PL 141 : l’APCSF ne lâche pas le morceau

Par Pierre-Luc Trudel | 18 mai 2018 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Alors que l’examen du projet de loi 141 par la Commission des finances publiques avance à pas de tortue, l’Association professionnelle des conseillers en services financiers (APCSF) a toujours espoir d’empêcher son adoption par l’Assemblée nationale. Lors de son Ralliement annuel, qui s’est tenu jeudi à Laval, l’organisme a lancé un énième appel à la mobilisation des conseillers.

« Il n’y a eu, jusqu’à maintenant, aucune démonstration que le projet de loi 141 allait améliorer les choses pour les consommateurs et les professionnels du conseil financier. Pourquoi veut-on briser l’équilibre actuel d’encadrement? » demande Alain Paquet, économiste et ancien ministre délégué aux Finances sous le gouvernement libéral de Jean Charest.

Invité par l’APCSF à se prononcer sur le projet de loi, il a affirmé que l’adoption de ce dernier constituerait un recul « de 30 ans en arrière » en matière de réglementation du secteur financier.

« L’argument des institutions financières, c’est : « Faites-nous confiance, ça va aller mieux après,. Il faut arrêter de faire peur aux gens ». Or, les excellents mémoires produits par les associations de consommateurs ont soulevé de nombreuses questions et préoccupations. Je n’ai entendu aucune réponse du ministre Leitao à celles-ci. »

LE GOUVERNEMENT A CHOISI SON CAMP

Craignant la disparition du conseil au profit de la vente en ligne et sans représentant, Alain Paquet affirme que le gouvernement a pris le parti des institutions financières plutôt que de jouer son rôle d’arbitre. « Un ministre responsable doit entendre tout le monde et faire la part des choses. Mais en ce moment, il n’écoute que l’industrie. Les consommateurs et les professionnels du conseil sont ignorés. »

L’aspect du projet de loi qui préoccupe le plus l’ancien ministre libéral est la disparition de l’exclusivité du conseil financier par des professionnels. « Cela se traduira nécessairement par un affaiblissement de la position des conseillers et un renforcement de la force de vente des institutions financières », déplore M. Paquet, qui a d’ailleurs cosigné une lettre d’opinion dans Le Devoir en février dernier pour s’opposer au projet de loi 141.

Les règles entourant la vente d’assurance sur Internet, quant à elles, demeurent toujours un mystère. « Je peux comprendre que les détails entourant certains aspects particuliers d’un projet de loi soient dévoilés ultérieurement, mais on n’a même pas un début d’indication du cadre général de réglementation », s’inquiète M. Paquet.

Concernant l’abolition de la Chambre de la sécurité financière et de la Chambre de l’assurance de dommages, Alain Paquet insiste sur le fait qu’aucun chiffre n’a été publié pour démontrer qu’une fusion avec l’AMF allait coûter moins cher. « J’ai rarement vu des fusions, peu importe le domaine, qui ont permis de générer des économies », dit-il.

« Si ce projet de loi est adopté, on assistera à un déséquilibre conséquent dans l’encadrement du secteur financier au Québec. Et bonne chance pour revenir en arrière après. »

UNE PROFESSION FRAGMENTÉE

Toujours frustré d’être mis de côté dans les débats entourant le projet de loi 141, l’APCSF implore une nouvelle fois ses membres et l’ensemble des conseillers en services financiers du Québec de se lever pour défendre leurs intérêts. L’organisme se dit toutefois conscient de la difficulté de mobiliser l’industrie.

« Nous sommes une profession fragmentée. Les questions politiques ne font pas vraiment partie de notre quotidien, indique Bertrand Larocque, trésorier de l’APCSF. Nous avons énormément de difficulté à nous unir. »

En février dernier, l’association a lancé une pétition pour demander à Québec de réviser tous les aspects du projet de loi 141 qui touchent la distribution des produits financiers. Au total, celle-ci a récolté environ 6 000 signatures, dont 5 500 par des conseillers.

« Pourquoi n’avons-nous pas réussi à en recueillir des dizaines de milliers? demande M. Larocque. Imaginez ce qui pourrait arriver si dans chacune des 125 circonscriptions du Québec, deux ou trois conseillers allaient dans le bureau de leur député pour manifester leur opposition au projet de loi. Il est grand temps de réaliser la force politique de notre association. Soyons actifs lors de la prochaine campagne électorale. »

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Pierre-Luc Trudel