La prison pour les manipulateurs de marchés dans l’UE?

Par La rédaction | 10 février 2014 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Les auteurs d’abus financiers graves, de manipulations de marchés ou de délits d’initiés pourront être envoyés derrière les barreaux dans toute l’Union européenne (UE), rapporte l’Agence France-Presse. C’est en tout cas ce que permet une directive avalisée le 4 février par le Parlement européen pour moraliser les marchés.

La nouvelle législation impose en particulier aux États membres de prévoir des peines de prison d’au moins quatre ans pour les formes les plus graves de délits d’initiés ou de manipulation de taux, et de deux ans minimum pour divulgation irrégulière d’informations privilégiées.

Ce texte a été adopté à une large majorité de 618 députés, issus de tous les groupes politiques, avec 20 voix contre et 43 abstentions.

Avec cette première législation qui introduit des sanctions pénales à l’échelle européenne, les courtiers ou banquiers fautifs « ne pourront plus se cacher où que ce soit », s’est félicitée la rapporteuse du texte, la travailliste britannique Arlene McCarthy.

Selon la députée travailliste, une telle uniformisation était devenue indispensable. À ce jour, en effet, les abus financiers graves ne sont pas réprimés pénalement dans plusieurs États membres de l’UE (Autriche, Bulgarie, Finlande, Espagne, Slovénie, Slovaquie et République tchèque), ce qui permet à leurs auteurs de s’en tirer avec de simples amendes.

Le scandale de la manipulation du taux de référence bancaire Libor, qui a éclaté en 2012, « n’est peut-être pas le dernier en son genre, des allégations de manipulations font également leur apparition sur les marchés du pétrole, du gaz et des changes », a mis en garde Arlene McCarthy.

L’affaire du Libor-Euribor a contribué à ce regain de sévérité. Plusieurs grandes banques, dont la Deutsche Bank et la Société Générale, qui avaient manipulé ces taux d’intérêt de référence, se sont vu infliger l’an dernier de lourdes amendes, pour un montant record de 1,7 milliard d’euros (2,5 milliards de dollars).

Les États membres auront deux ans pour mettre en vigueur les dispositions de cette directive. Ils devront aussi veiller à assurer une formation adéquate aux membres des autorités judiciaires et répressives qui traitent ces affaires.

Avec cette législation, l’Europe « lance aux marchés le signal fort d’une tolérance zéro face aux abus », s’est félicitée la commissaire européenne à la Justice, Viviane Reding.

Cette mesure « aura un effet dissuasif et contribuera à restaurer la morale, un mot qui ne peut pas être absent des marchés financiers », a soutenu pour sa part Michel Barnier, le commissaire européen chargé des Services financiers.

Au passage, Michel Barnier a appelé la Grande-Bretagne, première place financière européenne, à rallier le dispositif commun, en renonçant à la dérogation dont elle dispose de droit sur ces mesures.

À défaut, Londres en resterait à ses dispositions actuelles avec, selon la nature des infractions commises, un degré de sévérité variable par rapport aux normes communes, a-t-il souligné.

Le gouvernement britannique a trois mois pour se prononcer.

La rédaction