L’inquiétude persiste pour les pays émergents

Par Marie-Andrée Gosselin | 14 avril 2014 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Cela fait plus d’un an que les pays émergents sèment l’inquiétude sur les marchés mondiaux. Le changement de politique de la Réserve fédérale américaine, la crainte d’une réduction des flux de capitaux et d’un resserrement monétaire mondial et les difficultés que connaît la Chine alimentent la crainte des investisseurs.

L’agitation des épargnants atteint des sommets puisque ces facteurs sont combinés aux faiblesses structurelles de plusieurs pays, remarque Hendrix Vachon, économiste chez Desjardins.

Attention aux « cinq faiblards »

L’exemple des « cinq faiblards » (Brésil, Inde, Indonésie, Turquie et Afrique du Sud) est frappant : le ralentissement de leur croissance économique et la détérioration de leur solde du compte courant révèlent leur grande dépendance aux capitaux étrangers. La fuite des investisseurs « serait très dommageable pour ces pays qui, faute de financement, devraient revoir à la baisse leur consommation, leur investissement ou leurs dépenses publiques », croit M. Vachon.

L’économiste pointe également dans la direction du surinvestissement, une faiblesse majeure pour un État. Des données récentes montrent que la Chine connaît un taux d’investissement moyen de presque 50 % du PIB, alors que l’Indonésie, l’Inde, l’Iran et le Vietnam avoisinent les 35 %. Pour ces pays qui comptent trop sur les capitaux étrangers, il y a un risque de bulles spéculatives ou d’une baisse de rentabilité des entreprises.

D’autres déficiences structurelles font craindre pour les pays émergents, comme le mauvais état des finances publiques de certains pays d’Europe de l’Est, ou encore de l’Égypte, du Pakistan et du Venezuela.

L’endettement du secteur privé ne doit pas non plus être pris à la légère, rappelle l’économiste, car il peut aussi augmenter le risque de difficultés financières. La Chine, par exemple, a un taux record d’endettement du secteur privé (excluant le secteur financier), qui dépasse 180 % de son PIB.

Enfin, l’inflation élevée dans plusieurs pays, dont les « cinq faiblards », « limite grandement la capacité d’intervention des banques centrales pour stimuler l’économie », note l’économiste de Desjardins. En tentant de régler ce problème, le pays se retrouve vite pris avec un dilemme et doit souvent choisir entre la croissance ou l’inflation. Une croissance faible fera fuir les investisseurs, tandis qu’une inflation non maîtrisée augmentera le risque de crise économique.

Pas de panique!

Hendrix Vachon rappelle toutefois qu’un constat trop pessimiste serait prématuré. Malgré leurs faiblesses, la plupart des États ont des réserves de change qui leur permettent de compenser en cas de retrait des capitaux étrangers, sans avoir besoin de recourir à des hausses de taux d’intérêt.

La reprise économique et la demande mondiale se solidifiant de plus en plus, l’économiste croit par ailleurs qu’il y aura un effet d’entraînement sur les économies émergentes. Le risque pour ces dernières devrait donc diminuer, tout comme les inquiétudes des investisseurs.

« Même si l’inquiétude persistera encore un certain temps, plusieurs éléments favorables réduisent toutefois le risque d’une crise financière d’envergure causée par une fuite des capitaux », conclut M. Vachon.

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Marie-Andrée Gosselin