Les marchés adorent le coronavirus

Par Nicolas Ritoux | 9 septembre 2020 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Marché boursier et COVID-19
Photo : wildpixel / iStock

Ils pourraient se montrer euphoriques pour encore un bon moment, estime Craig Jerusalim, gestionnaire de portefeuille principal à Gestion d’actifs CIBC.

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« La seule chose plus grave qu’une chute de 37 % dans un portefeuille, comme celle qu’on a vue en mars, est un investisseur qui reste sur la touche pendant que le marché remonte de 50 % », lance Craig Jerusalim.

Selon lui, l’année 2020 nous a donné une « importante leçon de psychologie », où l’on a pu nettement constater que les marchés d’actions ne reflètent pas l’économie et vice-versa.

« Pendant que les actions ont connu une reprise en V, l’économie est restée en deçà de son niveau pré-pandémique. La COVID-19 a affecté de façon disproportionnée les travailleurs de première ligne à faibles revenus, ainsi que les minorités ethniques, les femmes et les familles monoparentales. Pour leur part, les cols blancs à hauts revenus qui détiennent davantage d’actifs se sont pour la plupart adaptés au télétravail », observe Craig Jerusalim.

« L’une des explications de la reprise en V des marchés d’actions est un déferlement de spéculateurs sur séance (day traders) qui ont été motivés tant par leur ennui à la maison que la baisse des frais d’opérations, les fractionnements d’actions, et l’absence d’événements sportifs ou de jeux d’argent traditionnels », poursuit l’expert.

Il cite plusieurs exemples flagrants d’euphorie excessive des marchés, comme les rendements « vertigineux » de Kodak, la hausse du « papier sans valeur » de Hertz, la campagne (perdue) de Tesla pour être incluse à l’indice S&P 500, ou l’engouement pour les sociétés d’acquisition à vocation spécifique (SPAC). Mais il rappelle que l’euphorie peut souvent durer longtemps, comme ce fut le cas à la fin des années 90, quand la correction n’est apparue qu’après plusieurs années. Et s’il reconnait que les indices américains et canadiens sont actuellement très élevés, Craig Jerusalim croit qu’il leur reste encore une marge d’expansion.

« Nous ne savons pas où le marché va se diriger dans les prochains trimestres, mais nous savons qu’il y aura beaucoup de volatilité à mesure que les économies essaient de se rouvrir ou sont amenées à se refermer, sans compter l’élection présidentielle américaine, les tensions avec la Chine, et les perspectives économiques mondiales. Cependant, nous savons aussi qu’à long terme, le marché finit toujours par monter. L’important est donc d’identifier des entreprises de qualité qui offrent des rendements composés au fil du temps », estime l’expert.

« Beaucoup d’investisseurs se demandent quelles seront les conséquences pour les marchés d’actions d’une victoire démocrate ou d’un second mandat pour Donald Trump. J’ai fait des recherches après sa victoire-surprise de 2016 et j’en ai conclu que la présidence américaine est largement déconnectée des rendements des marchés d’actions. Les résultats sont même souvent contre-intuitifs : par exemple, les gens s’attendaient à tort à de faibles rendements sous Barack Obama, et l’inverse sous George W. Bush. Il y aura des réactions excessives à court terme dans certains secteurs comme les technologies ou les soins de santé, mais cela créera des occasions d’investissement », dit Craig Jerusalim.

Selon lui, il ne faut pas surestimer l’influence de l’élection présidentielle américaine.

« Joe Biden est davantage en faveur d’initiatives vertes, mais celles-ci ne dépendent pas d’une seule personne, et tout le monde reconnait l’importance d’y investir à long terme. Il demeure difficile d’installer de nouveaux pipelines mais cela donne plus de valeur à l’infrastructure existante. Les niveaux de dépenses et d’endettements risquent d’être élevés quel que soit le gagnant, ce qui fera de la pression sur le billet vert et soutiendra l’or et d’autres matières premières de même que les secteurs des infrastructures et de la construction. Peu importe qui l’emporte, les plus grands bénéficiaires au cours du prochain mandat seront probablement les scripteurs de Saturday Night Live ! »

Ce texte fait partie du programme Gestionnaires en direct, de la CIBC. Il a été rédigé sans apport du commanditaire.

Nicholas Ritoux

Nicolas Ritoux

Nicolas Ritoux est journaliste indépendant. Il collabore à Conseiller.ca depuis 2009.