Recruter et fidéliser les meilleurs employés : Un enjeu de compétitivité

Par André Giroux | 1 juin 2010 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Depuis le lancement de Conseiller il y a dix ans, le nombre d’emplois a bondi de plus 20 % dans le domaine de la finance et des assurances. On en comptait 117 659 en 2000 et 141 700 en 2008, selon les plus récentes données de l’Institut de la statistique du Québec. Dans le domaine spécifique du placement financier, l’emploi a augmenté de 62 % en dix ans, passant de 6 800 au début 2000 à 11 100 en janvier 2010. Quant à l’avenir, retraite des baby-boomers oblige, l’enjeu du recrutement et de la rétention de la main-d’œuvre marquera certainement les dix prochaines années.

« Malgré la crise financière, la Banque Laurentienne a continué de recruter au cours des deux dernières années », note Denise Brisebois, première vice-présidente aux ressources humaines de l’institution financière.

À l’image du secteur, l’entreprise continuera d’embaucher du personnel en 2010. Selon un sondage réalisé pour le compte de Robert Half International (Canada), 18 % des cadres affirment leur intention d’accroître le nombre d’employés professionnels à temps plein au second trimestre de 2010, contre seulement 3 % qui prévoient une diminution. Le secteur de la finance, de l’assurance et de l’immobilier se démarque, puisque la prévision d’embauche atteint presque le double : 33 %. Aucune entreprise sondée ne prévoit une diminution.

« Les secteurs des services financiers et de l’immobilier montrent des signes encourageants de croissance soutenue et devront recruter du personnel, notamment des professionnels de la comptabilité, des technologies de l’information et du marketing afin de gérer le regain d’activité, mentionne Kathryn Bolt, présidente des activités canadiennes de Robert Half International. Les directeurs de la conformité et les spécialistes des communications financières sont particulièrement recherchés, les entreprises voulant s’assurer de respecter les nouvelles réglementations gouvernementales. »

L’enjeu du recrutement, mais aussi de la rétention de la main-d’œuvre, prend tout son relief lorsqu’on sait que« près de la moitié des répondants (48 %) estiment que le recrutement de professionnels compétents est ardu », ajoute la firme Robert Half.

« Nous cherchons particulièrement des conseillers en services financiers possédant un bon portefeuille de clients, dans le domaine de l’investissement ou du crédit », précise la vice-présidente aux ressources humaines de la Banque Laurentienne, qui prévoit aussi augmenter le nombre de planificateurs financiers.

Les jeunes recrues pourront aussi y trouver leur place, prévisions de départs à la retraite oblige. « Nous avons besoin d’eux, précise Denise Brisebois. Nous sommes prêts à les former et à les associer à des conseillers plus expérimentés. »

Fini le temps où les responsables des ressources humaines attendaient les curriculums. « Nous devons maintenant aller vers les gens », reconnaît Mme Brisebois. Organisation de journées portes ouvertes, présence aux salons et foires de l’emploi, présence sur Internet et recours au recrutement spécialisé font partie du coffre à outils de la banque. « Nous sentons la pénurie depuis quatre ou cinq ans », confirme Martine Roméo, vice-présidente aux ressources humaines à Optimum Général. L’image du domaine des assurances est à revoir, opine-t-elle. « Ce milieu, associé au conservatisme, attire peu les jeunes. Or, il est beaucoup plus intéressant qu’il n’y paraît. Nous devons mieux le faire connaître. C’est notamment le rôle que joue l’Observatoire de l’évolution des métiers de l’assurance. »

Optimum recherche deux types de profils : d’une part, les actuaires et les souscripteurs; d’autre part, aviseurs techniques et experts. « Nous misons sur notre convivialité et sur l’accessibilité de la direction au sein d’une entreprise québécoise dont le siège social est encore au Québec », affirme la vice-présidente d’Optimum Général.

