L’UE dresse une liste noire de 17 paradis fiscaux

Par La rédaction | 6 Décembre 2017 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Les ministres des Finances des 28 pays membres de l’Union européenne (UE) ont adopté mardi une liste noire de 17 paradis fiscaux situés hors de leurs frontières, rapporte l’Agence France-Presse.

Cette liste est un peu plus fournie que ce à quoi s’attendaient les observateurs ces derniers jours. Elle comprend : Bahreïn, la Barbade, la Corée du Sud, les Émirats arabes unis, Grenade, Guam, les Îles Marshall, Macao, la Mongolie, la Namibie, les Palaos, Panama, Samoa, les Samoa américaines, Sainte-Lucie, Trinidad-et-Tobago et la Tunisie.

Le nom des pays blacklistés a fait l’objet de longues négociations entre les différents États membres, qui devaient, aux termes des règles européennes sur les questions fiscales, s’entendre à l’unanimité, précise l’AFP.

UNE SECONDE « LISTE GRISE » DE 47 PAYS

Les ministres des Finances de l’UE se sont par ailleurs mis d’accord pour établir une « liste grise » de 47 pays ayant promis d’améliorer leurs pratiques en matière fiscale et qui feront l’objet d’un suivi régulier. C’est par exemple le cas du Maroc et du Cap-Vert, qui auraient pu se retrouver sur la liste noire mais qui, après discussions de dernière minute, se sont finalement retrouvés sur la deuxième liste. Celle-ci comprend notamment la Suisse, la Nouvelle-Calédonie, les petites îles placées sous juridiction britannique (Guernesey, Jersey et Man), Andorre et le Liechtenstein.

La liste noire publiée mardi est nettement plus étoffée que celle établie l’été dernier par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), qui comportait un seul pays, soit Trinidad-et-Tobago. Mais elle est cependant plus réduite que celle diffusée la semaine dernière par l’organisation Oxfam, qui recensait 35 États ou territoires servant de paradis fiscaux. Les 47 États qui ont décidé d’améliorer leur pratique ont jusqu’à la fin de l’année prochaine pour le faire dans le cas des pays industrialisés, et jusqu’à la fin de 2019 dans celui des pays en voie de développement, précise l’AFP. La situation particulière des huit pays affectés par les ouragans en septembre dans les Caraïbes sera quant à elle réévaluée en février.

Pour établir leurs listes, les 28 pays membres de l’UE ont passé en revue quelque 92 juridictions (États et territoires) susceptibles de poser problème sur la base de trois critères : la transparence fiscale (pratiquent-elles ou non l’échange automatique d’informations?), l’équité fiscale (appliquent-elles ou pas, par exemple, des mesures fiscales préférentielles dommageables?) et la discipline internationale (mettent-elles en œuvre ou pas les mesures de l’OCDE contre l’optimisation fiscale abusive?)

« S’IL N’Y A PAS DE SANCTIONS, C’EST INEFFICACE »

Même s’il s’agit d’une première pour l’Union, plusieurs observateurs et la totalité des ONG impliquées dans les questions d’évasion fiscale jugent cependant que ces listes risquent de ne pas être efficaces, puisque le fait d’y figurer ne sera pas assorti de sanctions suffisamment dissuasives. « Cette liste est une occasion manquée. Pour être efficace, elle doit surtout être accompagnée de sanctions. Il est incompréhensible que cela ne soit pas le cas », a par exemple estimé l’eurodéputée écologiste Éva Joly.

De son côté, le porte-parole de l’association Attac, l’économiste Dominique Plihon, a dénoncé sur franceinfo « une parodie » et « une diversion » : « Cette liste frise le scandale, parce que les paradis fiscaux avérés que sont le Luxembourg, l’Irlande et les Pays-Bas n’y figurent pas. Mais en plus, trois pays qui avaient été épinglés récemment par les Paradise Papers, Jersey, l’île de Man et l’île Maurice, n’y figurent pas non plus. À chaque fois que des listes sont publiées on fait beaucoup d’esbroufe, mais on voit bien que les scandales récents n’ont absolument rien changé. »

Apparemment conscient du problème, le commissaire européen aux Affaires économiques, Pierre Moscovici, a appelé les États membres « à définir des sanctions nationales dissuasives rapidement ». Mais pour l’instant, souligne l’AFP, seul le gel de fonds européens est prévu pour « punir » les pays récalcitrants.

Le Panama se défend d’être un paradis fiscal

Le président du Panama, Juan Carlos Varela, a dénoncé mardi la décision de l’Union européenne d’inclure le pays dans sa liste noire des paradis fiscaux, rapporte l’agence de presse belge Belga.

En guise de protestation, le gouvernement panaméen a rappelé son ambassadeur à Bruxelles pour consultations. « Le Panama n’est en aucun cas un paradis fiscal », a assuré le chef d’État, qui a évoqué « une décision malheureuse (…) et injuste ». Selon lui, le Panama a effectué un « grand travail » et « pris des mesures importantes » pour ne plus apparaître dans ce type de liste.

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