La retraite n’est pas temporaire

Par Peter Drake | 23 août 2010 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
10 minutes de lecture

C’est l’été, il fait bon vivre; et c’est particulièrement vrai pour ceux qui prennent leur retraite. L’été est la période privilégiée par les Canadiens pour franchir cette étape de leur vie. En effet, la recherche de Fidelity Investments révèle que l’été est le choix de près du tiers des nouveaux retraités chaque année, l’automne venant en seconde position. Quoi de plus logique? L’été est généralement associé aux vacances et à la détente. Pour les nouveaux retraités, ce premier été est effectivement une période heureuse; dans certains cas, il marque le début de très longues vacances. Les activités estivales ne manquent pas, mais l’oisiveté n’est pas exclue, dans la douceur du beau temps, des fleurs ou des plages. La moindre promenade est d’autant plus agréable quand on n’est pas engoncé dans un manteau et qu’on ne risque pas de glisser à chaque pas. Après l’été, arrive l’automne et les nouveaux retraités réalisent qu’ils ne font plus partie de ceux qui reprennent le travail, les études, la routine. Sans cette balise, ils prennent peu à peu conscience que la retraite n’est pas qu’une longue période de vacances. Réussir sa retraite ne s’improvise pas.

Que pouvez-vous faire pour aider vos clients nouvellement à la retraite? Pourquoi ne pas mettre sur pied un programme « Vivre à la retraite 101 »? Planifiez-le sur le modèle d’une année scolaire. Commencez les cours vers le début de l’automne. Prévoyez un contrôle des progrès de vos élèves (« examen » de fin de session) juste avant la saison des fêtes. Reprenez les cours pour la session d’hiver et terminez avec « l’examen » final au printemps. Et les bons élèves auront réussi leur « année »!

Quant au contenu du programme, je vous suggère de couvrir l’ABC de la retraite pendant l’automne et d’aborder progressivement les sujets plus complexes jusqu’au printemps. Je vous conseille également de grouper la matière selon deux thèmes : les questions financières à la retraite et les activités à la retraite. Il va sans dire que les deux sont étroitement liés. Comme le disait si justement un de mes collègues « ce que nous prévoyons faire à la retraite détermine notre planification en vue de la retraite ». Souhaitons que vos clients aient soigneusement préparé leur retraite, mais dans le cas contraire, il n’est jamais trop tard pour planifier l’avenir. Commençons par l’aspect financier.

Le point de départ est sans doute la planification du revenu de retraite.

1-Le client doit énumérer ses dépenses en fonction de deux catégories : les dépenses essentielles et les dépenses discrétionnaires.

2-Le client doit évaluer les sources de revenu sur lesquelles il peut compter (SV,RPC/RRQ, pensions d’employeur, rentes) pour établir si elles couvriront ses dépenses essentielles. Si ce n’est pas le cas, le conseiller doit discuter avec le client de la possibilité d’investir une partie de son portefeuille de manière à combler cette lacune.

3-Le conseiller doit aider le client à définir une stratégie appropriée pour couvrir les dépenses discrétionnaires.

4-Le conseiller et le client doivent se rencontrer au moins une fois par an pour revoir la planification.

Le deuxième volet porte sur l’administration courante des ressources financières du client; par exemple, comment coordonner le paiement des factures courantes quand il n’y a plus de chèques de paie versés régulièrement chaque mois, mais plusieurs sources de revenu dont la fréquence est probablement différente.

Vous pourriez consacrer un troisième volet aux comportements des marchés financiers et au portefeuille du client. Les retraités accordent dans l’ensemble davantage d’attention aux nouvelles financières et économiques. D’une part, parce qu’ils en ont le temps et, d’autre part, parce que les mouvements du marché risquent d’avoir des répercussions considérables sur leur revenu mensuel.

Pour terminer, je conseille un quatrième volet sur les cinq principaux risques qui menacent le revenu de retraite. C’est effectivement le moment idéal pour étudier les risques liés à la longévité, à l’inflation, à la répartition de l’actif, aux taux de retrait et aux soins de santé.

Le second thème du cours porte sur la question des activités à la retraite. Comme je l’affirme depuis longtemps, la planification financière n’est pas le plus difficile de la préparation à la retraite. Les conseillers disposent d’une armada d’outils financiers pour orienter leurs clients. On ne peut pas en dire autant en ce qui concerne l’aspect non financier. Se projeter dans le futur, imaginer leur vie familiale et les activités qui leur permettront de s’épanouir à la retraite est un exercice laborieux pour de nombreux retraités. En théorie, les gens comprennent bien qu’ils cesseront de travailler et pourront occuper tout leur temps à loisir. La chose est moins évidente sur le plan émotionnel ou pratique. La plupart des gens à mi-chemin dans leur carrière regrettent de ne pas pouvoir diversifier davantage leurs activités quotidiennes. Pourtant, quand ils en arrivent au point où une multitude de choix s’offrent à eux – c’est-à-dire à la retraite – ils sont souvent désarçonnés.

