Les marchés sont au beau fixe depuis cinq ans

Par La rédaction | 19 juin 2017 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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La dernière grande crise financière est celle qui a frappé l’euro entre 2009 et 2012. Depuis, c’est le calme plat. Jean-Marc Vittori, éditorialiste au quotidien économique français Les Echos, s’inquiète toutefois de voir une crise surgir de notre angle mort.

De la fin des années 1970 à 2012, les krachs boursiers se sont succédé, de la Década perdida des années 1980 en Amérique latine jusqu’à la crise de l’euro, en passant par le krach d’octobre 1987 (Wall Street perd alors 26 % en une journée), la bulle boursière qui éclate au Japon en 1990, la bulle immobilière qui fait de même au Royaume-Uni, en Irlande et en France au début des années 1990, la crise asiatique en 1997-1998, la bulle Internet en 2000, la crise du peso en Argentine en 2001 et bien sûr la crise des subprimes en 2007 et 2008, qui culmine avec l’effondrement lamentable et coûteux de Lehman Brothers.

LEÇONS RETENUES?

Assez pour apprendre de nos erreurs, non? Pas sûr, répond l’éditorialiste. Ce dernier concède que la réglementation financière a été resserrée depuis la dernière grande frayeur, que des instances comme le Conseil de la stabilité financière du G20 ont été créées, que l’on connaît mieux certaines zones d’ombre du système financier et que les banques doivent avoir plus d’argent en réserve et réussir de fréquents tests de résistance.

Mais le problème se cache peut-être ailleurs. Ces changements visent à empêcher que ne survienne une crise similaire à la précédente, mais n’assure pas de prévenir la prochaine, laquelle pourrait être de nature fort différente. Les banques centrales ont aussi arrosé les marchés d’argent depuis quelques années, ce qui masque des faiblesses et crée des déséquilibres.

Surtout, s’inquiète l’éditorialiste, l’endettement est à son comble. Or, les crise viennent souvent de là. Selon la Banque des règlements internationaux (BRI), l’endettement public et privé dans 44 pays, dont tous les grands pays développés, atteint 160 000 milliards de dollars américains (211 646 $ CA). Et c’est sans compter ce que les institutions financières se doivent entre elles : 235 % du PIB, alors que l’endettement ne dépassait pas 200 % du PIB avant la chute de Lehman Brothers. Or, la productivité n’atteint pas un rythme permettant de créer les richesses pour honorer ces dettes.

AVEUGLEMENT (IN)VOLONTAIRE

Ne pas regarder ce type de réalité en face ou en sous-estimer le risque, c’est justement ce qui nous a souvent conduit dans le mur. La crise des subprimes provient, par exemple, de la confiance excessive dans les produits notés AAA, qui « ne peuvent pas faire faillite ». La crise de la zone euro a été en partie produite par l’idée qu’un pays avancé ne peut pas faire défaut. Pourtant, le défaut de paiement de l’Argentine suivait de quelques années une déclaration de Walter Wriston, alors patron de la banque américaine Citibank, soutenant que « les pays ne font pas faillite ». Une leçon à retenir.

« Chaque crise a été permise par une incompréhension collective qui a créé un angle mort sur le risque », rappelait Jaime Caruana, directeur général de la BRI, lors d’un discours prononcé en février dernier. Les experts cherchent activement la source de la prochaine crise, mais pourraient bien être aveuglés par leur propre incapacité à voir la réalité pour ce qu’elle est.

La rédaction