Plaintes : mieux vaut prévenir que guérir

21 Décembre 2011 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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N’importe quel de vos clients sera mécontent s’il perd de l’argent. Cependant, certains placements sont intrinsèquement risqués et doivent être pris avec des pincettes, peu importe le caractère du client.

L’effet de levier, les fonds communs facturant le rachat des parts, et les abris fiscaux doivent tous être abordés avec prudence.

Même l’achat d’actions d’entreprises à petite ou moyenne capitalisation peut être risqué. Si les choses vont mal pour la société, les clients vont sûrement vous poser plusieurs questions. Et si tous les documents n’ont pas été faits correctement, ils risquent de se plaindre.

« Chaque fois qu’on vous demande de participer à un investissement que vous trouvez trop risqué, vous courez un risque », explique Joseph Groia, un avocat en droit des valeurs mobilières.

Vous avez donc deux choix : • de dire au client de faire affaire avec une firme de courtage à commission réduite; • de procéder à la transaction, tout en faisant signer à votre client un document où il est écrit noir sur blanc que vous n’approuvez pas la transaction.

Il faut cependant être prudent si l’on choisit la deuxième option. M. Groia raconte l’histoire d’un conseiller, dont le service du contrôle de l’application des règlements de la firme pour laquelle il travaillait a fait signer à une cliente âgée un document qui déresponsabilisait la firme de tout investissement inapproprié. Il n’a pas été difficile pour l’avocat torontois de défendre la cliente.

« La firme avait profité de sa vulnérabilité non pas une, mais deux fois. Ils lui ont fait faire des investissements risqués, puis lui ont fait signer une décharge alors qu’ils auraient dû la protéger. »

Si vous doutez, la meilleure chose à faire est de dire à votre client qu’il est important pour vous, que vous aimez faire affaire avec lui et que pour ces raisons, vous ne voulez pas faire la transaction.

Les étapes à suivre Intégrez quelques étapes à votre routine pourrait vous permettre de vous protéger d’éventuelles poursuites.

« Ayez des conversations régulières avec vos clients et commencez vos rencontres s’il y a quelque chose de nouveau, un peu comme le ferait un docteur », conseille Julie-Martine Loranger, une associée au bureau montréalais de Gowlings. Il faut toujours revoir les objectifs d’investissement, surtout avant une transaction importante qui viendrait modifier ces buts.

Ensuite, comparez, avec le client, les anciens et les nouveaux objectifs. Expliquez-lui les conséquences de ces nouvelles décisions.

La clarté est la clé de cette stratégie. « Il faut expliquer le risque afin que le client comprenne bien. Ne lui dites pas des choses comme “Cette action n’est pas vraiment liquide”. Ils ne comprendront pas ce que vous êtes en train de leur dire », dit Mme Loranger.

Il ne faut jamais tenir pour acquis qu’on sait quel est le seuil de tolérance au risque du client. « Ce n’est pas parce que votre client est une femme d’affaires prospère qu’elle comprend ce qu’est un investissement », ajoute-t-elle.

Tant Mme Loranger que M. Groia soulignent l’importance de travailler avec le directeur de la firme et le chef de la conformité. Ils sont des personnes-ressources et il faut en profiter.

Si votre firme lance un produit sur le marché, c’est sa responsabilité de s’assurer que c’est un investissement responsable et que vous pouvez le vendre sans inquiétude, ajoute M. Groia.

Les conséquences Qu’arrive-t-il si vous avez tout fait ce qu’il fallait et que votre client porte quand même plainte?

« La moitié, voire même les trois quarts du temps, on dit aux clients que le dossier n’est pas assez solide pour poursuivre, explique M. Groia. Lors de la dernière crise, des gens sont venus me consulter parce qu’il avait perdu 40 % de leur portefeuille, tous composés d’actions de premier ordre. C’est certain que je ne vais pas convaincre un juge qu’un portefeuille composé d’actions des cinq grandes banques n’est pas un investissement sûr. »

Même si la plainte du client ne se rend pas en cour, il peut y avoir des conséquences. Les plaintes de clients passent en premier par les firmes, et ces dernières ne veulent pas que la plainte aille plus loin.

Le problème est qu’après une entente, le conseiller a une dette envers sa firme. Ils peuvent offrir 30 000 $ au client, ne pas publiciser la chose, mais c’est quand même le conseiller qui doit payer la facture. Comme il n’y a aucun recours pour le conseiller contre sa firme, le montant du règlement devient le prix à payer pour continuer à faire des affaires.

Par les temps qui courent, il vaut mieux être toujours à l’affût. Un client qui vous semble trop beau pour être vrai? C’est qu’il l’est sûrement. Un échange vous semble intéressant, quoique risqué? Il serait mieux de s’abstenir, peu importe la commission à la clé.

Cinq façons de ne pas se faire poursuivre 1. Reconnaître le genre de clients qui risquent de se plaindre. 2. Se tenir loin des produits et investissements risqués, sauf si vous les comprenez très bien. 3. Être certain que vos clients comprennent bien les conséquences de tout changement à leur portefeuille. 4. Maintenir tous vos documents à jour. 5. Si vous doutez, consultez le directeur de votre firme ou le chef de la conformité.

Ce texte est une adaptation d’un texte paru sur le site Advisor.ca. Traduction par Anaïs Chabot.