Le prix élevé des maisons pourrait devenir problématique

Par La rédaction | 18 avril 2017 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Le coût élevé des maisons et la taille plus importante des prêts hypothécaires « pourraient rendre la prochaine récession plus longue et plus sévère » au Canada, met en garde Marché des capitaux CIBC.

Dans une note de conjoncture publiée jeudi, l’économiste en chef de la firme, Avery Shenfeld, et les deux économistes principaux Andrew Grantham and Nick Exarhos soulignent que si une forte baisse du prix de l’immobilier résidentiel ne causerait probablement pas de ralentissement économique, tel n’est pas le cas si la tendance se maintient à la hausse.

Intitulé Would We Fear or Cheer a House Price Correction? (Une correction du prix des maisons serait-elle néfaste ou bénéfique? – en anglais seulement), ce document se montre plutôt alarmiste quant à la situation au pays, en particulier sur les marchés de Toronto et Vancouver.

« UNE HAUSSE DE 2 % DES TAUX AURAIT PEU DE CONSÉQUENCES »

« Étant donné que, en moyenne, des prêts hypothécaires avec un capital plus important ont été requis pour payer des maisons plus chères, la capacité de la Banque du Canada à augmenter les taux durant la période haussière du cycle pourrait être sévèrement limitée », estime ainsi Avery Shenfeld. Celui-ci prévoit qu’« une hausse de 2 % des taux hypothécaires aurait des conséquences relativement faibles, si l’on se fie aux précédents cycles de resserrement », mais qu’elle entraînerait « une hausse d’environ 25 % des versements mensuels pour un prêt hypothécaire ordinaire de cinq ans ».

La note de la CIBC indique que même si les prêts hypothécaires assurés offrent un filet de sûreté, puisqu’il permettent à l’emprunteur de demeurer solvable, cela ne signifie pas pour autant qu’il n’y aurait pas « un impact considérable » sur la consommation en dehors du marché immobilier.

Avery Shenfeld observe également qu’en théorie, si l’on se fie aux données historiques, « une réduction du prix des maisons ne devrait pas causer un ralentissement économique, malgré ce qui s’est produit aux États-Unis lors de la crise des prêts hypothécaires à risque élevé ». Selon lui, le Canada n’est pas à la veille de corriger le prix des maisons. Cependant, avertit-il, le cocktail prix élevés et prêts hypothécaires de plus en plus lourds risque de « rendre la prochaine récession plus problématique lorsqu’elle arrivera ».

« L’IMPORTANT EST QUI DÉTIENT LA DETTE ET SON REVENU »

L’économiste en chef affirme que les conséquences d’une correction du prix des maisons sur l’ensemble de l’économie canadienne dépendraient « en grande partie » de ce qui a déclenché cette correction, par exemple une hausse des taux d’intérêt ou la qualité des prêts hypothécaires. « La Banque du Canada n’augmentera les taux d’intérêt que parce que l’économie se porte bien », affirme-t-il, ajoutant que « si le prix des maisons venait à chuter dans un tel environnement, comme cela pourrait devenir le cas, il va sans dire que l’économie serait en très mauvais état ».

Toujours selon la note de conjoncture, la qualité des prêts hypothécaires, qui était l’une des causes de la crise du marché immobilier aux États-Unis, « n’est pas un problème aussi important au Canada, en raison du contrôle plus serré dont fait l’objet la majorité des prêts accordés par les institutions financières réglementées ».

Enfin, les économistes de la CIBC jugent que « se concentrer sur le ratio d’endettement global n’apporte pas beaucoup à l’analyse », car « ce qui importe le plus est qui détient la dette et le revenu qu’a cette personne ». « Si le prix des maisons venait à être corrigé pour n’importe quelle autre raison, le secteur bancaire perdrait sa première source de croissance des revenus, qui est liée à la hausse des soldes hypothécaires. Toutefois, il ne semble pas y avoir la même fragilité à laquelle faisait face le système américain lors de la crise », conclut Avery Shenfeld.

Moody’s tient le marché immobilier canadien à l’œil

La firme de notation Moody’s a publié la semaine dernière un rapport dans lequel elle place le Canada au sein d’un groupe de quatre pays jouissant d’une note AAA dont les marchés immobiliers présentent un risque de correction, rapporte La Presse canadienne.

Cette dernière précise que les marchés de la Nouvelle-Zélande, de la Suède et de l’Australie affichent eux aussi d’importantes hausses de prix des habitations alors que leurs ménages connaissent des niveaux d’endettement parmi les plus élevés des économies avancées ces trois dernières années. Selon Moody’s, l’activité de construction résidentielle représente 7,6 % du produit intérieur brut canadien et 7,5 % du marché néo-zélandais.

LE CANADA DISPOSE D’UN SOLIDE SYSTÈME BANCAIRE

« Au Canada et en Nouvelle-Zélande, un repli du marché immobilier aurait des débordements assez importants pour l’économie dans son ensemble, par l’entremise de la chaîne d’approvisionnement et des impacts pour l’emploi et la consommation », indique l’agence de notation dans son rapport. Elle précise toutefois qu’à moins que des reculs des prix des maisons ne soient accompagnés d’autres chocs négatifs de longue durée, cela ne minera pas de façon fondamentale les « profils de crédit » des pays concernés.

En effet, souligne Moody’s, le Canada, la Nouvelle-Zélande, la Suède et l’Australie disposent de solides systèmes bancaires, avec de hauts niveaux de capitalisation, des modèles d’affaires prudents et de bonnes liquidités. « Les systèmes bancaires de ces quatre pays sont parmi les plus vigoureux de ceux que nous évaluons », observe-t-elle.

La rédaction