Pour survivre, les banques devront investir dans le numérique

Par La rédaction | 17 octobre 2018 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Photo : Rancz Andrei 123RF

Les banques, les fintechs et les grandes sociétés du secteur des technologies numériques attirent de plus en plus de clients, tandis que les opérateurs historiques peinent à effectuer les investissements nécessaires à leur développement, selon Accenture.

Dans deux études publiées mercredi, la firme de conseil constate en effet que les nouveaux acteurs sur le marché de la finance internationale, y compris les banques, les établissements de paiement non bancaires et les grandes entreprises de technologie, accumulent jusqu’à un tiers des nouveaux revenus, « ce qui met en péril la compétitivité des institutions financières traditionnelles ».

Intitulés Beyond North Star Gazing et Star Shifting: Rapid Evolution Required, ces deux rapports évaluent respectivement le niveau de perturbation dans le domaine bancaire ainsi que la manière dont les banques peuvent agir pour profiter de l’évolution en cours afin de conserver leurs clientèles et d’assurer la croissance future de leurs revenus.

« TROUVER UN JUSTE ÉQUILIBRE »

Après avoir passé en revue plus de 20 000 établissements bancaires et de paiement dans sept marchés mondiaux différents (Australie, Brésil, Canada, Chine, Europe et Royaume-Uni et États-Unis) afin d’évaluer l’importance des changements qui affectent le secteur, Accenture relève que le nombre d’institutions bancaires et de paiement a ainsi diminué de près de 20 % en l’espace de 12 ans, passant de 24 000 entités en 2005 à moins de 19 300 en 2017. La firme précise toutefois qu’environ 17 % d’entre elles sont des nouvelles venues sur le marché, c’est-à-dire qu’elles ont été créées après 2005.

« La plupart des banques ont du mal à trouver un juste équilibre entre leurs investissements dans les secteurs traditionnels et ceux qu’elles effectuent dans le domaine du numérique. En effet, elles doivent à la fois répondre aux besoins des consommateurs qui veulent pouvoir utiliser les nouvelles technologies tout en préservant les structures existantes qui protègent les données de leur clientèle », commente Alan McIntyre.

Le directeur général d’Accenture et responsable de sa division mondiale Pratique bancaire estime cependant que les institutions financières ne peuvent pas se contenter d’« activer numériquement leurs activités » et s’attendre à réussir par ce seul moyen. « Jusqu’à présent, une approche trop conservatrice de l’investissement dans le numérique a empêché les banques de créer de nouvelles sources de croissance, ce qui est essentiel pour éviter le resserrement de la concurrence, la multiplication des cyberattaques et la détérioration des rendements », souligne le dirigeant. Faute d’investir massivement pour développer de nouvelles innovations, Accenture prévoit que le transfert de revenus vers les nouveaux acteurs du secteur se poursuivra et commencera même à avoir « un impact [important] sur les bénéfices des banques en place ».

LE CANADA EST PEU PERTURBÉ

Accenture note aussi que 19 % des établissements financiers aux États-Unis sont des nouveaux venus sur le marché et qu’ils ont généré 3,5 % du total des revenus tirés des services bancaires et de paiements. Au cours des 12 dernières années, la firme soutient que le nombre d’institutions financières chez nos voisins du Sud a par ailleurs diminué de près d’un quart, « en grande partie à cause de la crise financière de 2008 et des obstacles réglementaires imposés dans la foulée pour obtenir une licence bancaire ». Autant de facteurs qui, selon elle, ont fait des États-Unis « un marché difficile pour les nouveaux venus » mais en même temps « un environnement stable pour les opérateurs historiques ».

Selon Accenture, plus de la moitié des nouveaux comptes courants ouverts de l’autre côté de la frontière l’ont été dans « trois grandes banques qui investissent de manière [marquée] dans le numérique », tandis que les banques régionales, qui se concentrent plutôt sur la réduction de leurs coûts, restent à la traîne et peinent à assainir leurs bilans.

En ce qui concerne le Canada, la firme de conseil juge que « les investisseurs ont soutenu les nouveaux acteurs du marché qui avaient pour objectif de perturber le secteur bancaire ». Toutefois, ajoute-t-elle, alors que près de la moitié (47 %) des établissements bancaires et de paiement d’un océan à l’autre sont des nouveaux venus, ils n’ont jusqu’à présent réussi à accaparer qu’à peine 2 % du total des revenus tirés des services bancaires et de paiements, faisant du pays « l’un des marchés bancaires les moins perturbés dans le monde ». Enfin, en Europe, incluant le Royaume-Uni, 20 % des établissements bancaires et des établissements de paiement sont de nouveaux acteurs, et ils sont parvenus à attirer près de 7 % du total des revenus bancaires ainsi qu’un tiers (33 %) de tous les nouveaux revenus générés depuis 2005.

« CHANGEMENT RADICAL »

« Dix ans après la crise financière, le secteur bancaire connaît un niveau de concurrence et de perturbation bien supérieur à ce qu’il était auparavant. Avec l’arrivée sur le marché de nouveaux venus qui menacent de réduire la compétitivité des banques traditionnelles, les acteurs en place ne peuvent plus se reposer sur leurs lauriers. Les banques doivent se mobiliser pour tirer parti des mutations du secteur, notamment en ayant recours aux technologies numériques, afin de renforcer leur attractivité auprès de leurs clients et recommencer à accroître leurs revenus », estime Julian Skan, directeur général d’Accenture et chef de file mondial du secteur bancaire pour Accenture Strategy.

« Alors que le secteur bancaire connaît un changement radical sous l’effet conjugué de la réglementation, de l’arrivée de nouveaux acteurs et des exigences de plus en plus grandes des consommateurs, les banques vont absolument devoir réévaluer leurs actifs, leurs atouts et leurs capacités afin de déterminer si elles évoluent dans la bonne direction. L’avenir appartient aux établissements qui sauront créer de nouvelles sources de croissance, notamment en trouvant des opportunités au-delà des services financiers traditionnels. Cependant, il n’y a pas de réponse unique et chaque banque devra bien connaître le créneau sur lequel elle opère avant de se lancer dans l’aventure », conclut Alan McIntyre.

La rédaction