Les 6 ennemis de l’investisseur

Par Jean Dupriez | 19 septembre 2016 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
5 minutes de lecture

«Le pire ennemi de l’investisseur, ce n’est pas la bourse, c’est lui‑même»

Benjamin Graham

Parmi les causes de nos réactions irrationnelles aux fluctuations boursières, distinguons deux catégories qui, toutes deux, sont nos ennemis :

a) les ennemis qui sont cachés en nous : nos ennemis internes, nos ennemis intimes.

b) les ennemis externes : ils sont autour de nous sous la forme d’un vocabulaire souvent trompeur qu’on appelle « marketing » et aussi ceux qui se prétendent nos « amis ».

Petite note : si nous ne sommes pas certains d’être ou de devenir capable de maîtriser seul nos réactions sentimentales devant les fluctuations boursières, tant à la hausse qu’à la baisse, il serait utile et efficace de penser à utiliser les services d’un bon conseiller financier. Celui-ci pourra nous aider à contrôler tant notre enthousiasme naïf que notre pessimisme irrationnel le plus noir.

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Ennemi #1 : Notre ignorance : C’est dès l’école primaire et secondaire que les rudiments de l’épargne et de l’investissement devraient nous être enseignés. Mais ces cours ont été supprimés par les petits génies du ministère de la non-éducation.

Nous avons ainsi le privilège unique en occident de pouvoir rester des ignorants en matière financière.

Heureusement, nous avons la possibilité bien réelle de nous instruire par nous-mêmes… Mais peut-être sommes-nous trop paresseux pour ce faire? Oui, c’est le cas de trop nombreuses personnes. Travaillons donc et instruisons-nous!

Ennemi #2 : Notre incompréhension ou notre compréhension limitée. S’il est vrai que la science de l’investissement n’est pas toujours facile, il est aussi vrai que ses bases essentielles ne sont pas difficiles. Mais comprendre exige un peu de temps, un peu de travail et un petit effort de concentration. Il n’est pas nécessaire de tout comprendre en investissement, mais il est absolument nécessaire de comprendre les bases.

Ennemi #3 : Notre incohérence : la cohérence, n’est-ce pas l’art d’assembler correctement et efficacement toutes les pièces d’un casse-tête?

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Chacun de nous peut-il s’entraîner à faire la synthèse (mettre ensemble d’une manière cohérente les pièces du casse-tête) et la coordination de ses investissements personnels?

Ennemi #4 : Notre impulsivité : nous réagissons aux nouvelles financières (et aux autres d’ailleurs) sans réfléchir, poussés par un instinct animal proche de la peur. C’est ce qu’on appelle avoir une « réaction épidermique ». La peur nous fait réagir… et, pire, nous empêche d’agir intelligemment. La peur est toujours mauvaise conseillère.

Réagir, c’est excellent pour notre main qui doit s’éloigner du feu à l’instant même où elle s’en approche trop. Une chute boursière nous laisse le temps de réfléchir… pour agir ensuite, débarrassé de notre réaction épidermique.

Ennemi #5 : Notre imagination : Notre cerveau est capable de transformer un rêve en cauchemar… si nous le laissons aller sans boussole pour le diriger. Notre imagination transforme notre optimisme en pessimisme et l’inverse avec une facilité déconcertante. Ce qui est grave ici, c’est que nous le savons parfaitement. Mais souvent nous nous laissons aller sans nous contrôler.

La bourse, lorsqu’elle est adéquatement utilisée, ne mérite ni rêve ni cauchemar.

Ennemi #6 : Notre immédiateté : rares sont les gens qui pensent d’abord et systématiquement à 5 ans ou à 10 ans ou à 30 ans de distance. La plupart des gens que nous connaissons pensent à aujourd’hui ou bien à la date de leurs prochaines vacances, date qui est toujours trop loin.

Cette habitude nous empêche de voir et de réaliser que la bourse est profitable à long terme. Mais notre manque de perspective et de vision nous condamne souvent à prendre des décisions en fonction de facteurs immédiats ou à court terme pour résoudre des problèmes à long terme.

Pouvons-nous maitriser ces six « i »?

OUI, un pas à la fois. Une faiblesse à la fois. Un « i » à la fois.

Commençons par prendre une grande respiration. Calmons-nous!

Lorsque nous avons investi en bourse, n’avons-nous pas accepté de vivre cette partie de notre vie dans un univers fluctuant? Rappelons-nous que les fluctuations, ça va vers le haut et ça va vers le bas, comme le thermomètre qui fluctue tous les jours et toutes les saisons! Nous nous cognerons à la réalité, mais…

« Se cogner à la réalité ne peut pas faire de mal. »

Smaïn

… à condition d’agir avec maîtrise et non pas de se contenter de réagir.

Pouvons-nous nous améliorer? Pouvons-nous devenir bons pour nos placements en bourse, même et surtout quand nous avons l’impression que la bourse est mauvaise pour nous?

Réalisons que la bourse n’est jamais ni bonne ni mauvaise pour nous. La bourse est indifférente; elle monte et descend… comme la marée. C’est tout. Les marins maîtrisent la marée; maîtrisons-nous si nous voulons maitriser nos placements en bourse!

Comment nous améliorer? Une dose d’étude et beaucoup de discipline. Grâce à l’étude, nous comprendrons mieux la bourse et ses humeurs; grâce à notre meilleure compréhension, nous maîtriserons nos craintes et pourrons acquérir la discipline nécessaire pour vivre avec des placements variables… et leur récompense à long terme.

Souvenir de carrière : j’ai constaté au long de ma longue carrière de conseiller financier qu’il était plus difficile de convaincre un client de sortir de la bourse quand la bourse est très haute que de convaincre un client d’entrer en bourse lorsque celle-ci est très basse. C’est croire que la pleine lune restera toujours pleine lune ou que la marée restera toujours basse.


Jean_Dupriez_NB_150Jean Dupriez, LL.L., DAE., est planificateur financier et membre de l’Association des MBA du Québec. Auteur de deux ouvrages, Le classement des documents personnels (2002) et Savoir choisir son conseiller financier (2010), il s’exprime régulièrement sur les enjeux de la profession dans son blogue sur Conseiller.ca.

Cinq main qui placent des roues crantées les unes contre les autres sur un fonds bleu clair.

Jean Dupriez

Jean Dupriez, LL.L., DAE., Pl.fin. (ex Adm.A., ex PFA., ex GPP., ex détenteur de permis en épargne collective, en assurance de personne et en assurance collective), mais heureusement toujours marié avec Françoise depuis 57 années!) possède une formation internationale en Droit (UdeM) ainsi qu’en Financement et Administration d’entreprises (London School of Economics + Louvain). Il est planificateur financier et membre de l’association des MBA du Québec. Après 20 années dans le commerce international au sein de grandes compagnies, son goût pour l’indépendance l’a incité, en 1984, à se lancer dans une seconde carrière, plus sédentaire, dans les services financiers personnels, dont 20 ans associé au Groupe Peak. En juin 2002, il publie «Le classement des documents personnels» et en 2010 «Savoir choisir son conseiller financier». Depuis 2013, dans une semi-retraite active, il se consacre à la création de diverses formations. Vers 2015, il met en ligne sa 3e œuvre : «Comprendre l’investissement», une formation illustrée à la fois technique et comportementale destinée au grand public et aux conseillers financiers. Actuellement, il offre aux conseillers et planificateurs financiers 2 formations en ligne, dûment accréditées de plusieurs UFC (CSF et IQPF) sur le site de Campus finance. Voici le lien pour les atteindre.