Commencez par le plus simple. Énumérez les activités susceptibles d’intéresser vos retraités néophytes : voyages, bénévolat, passe-temps, bricolage, travail rémunéré ou apprentissage. Efforcez-vous de démystifier les préjugés rattachés à chacune de ces activités. Les voyages représentent beaucoup d’attraits – loisirs, découverte, aventure, mais aussi, selon les moyens choisis, une dépense importante. De plus, les couples peuvent ne pas s’entendre sur la destination ou la formule du voyage.

Offrez à vos clients une liste des activités de bénévolat locales, précisant en quoi elles consistent et quelles aptitudes elles exigent (le cas échéant). Le bénévolat est la pierre angulaire de notre société, mais il n’échappe pas aux préjugés. Le premier est que le jeu n’en vaut pas la chandelle parce qu’il n’est pas rémunéré. Ensuite, on s’imagine qu’il faut posséder des aptitudes bien précises. Heureusement, la valeur du bénévolat est de plus en plus reconnue et appréciée du public, mais sa véritable récompense est la satisfaction d’accomplir quelque chose d’utile pour son prochain. De plus, la plupart des activités de bénévolat exigent seulement d’être présent et d’avoir un esprit positif.

Pour le retraité, les passe-temps peuvent devenir un merveilleux exutoire ou une calamité. Par définition, il s’agit d’une activité à temps partiel. Certains en font une occupation à temps plein, mais ils sont rares. On ne compte plus le nombre de golfeurs qui croyaient que sept jours sur sept sur le vert serait le paradis… et ont constaté le contraire une fois à la retraite. Cependant – et c’est ici que l’on apprécie tous les choix à notre portée – la retraite ouvre la voie à une kyrielle de nouveaux passe-temps.

Selon le cas, les travaux d’entretien, de réparation ou de rénovation d’une maison sont une activité très agréable ou un cauchemar. Ces travaux sont incontournables, car le temps fait son œuvre même si les occupants de l’habitation sont à la retraite. Par souci d’économie, certains retraités décident de faire eux-mêmes des travaux importants. Pourquoi pas, s’ils possèdent les compétences voulues? Mais, à moins d’avoir déjà de bonnes aptitudes de bricolage, on ne devient pas automatiquement électricien, plombier ou menuisier même si on a une affinité pour ces travaux.

L’emploi rémunéré de retraités est de plus en plus fréquent et je prévois qu’il occupera une part encore plus importante dans les années à venir. En effet, avec le nombre réduit de nouveaux arrivants sur le marché du travail (conséquence du faible taux de natalité canadien pendant longtemps), on fait davantage appel aux employés en fin de carrière. Plusieurs retraités souhaitent continuer à travailler, car cette routine est essentielle à leur équilibre; si le travail est valorisant, si les collègues sont agréables, c’est une façon d’autant plus attrayante de passer une partie ou la totalité de sa retraite. Selon les recherches de Fidelity, cette période de vie active après la retraite dure en majorité quatre à cinq ans. Certaines personnes continuent à travailler dans le même domaine, d’autres se recyclent : le choix est pratiquement infini.

Le perfectionnement ou l’acquisition de nouvelles connaissances est une des activités les plus en vogue parmi les retraités. Cette demande est de mieux en mieux servie par les écoles, les collèges et les universités. À cet égard également, les possibilités sont illimitées, des cours du soir aux diplômes universitaires. Un des avantages appréciables de l’apprentissage comme activité de retraite est qu’il exerce le cerveau. À l’instar des muscles, il faut faire travailler ses méninges pour les garder en forme. Et puisque nous parlons de muscles, tout cours qui se respecte doit couvrir les bienfaits d’un exercice physique régulier.

Enfin, il serait opportun d’intégrer à votre cours une section sur les exigences personnelles de chaque retraité. J’entends par là que chacun doit déterminer si la routine lui est nécessaire et dans quelle mesure le couple doit participer aux mêmes activités (temps ensemble, temps chacun de son côté, responsabilités domestiques), sans oublier la règle de base d’une retraite réussie « peu importe ce que vous faites, restez actifs ».

Ce que je vous propose vous semble peut-être exigeant. Effectivement, c’est du travail, mais vous n’êtes pas obligés de tout faire vous-mêmes. La communauté met à votre disposition de nombreux intervenants qui se feront un plaisir de renseigner vos élèves. L’apport de retraités « chevronnés » est aussi très efficace, car ils font bénéficier les autres de leurs réussites et de leurs échecs. Outre ajouter à leur satisfaction, « Vivre à la retraite 101 » vous donne l’occasion de rencontrer régulièrement vos clients, ce qui est toujours un bon moyen de les fidéliser davantage et d’accroître vos affaires.

-Peter Drake est vice-président, Retraite et recherches économiques à Fidelity Investments Canada. Fort de plus de 35 années d’expérience à titre d’économiste, il dirige les initiatives de recherche de Fidelity axées sur la retraite au Canada à notre époque.

Toute opinion exprimée sur une société, un titre, une industrie ou un secteur du marché en particulier représente un point de vue personnel à un moment donné et ne constitue pas nécessairement celui de Fidelity ou d’une autre personne au sein de l’organisation. Ces opinions sont appelées à changer à tout moment en fonction de l’évolution des marchés et des autres facteurs, et Fidelity décline toute responsabilité en ce qui a trait à la mise à jour de ces points de vue. Ces points de vue ne peuvent pas être considérés comme un conseil en placement.

Peter Drake