Régimes de capitalisation : comprendre pour mieux gérer le risque

2 juillet 2010 | Dernière mise à jour le 2 juillet 2010
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Partie II de III

expert_en_ligne_desjardins Dans le premier de cette série de trois articles publié dans l’édition de juin d’Avantages (voir nos archives sur le site), nous avons revu l’essence du régime de capitalisation afin d’exposer la dichotomie qui existe entre les renseignements qui sont fournis à la plupart des participants pour les aider à planifier leur retraite et leurs objectifs en matière de revenu de retraite. Nous poursuivons notre examen de ce qui peut être fait pour que les outils d’aide à la décision concordent mieux avec les besoins des participants des régimes CD afin d’atténuer les risques assumés par les promoteurs et par les participants

Les évaluations actuarielles : une solution théorique Les participants des RC doivent pouvoir évaluer l’incidence des décisions qu’ils prennent maintenant sur leur bien-être potentiel à la retraite. Il faut donc un moyen de surveiller et de schématiser efficacement l’évolution de l’actif de chaque participant par rapport à ses objectifs en matière de remplacement du revenu à la retraite. Pour ce faire, nous pouvons nous inspirer directement des régimes à prestations déterminées (PD).

Les régimes PD et CD sont considérablement différents à certains égards, mais leur raison d’être est essentiellement la même : procurer une rente adéquate à la retraite. Dans le cas des régimes PD, on revoit périodiquement leur provisionnement afin de veiller à ce que l’actif puisse couvrir les prestations futures. S’il y a un déficit ou un excédent, des mesures sont prises en conséquence. Cette démarche consistant à comparer de manière formelle l’actif et le passif du régime, appelée évaluation actuarielle, est exigée par la loi dans le but d’assurer que les régimes PD soient suffisamment provisionnés. Comme c’est le promoteur du régime PD qui assume en majeure partie le risque et le coût du provisionnement, les résultats de l’évaluation (bons ou mauvais) sont inscrits directement dans le bilan et l’état des résultats de l’employeur.

Dans le cas des régimes CD, les rôles sont inversés. Contrairement aux régimes PD où le promoteur prend en charge le risque de l’ensemble des participants (et les obligations correspondantes), dans un RC chaque participant assume les risques associés à sa propre situation. Même si aucune obligation ne lui est directement imputée, chaque personne, qu’elle en soit consciente ou non, a un objectif implicite à atteindre en matière de revenu à la retraite. Il existe donc une ressemblance entre les régimes PD et les régimes CD, à la différence que dans les régimes PD on connaît le montant des prestations tandis que dans les régimes CD on vise un certain montant. Quoi qu’il en soit, cet important trait commun suppose que, comme pour les régimes PD dont l’actif et le passif sont comparés, l’actif que chaque individu détient dans le cadre d’un régime CD doit aussi être évalué périodiquement par rapport au revenu visé à la retraite. La seule façon de s’assurer que le provisionnement est suffisant est de le mesurer et d’agir en conséquence quand on s’éloigne de l’objectif visé. Cet exercice est particulièrement important pour les participants des RC qui versent la cotisation maximale à leur régime, car le plafond de cotisation pourrait les empêcher de verser des cotisations supplémentaires pour compenser les pertes éventuellement subies sur leurs placements. Une telle situation ne peut pas se produire dans le cadre d’un régime PD, car l’employeur est tenu d’effacer tout déficit en versant au régime les sommes nécessaires pour qu’il demeure entièrement capitalisé.

Profil de risque complet En plus d’obtenir périodiquement une idée précise du provisionnement de leur régime, les participants des RC doivent aussi mesurer adéquatement et comprendre le risque associé aux décisions qu’ils prennent pendant la période d’accumulation du capital. Ce risque doit toutefois être exprimé en fonction de l’incidence possible sur le revenu de retraite du participant et non en fonction des facteurs habituels que sont la volatilité des catégories d’actifs ou les pertes de placement. En effet, le véritable risque que le participant doit s’efforcer d’atténuer est celui d’obtenir des prestations insuffisantes à la retraite. Bien que le rendement soit l’un des éléments à prendre en considération, une retraite réussie dépend au bout du compte d’une combinaison de facteurs, soit les rendements des placements, le niveau de cotisation, la valeur marchande de l’actif, l’âge prévu de la retraite et le risque de mortalité. Un taux de cotisation inadéquat pourrait avoir des conséquences plus désastreuses sur le revenu potentiel à la rentraite qu’un mauvais choix de placements. Pour bien comprendre ce qu’implique le fait de verser des cotisations de 2 % au lieu de 6 %, d’investir dans des obligations plutôt que dans des actions ou de prendre sa retraite à 55 ans au lieu de 65 ans, il est nécessaire de quantifier et d’analyser les résultats prévus ainsi que le pire scénario possible.

Comme on mesure le profil de risque des participants des régimes CD d’après le revenu de retraite visé, il faut reconnaître que chaque participant a un profil de risque qui lui est propre. Il est pratiquement impossible que deux personnes aient des actifs de même valeur, la même politique de placement, le même taux de cotisation, le même âge, la même date de retraite prévue et la même espérance de vie à un moment précis. Puisque tous ces facteurs influent sur le style de vie à la retraite, il n’y a pas deux personnes qui ont exactement le même profil de risque. Il faut par conséquent que les renseignements présentés aux participants au sujet du pire scénario possible ou du provisionnement de leur régime tiennent compte de leur situation individuelle pour qu’ils soient utiles. Il est donc essentiellement futile de tenter de grouper les participants en différentes catégories, d’après de prétendus traits communs comme, par exemple, leur degré de tolérance du risque.

Atténuation du risque La seule façon pour le participant d’un RC d’atténuer le principal risque associé à la retraite est de surveiller régulièrement l’incidence des décisions importantes prises pendant la période d’accumulation du capital sur le revenu potentiel à la retraite et de prendre des mesures correctrices en conséquence. En fournissant périodiquement une évaluation illustrant le niveau prévu de revenu à la retraite et les risques afférents, on permet à chaque participant de connaître exactement sa situation actuelle, les objectifs qu’il est en voie d’atteindre et les risques auxquels il est exposé. Il ne peut y avoir aucun doute ni aucune surprise si les renseignements appropriés sont transmis clairement. De plus, en cas de provisionnement insuffisant, le participant pourra y remédier en prenant les mesures nécessaires dès que la situation lui sera signalée. Par conséquent, les promoteurs de régime qui offrent à leurs participants ce type d’outils auront la certitude qu’ils s’acquittent de leurs responsabilités fiduciaires; les participants disposeront en effet des renseignements les plus pertinents et les plus appropriés, ce qui les aidera et les incitera à pendre en main la planification de leur retraite.

Dans le dernier de cette série de trois articles (qui sera publié sur le site à la mi-juillet), nous examinerons en termes concrets le concept d’évaluation des régimes CD et nous étudierons certains des obstacles qu’il faut surmonter pour optimiser l’efficacité d’un tel outil de planification de la retraite et faciliter son utilisation par les participants.

Tony Ioanna, vice-président, Régimes à cotisations déterminées, Région Est, chez Aon Conseil Ivor Krol, analyste, Conseils en risques financiers, chez Aon Conseil.

* Les opinions et idées exprimées dans cet article sont celles de l’auteur. Elles n’ont pas étés influencés par Avantages, Les éditions Rogers, le commanditaire ou tout autre annonceur associé à ce site.