L’inflation inquiète peu les banques centrales

Par Avery Shenfeld | 31 août 2021 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
3 minutes de lecture
Photo : Andriy Popov / 123RF

L’humeur est à l’optimisme et au maintien de taux d’intérêt bas, croit Avery Shenfeld, économiste en chef, Marché de capitaux CIBC.

Cliquez ici pour entendre l’entrevue complète en baladodiffusion sur Gestionnaires en direct, de la CIBC

« L’inflation inquiète les investisseurs, surtout aux États-Unis où les indicateurs ont grimpé davantage qu’au Canada, mais les banques centrales sont arrivées à la conclusion, de leur côté de la frontière comme du nôtre, que ce phénomène est temporaire et qu’elles peuvent se permettre de garder des taux d’intérêt près du zéro en attendant que la relance économique arrive à maturité », rapporte Avery Shenfeld.

L’expert reconnaît que certains prix à la consommation ont beaucoup augmenté. Des goulots d’étranglement ralentissent tant la production que l’expédition des biens, ce qui donne lieu à un déséquilibre de l’offre et de la demande. Les consommateurs veulent acheter, mais les producteurs n’arrivent pas à livrer. C’est cela qui explique l’inflation actuelle dans le secteur de l’automobile, des autos usagées, et d’autres catégories de biens qui subissent des pénuries. L’effet pourrait persister encore plusieurs mois, mais il entrevoit qu’il se dissipera d’ici le début de l’année prochaine.

« Cela dit, je ne crois pas que l’inflation est complètement sortie de l’esprit des gouverneurs des banques centrales, car si on se projette en 2022, lorsque la relance de l’économie sera plus avancée, on assistera peut-être au retour des pressions cycliques normales sur l’inflation. Cela pourrait se produire aux États-Unis avant le Canada, car leur politique fiscale a davantage alimenté les comptes bancaires et les portefeuilles des consommateurs. Leur pouvoir d’achat élevé pourrait faire monter les prix; en outre, les États-Unis atteindront avant le Canada une situation de plein emploi qui pousse les salaires à la hausse », pense Avery Shenfeld.

Tout cela pour dire que si l’inflation devrait être plus bénigne en 2022 qu’actuellement, les banques centrales ne pourront rester immobiles pendant très longtemps.

« Au Canada, les marchés financiers se sont déjà préparés à un tel scénario, car la Banque du Canada a indiqué qu’elle ne pouvait s’engager à des taux inchangés que jusqu’à mi 2022. Et nous croyons qu’elle les augmentera d’un quart de point après cela. Aux États-Unis en revanche, les marchés n’ont pas la même attitude, car la Réserve fédérale (Fed) table sur un retour à 2 % de l’inflation de base en 2022. Nous trouvons cette prévision trop optimiste », commente Avery Shenfeld.

L’économiste prévoit plutôt une inflation de base de 2,5 à 3 % en 2022 chez nos voisins du Sud. La Fed pourrait ainsi être amenée à augmenter ses taux d’un demi-point vers la fin de 2022. Or, les marchés financiers américains n’anticipent pas cela pour le moment.

« Nous entrevoyons une hausse des rendements obligataires en Amérique du Nord en conséquence d’une inflation de base persistante aux États-Unis. Ce n’est pas vraiment un problème pour les marchés d’actions, car les taux demeureront bas d’un point de vue historique; et les signes de l’inflation sont les mêmes qui pointent vers la reprise économique et la forte demande sur lesquelles comptent les marchés d’actions pour alimenter les résultats financiers des entreprises l’année prochaine », conclut Avery Shenfeld.

Ce texte fait partie du programme Gestionnaires en direct, de la CIBC. Il a été rédigé sans apport du commanditaire.

Un escalier fait en blocs, sur lesquels est dessiné le signe de pourcentage. Une flèce en bois est posée dessus indiquant le haut.

Avery Shenfeld

Avery Shenfeld est directeur général et économiste en chef à la Banque CIBC, à laquelle il s’est joint en 1993. M. Shenfeld est titulaire d’un doctorat (Ph. D.) en économie de l’université Harvard (Harvard University). Étant l’un des commentateurs les plus prisés au pays, il a constamment été classé comme l’un des meilleurs économistes à l’issue d’un sondage auprès des investisseurs boursiers institutionnels canadiens, et il a reçu de nombreux prix pour l’exactitude de ses prévisions au Canada et aux États-Unis.