Revenu Québec : changement de culture en vue

Par La rédaction | 28 octobre 2015 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Dans la foulée des réformes nécessaires pour « un changement de culture », le président-directeur général de Revenu Québec, Gilles Paquin, a annoncé sa démission lundi, rapporte La Presse canadienne.

Un rapport publié le mois dernier par la protectrice du citoyen, Raymonde Saint-Germain, avait fait état de certaines pratiques abusives de l’agence envers des contribuables et des entreprises. Ce constat avait alors incité le ministre des Finances, Carlos Leitão, à convoquer Gilles Paquin pour lui réclamer un plan d’action destiné à mettre fin à des abus jugés « inacceptables ».

D’après La Presse canadienne, un plan d’action a bien été remis au ministre, mais le patron de l’agence a préféré démissionner et prendre sa retraite, même si son mandat devait normalement se terminer en 2017.

UN PROBLÈME BIEN RÉEL

Interrogé par Conseiller.ca, Me Maurice Mongrain, président-directeur général de l’Association de planification fiscale et financière (APFF), a confirmé l’existence d’« un problème bien réel de culture d’entreprise » au sein de Revenu Québec.

« Je pense que cela provient du fait qu’il y a quelques années, le ministère des Finances lui avait donné pour mandat de percevoir des milliards en surplus afin de réduire le déficit budgétaire en s’attaquant à l’évasion fiscale. Sauf que l’agence était devenue de plus en plus exigeante avec les contribuables, au point que ce n’étaient plus des vérificateurs, mais des cotiseurs qui se présentaient dans les entreprises. »

Une telle attitude a fini par « créer de sérieuses difficultés » pour les PME, estime Me Mongrain, notamment en matière de taxe de vente « puisque celles-ci étaient obligées de payer immédiatement, que la cotisation soit fondée ou non ».

« Il faut revenir à un équilibre et à un meilleur dialogue et, quand il y a divergence de point de vue, avoir la possibilité d’échanger et de régler le litige le plus rapidement possible pour éviter de possibles conséquences financières qui peuvent être désastreuses », conclut-il.

« DES OBJECTIFS BEAUCOUP TROP ÉLEVÉS »

La source du problème se trouve du côté de Québec, croit lui aussi Me Paul Ryan. Invité hier sur les ondes de Radio-Canada, l’avocat fiscaliste au cabinet Ravinsky, Ryan et Lemoine, à Montréal, juge qu’aujourd’hui « on blâme les gens de Revenu Québec pour leur culture » alors qu’en réalité « on leur a donné une mission trop difficile à remplir ».

Vers 2009, les vérifications de l’agence rapportaient au Trésor public environ deux milliards de dollars par an, rappelle-t-il, mais dans le cadre de son plan de retour à l’équilibre budgétaire, le gouvernement libéral lui a demandé « d’aller chercher graduellement jusqu’à 3,8 milliards en 2015 ».

« Nous avons toujours prétendu que ces objectifs-là étaient beaucoup trop élevés et ne pouvaient pas être supportés par le marché québécois, et aussi que produire de tels rendements plaçait sur les employés de Revenu Québec une pression énorme, poursuit Me Ryan.

Sa conclusion? « Le problème est beaucoup relié à ça. (…) Je fais un lien de cause à effet direct entre ces objectifs-là et ce qui est perçu comme niveau d’agressivité et comme problème de culture, les deux vont ensemble. »

UN PROCHE DE JEAN CHAREST

Avant d’être nommé à Revenu Québec, Gilles Paquin avait été secrétaire général du conseil exécutif, un poste clef dans l’administration du premier ministre Jean Charest.

L’ancienne ministre libérale Michelle Courchesne sera par ailleurs nommée prochainement membre du conseil d’administration de l’agence, actuellement présidé par Florent Gagné.

Depuis que Revenu Québec a obtenu son statut actuel, en 2011, ce sont ses dirigeants qui gèrent eux-mêmes les relations de travail puisque ses employés ne font plus partie de la fonction publique.

Un ancien employé de l’Agence du revenu du Canada (ARC), Alan A. Katiya, accédera également au statut d’administrateur de l’agence. Selon La Presse canadienne, il doit contribuer à y implanter « la culture de coopération avec les entreprises » qui est privilégiée par l’ARC.

Ces deux nominations devraient être faites d’ici quelques semaines, en raison notamment des vérifications de sécurité exigées.

L’ARRIVÉE D’UNE « AUTRE CULTURE »

« Ce sont des gens qui ont une autre culture, ça va faire du bien au conseil d’administration, a déclaré à la PC une source anonyme. Et peut-être que M. Paquin s’est dit que ce changement de culture, il n’était pas la personne pour l’opérer. »

Les discussions entourant le plan d’action réclamé par le ministre ont été marquées par des divisions. « Au sein de Revenu Québec, il y a eu plusieurs divergences sur le contenu du plan d’action qui devait être demandé », a indiqué cette source.

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