La Laurentienne a du mal à négocier son virage numérique

Par La rédaction | 12 avril 2018 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Le virage numérique amorcé par la Banque Laurentienne ces derniers mois est loin de satisfaire tous ses clients, rapporte TVA Nouvelles.

D’après la chaîne de télévision, nombre d’entre eux sont en effet contraints d’attendre, parfois « plusieurs heures », avant d’obtenir des services au comptoir de leur succursale habituelle, par exemple pour effectuer une transaction. Cette situation, qui a déjà provoqué de vives tensions au sein du public, a d’ailleurs conduit l’institution financière à engager des agents de sécurité afin de protéger ses employés et de « contrôler la colère des clients », explique TVA.

Interrogé par la chaîne, l’un de ces agents de la firme Garda, posté dans une succursale à Montréal, affirme même que ces derniers « en viennent parfois aux coups ». La raison? Un important manque de personnel pour accueillir les clients, qui se retrouvent obligés de faire la queue devant les guichets ouverts.

« NOUS AVONS ÉTÉ TÉMOINS DE VIOLENCES À PLUSIEURS REPRISES »

Quelques réflexions recueillies par TVA témoignent de ce ras-le-bol. « C’est plus long d’encaisser un chèque que de le gagner », lance ainsi un client, qui soutient avoir dû patienter debout durant trois heures avant d’être servi. « Une heure et demie pour changer une carte, c’est inacceptable! » renchérit une autre. Interrogée par TVA et cliente régulière de sa succursale, une infirmière retraitée assure pour sa part avoir assisté à des cas de violence physique et verbale ces dernières semaines. « Les agents de sécurité doivent intervenir, c’est intimidant », reconnaît-elle, ajoutant qu’elle a le sentiment que la Laurentienne entend ainsi « forcer » ses clients à réaliser leurs transactions sur le Web.

En six ans, celle-ci a réduit le nombre de ses succursales de 157 à 104, note TVA, qui rappelle que les services bancaires au comptoir sont censés disparaître d’ici la fin de l’année. Une transition jugée « précipitée » par le syndicat des employés, qui se dit préoccupé par ces événements. « Nous avons été témoins de violences à plusieurs reprises. Des clients sont impatients et font porter la responsabilité sur les employés », déplore par exemple un employé sous couvert de l’anonymat.

Interpellée par TVA, la vice-présidente adjointe aux communications de la Banque Laurentienne, Hélène Soulard, relativise le problème et explique dans un courriel envoyé à la chaîne que « pour éviter les files d’attente, nos clients peuvent utiliser nos solutions en libre-service ». La porte-parole ajoute que la banque propose d’« accompagner » ceux qui sont prêts à migrer vers le Web. « Nous veillons à accompagner nos clients vers des solutions plus pratiques et accessibles en tout temps, comme nos guichets automatiques, notre système bancaire téléphonique et notre site web », assure-t-elle.

IRRÉGULARITÉS AUTOUR DE CERTAINS PRÊTS HYPOTHÉCAIRES

Dans un tout autre registre, La Presse canadienne rapporte que le président et chef de la direction de la Laurentienne, François Desjardins, a reconnu avoir « sous-estimé la sensibilité du marché » après la polémique suscitée par les irrégularités autour de certains prêts hypothécaires vendus par l’institution financière à un tiers acheteur. Bien que les dirigeants de l’établissement n’aient pas abordé cette question dans leurs discours aux actionnaires mardi, lors de l’assemblée annuelle, l’affaire a rebondi après qu’un actionnaire s’est présenté au micro pour critiquer la direction et exiger des comptes à propos de la performance de l’action.

Actuellement, le titre de la septième banque au pays se négocie aux alentours de 48 dollars à la Bourse de Toronto, loin de son niveau d’environ 60 dollars au début décembre, avant le dévoilement d’irrégularités, souligne La Presse canadienne. L’agence précise que la Laurentienne s’attend à devoir racheter jusqu’à 392 millions de prêts jugés problématiques d’ici la fin du deuxième trimestre, au terme de l’examen approfondi pour des prêts hypothécaires totalisant 1,1 milliard qui ont été accordés.

Évoquant ce qu’il était advenu l’an dernier avec Home Capital, François Desjardins a assuré que cette situation était bien différente de celle dans laquelle se trouve aujourd’hui l’établissement qu’il dirige. La découverte d’irrégularités chez ce prêteur ontarien avait entraîné le dépôt d’accusations de la Commission des valeurs mobilières de l’Ontario et mené la compagnie au bord de la faillite, rappelle La Presse canadienne. « Le montant évoqué, c’est 400 millions [de prêts potentiellement rachetés] sur [un actif] de 47 milliards. C’est moins de 1 % de tout le travail qu’on fait », a tenu à rassurer le patron de la Laurentienne. Celui-ci a ajouté que la qualité des prêts en question n’était pas mauvaise, mais que le type de produit ne respectait simplement pas la liste de critères du tiers acheteur, dont l’identité n’a pas été dévoilée.

La rédaction