L’ARC montre les dents

Par La rédaction | 18 Décembre 2017 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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À partir de mars 2018, le Programme des divulgations volontaires (PDV) de l’Agence du revenu du Canada (ARC) sera moins généreux financièrement pour ses utilisateurs.

Les contribuables canadiens qui divulguent sur une base volontaire des montants qu’ils n’ont pas déclarés au fisc et pour lesquels ils doivent des impôts bénéficiaient généralement d’une réduction, voire parfois d’un abandon, des intérêts et des pénalités liés à la déclaration tardive de ces montants. Ce ne sera plus le cas, annonce l’ARC.

Le gouvernement fédéral entend, en effet, intensifier sa lutte contre l’évasion fiscale et l’évitement fiscal. Désormais, le PDV offrira l’immunité contre les poursuites criminelles et retirera les pénalités pour négligence grave, mais le contribuable devra bel et bien payer le reste de la facture.

PLUS DIFFICILE À OBTENIR

Il sera aussi plus difficile d’y être admissible, notamment pour les contribuables fortunés qui ont sciemment fait de l’évasion ou de l’évitement fiscal.

Présentement, environ 80% des applications sont approuvées. Or, l’ARC considère que certains individus fortunés et des entreprises utilisent le PDV pour éviter les conséquences de leur planification fiscale abusive, rapporte The Globe and Mail. Plusieurs ne réagissent que lorsque leur stratagème d’évitement fiscal fait l’objet d’un audit à l’ARC ou quand l’Agence commence à poser des questions à leur avocat ou leur comptable. C’est donc moins une divulgation de bonne foi qu’une ultime tentative de se mettre à l’abri des foudres de l’ARC.

Les contribuables qui veulent être admissible au PDV devront nommer les conseillers qui ont participé à leur planification et leurs déclarations fiscales. Quant aux avocats, ils ne pourront plus se servir du programme en protégeant l’anonymat de leur client. Les contribuables cités dans des fuites de documents comme les Panama Papers, eux, n’auront plus accès au programme.

PLUS FACILES À TROUVER

Jusqu’à maintenant, les avantages financiers liés au VDP étaient présentés comme des incitatifs importants pour assurer le succès du programme et permettre la récupération au moins partielle des sommes dues. Qu’est-ce qui a changé?

Selon le commissaire adjoint de l’ARC, Ted Gallivan, l’Agence a désormais accès à beaucoup plus de données sur les transferts de fonds mondiaux de plus de 10 000 dollars et les informations bancaires mondiales en plus d’un programme de donneur d’alerte qui fonctionne bien.

« Nous sommes de plus en plus confiants de débusquer ces contribuables par nous-mêmes et de ne plus être aussi dépendants du Programme des divulgations volontaires pour les trouver », soutient M. Gallivan dans le Globe and Mail. Dans deux ou trois ans, nous envisageons de fermer ou de restreindre davantage le programme, parce que nous sommes extrêmement confiants que nous seront capables d’identifier ces contribuables. »

La divulgation volontaire d’erreurs jugées « honnêtes » ou portant sur de petits montants restera toutefois possible.

DIVULGATION DE 1,6 MILLIARD DE DOLLARS

En 2016-2017, le PDV a été utilisé 18 500 fois pour divulguer 1,6 milliard de dollars qui n’avaient pas été déclarés au fisc. Même l’ex-premier ministre canadien Brian Mulroney s’en était servi à une époque, pour déclarer un revenu de 225 000 dollars, des années après avoir reçu des enveloppes d’argent comptant de l’homme d’affaires germano-canadien Karlheinz Schreiber. Une affaire qui avait fait grand bruit à l’époque et avait mené à la commission d’enquête publique Oliphant, rappelle Le Devoir.

SORTIR LES CROCS

« Le gouvernement est engagé à lutter contre l’évasion fiscale et l’évitement fiscal abusif afin de maintenir un régime fiscal adapté et équitable pour tous les Canadiens, a soutenu Diane Lebouthillier, ministre du Revenu national, par voie de communiqué. Les changements apportés au Programme des divulgations volontaires font partie de ces efforts et permettront à l’Agence de sévir davantage à l’endroit de ceux qui se soustraient intentionnellement à la loi. Grâce aux investissements du gouvernement, l’Agence aura les ressources, le personnel et les outils pour recueillir des renseignements. Dans cette optique, elle examinera le nouveau Programme au cours des prochaines années en vue de restreindre davantage l’allègement qui en découle. »

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