Le pire est passé pour les obligations de sociétés

21 avril 2020 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Photo : ffikretow / istockphoto

Il y a des occasions à saisir dans la catégorie investissement, mais beaucoup moins dans le haut rendement, selon Patrick O’Toole, vice-président, titres à revenu fixe à Gestion d’actifs CIBC.

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« Quand le coronavirus a frappé l’Occident, on s’inquiétait de voir les obligations de sociétés déclencher une crise financière plus large. Ces inquiétudes se sont atténuées pour la catégorie investissement », dit Patrick O’Toole.

« Après un creux sous 1 % plus tôt cette année, les écarts de rendements de la catégorie investissement ont atteint un pic de 3,73 % au plus fort de la panique, et sont redescendus autour de 209 points de base après que la Fed a annoncé un programme de rachats d’obligations dans les marchés primaire et secondaire. Cette annonce a permis de plafonner les écarts de rendement car les investisseurs sont rassurés par la présence d’un important acheteur dans le marché », poursuit l’expert.

« Les écarts de rendement du marché canadien ont eux aussi connu un creux à 1 % puis ont grimpé à 27,4 %, soit 10 % de moins qu’aux États-Unis, pour ensuite redescendre presque au même niveau, à 207 points de base », observe-t-il.

Selon lui, ces mouvements au Canada ont été portés en partie par le programme de la Fed, mais aussi par l’annonce fin mars par la Banque du Canada qu’elle allait racheter des titres à hauteur de 10 milliards de dollars dans le marché secondaire – une « surprise pour la plupart des investisseurs ».

« Le pire est donc passé pour la catégorie investissement. Cela veut aussi dire que les plus belles occasions d’achat sont dernière nous, mais ces titres demeurent très attrayants puisque leurs écarts de rendement sont deux fois plus larges qu’au début 2020 », dit Patrick O’Toole.

On ne peut pas en dire autant pour les obligations à haut rendement, prévient l’expert. En effet, aucun rachat par les banques centrales n’a été annoncé dans cette catégorie, mis à part les « anges déchus » qui étaient encore notés dans la catégorie investissement le 22 mars mais ont été abaissés depuis : ils seront inclus dans le programme de la Fed. C’est le cas par exemple de Ford et de Macy’s. Le reste de la catégorie haut rendement sera soumis entièrement aux aléas du marché.

Pendant ce temps, les marchés d’actions ont connu une reprise mais il faut s’attendre à une grande volatilité.

« Les indices TSX et S&P 500 ont monté de plus de 20 % depuis leur creux de plus de 30 %. Ce rebond est l’effet d’une mentalité optimiste qui subsiste après le marché haussier que l’on a connu. Mais habituellement, les marchés baissiers se creusent à nouveau après le premier rebond. Les entreprises n’ont pas encore révisé nettement à la baisse leurs prévisions de résultats, mais c’est peut-être parce que les investisseurs ont l’œil fixé sur 2021 quand la vie normale reprendra. On peut s’attendre à ce que la crise prolongée pousse les prévisions de résultats à la baisse et que la volatilité s’accroisse encore dans les marchés d’actions. Les obligations à haut rendement seront alors affectées, et leurs écarts de rendement risquent de culminer à nouveau », analyse Patrick O’Toole.

Pour les obligations de catégorie investissement, le plus grand risque est celui d’une seconde vague d’infections au coronavirus avant qu’un traitement ou un vaccin soient confirmés.

« On devrait à nouveau fermer les entreprises, en présumant qu’on les a rouvertes d’ici là, ce qui prolongerait les dommages sur celles qui ont survécu à la première vague. Les chances de voir le PIB remonter s’amenuiseraient, et les dommages sur l’économie prendraient encore de l’ampleur. On verrait davantage de défaillances de sociétés et de notations revues à la baisse. Dans un tel environnement, les investisseurs se réfugieraient dans les titres souverains et les écarts de rendements atteindraient de nouveaux sommets », s’inquiète Patrick O’Toole.

Heureusement, ce « scénario catastrophe » a peu de chances de se produire selon lui, si on se fie aux mesures récentes des gouvernements et de leurs banques centrales.

« Ils ont agi fermement et ils iront encore plus loin pour stabiliser les marchés si nous connaissons une seconde vague. Il ne faut jamais sous-estimer leur capacité à créer de nouveaux programmes et soutenir l’économie », croit l’expert.

Cela l’amène à entrevoir de bonnes occasions dans le haut rendement malgré la possibilité d’une seconde vague d’infections – mais leur attrait est à prendre avec des pincettes.

« Les défaillances vont atteindre un pic dans les mois à venir, et ce risque est largement pris en compte dans les prix des entreprises les plus endettées. Ils sont très bas, mais il faut faire très attention à bien sélectionner les titres, à procéder à des analyses ascendantes, et à s’assurer que ces entreprises ont la capacité de survivre, de payer leurs coupons et de refinancer leurs dettes », prévient Patrick O’Toole.

« Les écarts de la catégorie haut rendement ont terminé le premier trimestre à 8,73 % avant de grimper à 10,80 % puis de retomber au-dessus des 7 %. S’ils demeurent à ce niveau dans les douze mois à venir, la catégorie pourrait offrir des rendements à deux chiffres d’ici la fin du premier trimestre 2021. »

Ce texte fait partie du programme Gestionnaires en direct, de la CIBC. Il a été rédigé sans apport du commanditaire.