Président de Jarislowsky Fraser, Stephen Jarislowsky ne constate pas de difficulté de recrutement dans son entreprise. « Nous recrutons surtout grâce à notre réseautage, affirme-t-il. Notre personnel compte de deux à trente années d’ancienneté chez nous. » L’entreprise ne dédaigne pas la jeunesse et reçoit avec intérêt les curriculums vitæ. Depuis deux ans, l’entreprise souhaite surtout embaucher des recherchistes. « Nous voulons des gens imaginatifs, possédant un esprit d’investigation, une bonne connaissance des grandes entreprises et de la comptabilité, jouissant d’un bon sens de l’analyse et d’une culture d’entreprise. Nous recherchons aussi des gens possédant un bon sens commun, ce qui est très rare », affirme le spécialiste. Questionné sur la définition du bon sens, il répond énigmatiquement par une analogie : « Georges W. Bush n’en avait aucun et il a été élu deux fois; Harry Truman fut l’un des meilleurs présidents des États-Unis en travaillant à la reconstruction de l’Europe après la Seconde guerre mondiale, limitant ainsi l’expansion du communisme. »

Recruter, mais aussi retenir

« Dans toute entreprise, convient Mme Brisebois, les deux années suivant l’embauche constitue une période cruciale pour la rétention du personnel. L’employeur doit s’assurer de bien encadrer les nouveaux employés afin qu’ils comprennent la culture d’entreprise et les produits. La présence d’un formateur autre que le supérieur hiérarchique évite les départs. Le nouvel employé peut s’y référer au besoin. Chez nous, le mentor est un collègue de même niveau hiérarchique. Nous offrons beaucoup d’encadrement à nos conseillers. »

Cet encadrement demeure tout au long de la carrière. « Notre formation en entreprise favorise le perfectionnement de nos employés », souligne la première vice-présidente aux ressources humaines de la Banque Laurentienne. Par exemple, un conseiller au service à la clientèle souhaitant devenir conseiller en services financiers bénéficiera d’une formation rémunérée de dix jours, qui lui permettra de réussir les examens prescrits.

À la Banque Laurentienne, la rémunération est adaptée aux mandats et aux responsabilités des employés. Certains ne perçoivent qu’un salaire, tandis que d’autres sont entièrement rémunérés à commission. D’autres encore jouissent d’une rémunération mixte, composée de salaire et de commissions ou de bonis. « La rémunération tient compte de la fonction de l’employé, des objectifs fixés et de l’atteinte des critères de performance, mentionne Mme Brisebois. Tous reçoivent les mêmes avantages sociaux au plan des assurances et du fonds de retraite. »

Le télétravail pour retenir les salariés

Les conditions de travail répondent aussi au mandat de l’employé. « Le conseiller virtuel s’adresse aux clients qui veulent éviter les déplacements en succursales. Le télétravail et les heures flexibles s’adaptent bien à ce type de poste. D’autres bénéficient de postes mobiles et répondent aux clients souhaitant recevoir les conseillers à domicile. »

La Banque Laurentienne segmente sa clientèle pour les conseillers. « Ceux-ci connaissent bien le profil de leur clientèle, puisque nous nous assurons que celle-ci soit homogène. » Optimum offre quant à elle la diversité. « Nos employés bénéficient de la possibilité de toucher à tous les domaines de l’assurance », mentionne Mme Roméo.

Optimum consulte régulièrement ses employés par voie de sondage. Principal constat :« leurs besoins sont similaires à ceux de toute autre entreprise, constate Mme Roméo : connaître les objectifs de l’entreprise, ses orientations et les résultats obtenus. Nous les consultons aussi sur les améliorations à apporter aux outils informatiques pour répondre aux besoins de la clientèle et du personnel. »

Comme dans d’autres entreprises,« les transferts latéraux sont fréquents chez nous, estime M. Jarislowsky. Ainsi, une personne peut passer de la gestion de portefeuille à la recherche et vice versa. Nous apprécions la polyvalence. » Par contre, l’entreprise n’offre qu’une formation sur le tas. « Notre structure organisationnelle est très simple, ce qui nous permet une bonne évaluation du personnel. »

