela « risquerait de mener à des ventes et à des achats au rabais semblables à ceux auxquels on a assisté durant la crise financière de 2008 ».

« Laisser ces fonds se développer sur des marchés qui ne sont absolument pas régulés est une énorme erreur. Ils ont été des acteurs majeurs de la crise financière que nous avons vécue. Si nous n’agissons pas rapidement sur cette question, nous allons au-devant de nouvelles crises financières », conclut Dominique Plihon.

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Rémi Maillard

Journaliste multimédia. Santé, environnement, société, finances personnelles. Également intéressé par les affaires publiques, les relations internationales, la culture… Passionné de cyclisme.