Les profits avant les clients chez Desjardins?

Par La rédaction | 5 février 2018 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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L’ancien président du Mouvement Desjardins, Claude Béland, lance une autre flèche à destination de son ancienne institution. Il soutient que le mandat social des caisses populaires passe désormais deuxième, derrière les profits, rapporte Radio-Canada.

C’est l’annonce récente des fermetures de certains points de service et de guichets automatiques dans les villages du Kamouraska et de la Matanie qui a provoqué ce nouvel accès de dépit de l’ancien dirigeant.

Dès le 5 mars, six centres de services seront fermés au Kamouraska. Il n’y aura plus aucun point de service dans les villages le long de la 132 entre La Pocatière et Rivière-du-Loup, une distance de 70 kilomètres. Par ailleurs, trois points de service fermeront aussi en Matanie.

FINIE LA COOPÉRATIVE?

Pour Claude Béland, c’est un signe de plus que le service à la clientèle passe désormais derrière les changements imposés par la mondialisation et les nouvelles technologies. Ces fermetures évoquent aussi, toujours selon lui, le rôle prépondérant de la Fédération, dont il juge les gens « souvent très directifs », par rapport aux membres des assemblées locales. Ces dernières décideraient de peu de choses, en raison des pouvoirs que la Fédération s’est arrogé au fil du temps. La participation citoyenne à ces assemblées s’est aussi étiolée.

En d’autres termes, Desjardins perdrait son originalité coopérative pour devenir une banque comme les autres. Ce n’est pas la première fois que Claude Béland fait ce reproche au Mouvement. En mai 2015, il confiait déjà ne plus reconnaître cette institution, soutenant même dans le Journal de Montréal qu’elle avait « perdu son âme ».

Il revenait à la charge en mars 2016, à Radio-Canada, dans la foulée du départ de Monique Leroux, affirmant que les caisses populaires étaient désormais « faites pour les riches », que Desjardins n’était plus un mouvement, qu’il ne jouait plus de rôle social et politique et que les caisses populaires ne seraient bientôt plus que de simples succursales.

DESJARDINS RÉAGIT

Inutile de dire que les dirigeants de Desjardins ne sont pas du tout d’accord avec la plus récente sortie de M. Béland, pas plus qu’ils ne partagent son analyse de leur mouvement.

En ce qui concerne la fermeture prochaine de points de service dans l’est du Québec, Valérie Lamarre, conseillère principale, relations publiques au Mouvement Desjardins, soutient que les caisses évoluent en fonction des habitudes de consommation de ses membres. Ces derniers seraient de plus en plus tournés vers le paiement direct et mobile, les services en ligne et téléphoniques, les virements Interac (désormais gratuits chez Desjardins) et le dépôt mobile.

« Il est possible d’effectuer la plupart des transactions courantes 24 heures sur 24, sept jours sur sept, dit-elle. Désormais, plus de 9 transactions sur 10 se font ailleurs qu’au comptoir. Quand on a besoin d’argent comptant, il est possible de faire des retraits avec achats dans plusieurs commerces. »

Cela expliquerait que certaines caisses en viennent à la décision de retirer un point de service ou un guichet qui n’est plus suffisamment utilisé par les membres. Une décision « très difficile pour les dirigeants de caisses, qui doivent tenir compte des besoins de l’ensemble de leurs membres », ajoute-t-elle.

Elle rappelle que Desjardins demeure l’institution financière la plus présente dans toutes les régions du Québec. Présentement, 30 % des points de service de Desjardins sont situés dans des zones de moins de 2 000 habitants alors que pour les banques, c’est moins de 2 %, selon Valérie Lamarre.

UN RÔLE SOCIAL

Par ailleurs, cette dernière ajoute que les caisses soutiennent des milliers d’organismes locaux et de projets porteurs dans toutes les communautés. Elles y ont investi plus de 82 millions de dollars en 2017.

Desjardins tente aussi d’accompagner les membres qui trouvent ces changements complexes dans des opérations comme l’automatisation des dépôts de chèques gouvernementaux ou des paiements de facture, en plus d’offrir de la formation pour bien utiliser AccèsD, que ce soit par téléphone, par Internet et sur mobile.

Reste à voir si les membres qui sont déçus de voir leur guichet ou parfois même leur caisse disparaître trouveront ces mesures suffisantes. Quant à Claude Béland, parions qu’il n’a pas dit son dernier mot sur le sujet…

La rédaction