La pression s’accentue sur les fraudeurs fiscaux

Par La rédaction | 2 octobre 2017 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Depuis samedi, près d’une cinquantaine de pays peuvent désormais échanger automatiquement certaines informations bancaires concernant leurs résidents.

Il s’agit là d’« une étape supplémentaire dans la lutte contre la fraude fiscale à l’échelle mondiale », estime Le Figaro, qui rappelle que ce système d’échange automatique des données a été instauré en 2014 dans le cadre d’une entente conclue sous l’égide de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

Parmi les États signataires, figurent notamment la quasi-totalité des États membres de l’Union européenne, à l’exception de l’Autriche, qui n’appliquera l’accord qu’en septembre 2018, en même temps qu’une cinquantaine d’autres pays, comme le Canada, l’Australie ou la Suisse, qui a longtemps traîné les pieds.

DES PARADIS FISCAUX PARMI LES SIGNATAIRES

« Le plus remarquable est l’application de ce texte par des pays qui ont pendant longtemps figuré sur la liste noire des paradis fiscaux non coopératifs de l’OCDE », notamment le Lichtenstein, les Iles Vierges britanniques, Saint-Marin ou Les Bermudes, souligne Le Figaro, qui y voit le « signe d’un changement d’époque » et l’illustration du « mouvement mondial qui, sous le conseil de l’OCDE, s’est mis en place pour accélérer la lutte contre la fraude fiscale. »

« C’est la fin définitive du secret bancaire. Que le compte soit ouvert en nom propre ou via un trust ou une société à Panama, celui-ci sera quand même déclaré », se félicite Pascal Saint-Amans, directeur du Centre de politique et d’administration fiscales de l’OCDE, qui a supervisé la mise en œuvre de cet accord.

Parmi les 95 pays signataires, les États-Unis brillent cependant par leur absence, alors même qu’ils « sont en pointe pour contrer les tentatives de fraude fiscale de leurs citoyens », relève également Le Figaro. En effet, note le quotidien, depuis le scandale de la banque UBS en 2010, le pays a promulgué le Fatca (Foreign Account Tax Compliance Act), qui oblige les institutions financières du monde entier à transmettre au fisc américain les renseignements bancaires concernant leurs ressortissants.

LES ÉTATS-UNIS FONT JEU À PART

Rappelant que cette loi n’est pas réciproque, le journal reprend les propos que lui tenait au début de l’année Corinne Dadi, une avocate spécialisée en droit fiscal : « C’est un comble, les États-Unis ont imposé à tous les pays l’envoi automatique des données financières de leurs ressortissants, sans accepter la réciprocité », s’indignait-elle alors. Un agacement partagé par Pascal Saint-Amans, qui déplore lui aussi que « les États-Unis récupèrent des informations détaillées du monde entier alors que de leur côté ils ne transmettent pas le solde bancaire, ni les transactions ni les dividendes » de leurs citoyens.

Le Figaro indique par ailleurs que « les choses devraient aussi bouger » en ce qui concerne la fiscalité des entreprises, puisque une cinquantaine d’États et de territoires ont également accepté l’échange automatique d’informations comptables et fiscales sur les grands groupes. Toutefois, précise-t-il, ce système n’entrera en vigueur qu’en 2018.

LE CANADA A PERDU « DES MILLIARDS » EN SUISSE

Bien que le plus important lanceur d’alerte américain en matière de fraude fiscale ait prévenu dès 2008 le Canada que la banque suisse UBS exerçait sur son territoire des activités offshore illégales, l’Agence du revenu « est toujours incapable de récupérer des milliards cachés par de riches Canadiens dans les paradis fiscaux », rapporte Le Journal de Montréal.

« C’est incroyable que le Canada n’ait pas poussé plus loin son enquête. UBS y était plus active qu’aux États-Unis dans les années 2000. Or, ni Revenu Québec ni Revenu Canada n’ont jamais cherché à me rencontrer », a déclaré au JdeM Brad Birkenfeld. Cet ex-employé de la banque UBS en Suisse a « permis au fisc [américain] de récupérer cinq milliards de dollars et de faire condamner plusieurs riches Américains à des peines de prison », précise le quotidien.

« SÉRIEUSES ENTORSES AUX LOIS FISCALES »

Dans un fax envoyé au fisc canadien en juillet 2008, reproduit par le Journal, le lanceur d’alerte avait notamment averti un haut fonctionnaire de Revenu Canada que la banque helvétique poursuivait des activités illégales au pays : « Cette lettre est pour vous mettre au fait, vous et le gouvernement canadien, de sérieuses entorses aux lois fiscales et sur les valeurs mobilières par une grande institution financière et une variété de banquiers privés employés par la même institution, qui sont basés à Zurich et à Genève », écrivait-il alors.

Dans sa lettre, Brad Birkenfeld ajoutait que ces banquiers privés se rendaient souvent au Canada, spécialement « à Toronto, Montréal, Québec et Vancouver ». Selon le JdeM, UBS aurait ainsi permis à de riches Canadiens de « placer près de sept milliards de dollars dans un programme d’investissement offshore secret. »

PRÊT À VENIR TÉMOIGNER

L’ex-employé de la banque suisse se dit par ailleurs prêt à venir témoigner au Canada pour aider les fisc fédéral et québécois « à débusquer des évadés fiscaux », écrit le Journal. Et il soutient que les activités illégales alléguées d’UBS étaient beaucoup plus importantes, proportionnellement, au Canada qu’aux États-Unis. « Il y avait quatre fois plus d’argent sous gestion venant des États-Unis [dans le programme offshore], mais la population américaine est 10 fois plus importante », affirme-t-il.

Enfin, le JdeM indique que Brad Birkenfeld « dit être presque sûr que des personnalités politiques se trouvent parmi les clients canadiens d’UBS », comme il y en avait aux États-Unis.

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