Techniques de séduction

En mars dernier, Accountemps a réalisé un sondage sur la fidélisation du personnel auprès de 270 chefs de la direction financière de sociétés canadiennes d’au moins 20 employés. À la question « Laquelle des mesures suivantes prenez-vous ou prévoyez-vous prendre pour fidéliser vos employés lors de la reprise économique ? », les chefs de la direction financière ont répondu : – offre de perfectionnement professionnel : 54 % – promotion aux employés les plus performants : 46 % – augmentation des salaires : 42 % – rétablissement ou augmentation des primes : 28 % – amélioration des avantages : 25 % – aucune mesure : 23 %

Directrice des activités canadiennes d’Accountemps, Dianne Hunnam-Jones, y va d’une mise en garde : « L’amélioration de la conjoncture économique multiplie les perspectives de carrière, y compris pour les employés les plus précieux d’une entreprise. Les employeurs doivent d’abord penser à la fidélisation; sinon, ils risquent de perdre leurs employés les plus performants et avec eux, leur avantage concurrentiel. »

Madame Hunnam-Jones rappelle que « l’investissement dans le perfectionnement professionnel profite aux entreprises et démontre l’intérêt de l’employeur à l’égard du cheminement de carrière des employés. La stratégie de fidélisation devrait aussi inclure des promotions et des augmentations de salaire qui confirment l’appréciation de la contribution des membres du personnel. »

Dans un autre sondage réalisé par Robert Half Management Resources, à la question « Quelle leçon la plus précieuse avez-vous avez tirée de la récession ? », les chefs de la direction financière du secteur financier ont mentionné :

– la pertinence d’accorder plus d’importance au maintien du moral des employés : 31 % – la mise en œuvre de plans de succession plus détaillés pour l’entreprise : 26 %

De fait, dans un monde en crise et sujet aux scandales, la préoccupation du moral des troupes est un facteur qui revêt de plus en plus d’importance pour la pérennité des entreprises, particulièrement en services financiers.


Techniques infaillibles pour recruter et retenir ses meilleurs employés

Au cours des prochaines années, l’exode des baby-boomers vers la retraite accentuera la pression sur les propriétaires d’entreprise. Voici sept conseils éprouvés servant à recruter et fidéliser la crème des talents.

1- Faites activement la promotion de votre entreprise et renforcez votre présence dans la collectivité. Soignez davantage votre image publique et utilisez la publicité en ligne, les salons professionnels et les foires de recrutement. Vous avez une entreprise « verte » ? Faites-le savoir aux employés potentiels !

2- Utilisez les réseaux sociaux comme LinkedIn, Facebook et Twitter pour atteindre une population plus jeune.

3- Évitez de noyer les nouvelles recrues sous un flot de présentations. Présentez-leur pluôt votre équipe de direction. Échelonnez les activités d’orientation sur plusieurs mois afin de favoriser un effet durable.

4- Faites de la formation une priorité absolue. Évaluez les compétences essentielles dont votre entreprise dispose déjà et attisez-les, surtout chez les employés les plus performants. Un employé qui entrevoit des possibilités de progression de carrière au sein de votre organisation sera plus enclin à vous être fidèle.

5- Offrez une rétroaction régulière à vos employés. Une personne qui a le sentiment de contribuer à la performance d’une entreprise sera généralement plus motivée à donner le meilleur d’elle-même.

6- Innovez en matière de rémunération et de récompenses. Encouragez les employés loyaux et productifs à rester en leur accordant des jours de vacances additionnels ou d’autres avantages. Songez à offrir des programmes de participation aux bénéfices. Récompensez les employés qui recommandent des candidats subséquemment embauchés.

7- Favorisez la conciliation travail-vie personnelle. Offrez à vos employés des conditions de travail plus souples (télétravail, congés spéciaux pour raisons familiales ou pour études, etc.). Aidez-les à composer avec le stress en offrant, par exemple, des adhésions à un gymnase et de l’argent pour organiser des activités de renforcement de l’esprit d’équipe.

Source : La Banque de développement du Canada

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André Giroux