Risque et rendement : adaptez votre discours à chaque client

Par Bernard Viau | 5 Décembre 2016 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Businessman holding paper that say blah blah blah

La peur de perdre de l’argent et la recherche de profit sont le yin et le yang du monde de la finance. Voici quelques jalons pour en parler avec vos clients.

Chaque client réagit différemment aux fluctuations du marché. Pour vous lancer dans une conversation efficace sur les risques et les rendements, vous devez savoir à quel type d’interlocuteur vous avez affaire.

5 PROFILS, 5 APPROCHES DIFFÉRENTES

Rien n’est plus frustrant que d’investir du temps sans succès. Ne pas filtrer ses clients avant de leur consacrer de précieuses minutes serait une erreur.

Pour évaluer vos clients, il faut les faire parler de leurs expériences de placement. Pourquoi? Pour connecter au niveau émotionnel. Sans émotion, il n’y aura pas d’engagement de votre client.

Une fois que cet échange a eu lieu, je classe mes clients entre cinq groupes avant de faire affaire avec eux.

  • Le client confiant

Plus de 70 % de vos clients se classent dans cette catégorie, d’après mon expérience. Permettez-moi une analogie : ce genre de client croit au Père Noël et le Père Noël… c’est vous. Il n’ouvre pas ses relevés de placement, mais s’attend à avoir du rendement.

Son discours classique : « C’est vous l’expert. Je ne connais pas ça et je n’ai pas le temps de m’en occuper. » Avec lui, vous devrez procéder lentement, expliquer dans des mots simples et, surtout, noter les dates de rappel importantes, notamment l’échéance de ses placements.

Ces clients veulent avoir l’assurance que leurs placements ne comportent pas trop de risques. Lorsque les marchés sont en baisse, vous devez absolument les contacter. Cela fera augmenter leur confiance en vous. Visez un rendement moyen de 5 % et pensez à un horizon de placement d’une décennie au lieu d’une année.

  • Le client qui se dit « connaisseur »

C’est faux. Un gestionnaire très compétent se charge de ses placements et il est fier de vous le faire savoir. Il croit être connaisseur, car il a les moyens de se payer les services d’un professionnel chevronné.

Pour gagner ce type de clientèle, vous devrez être un conseiller émérite avec une expérience concrète des marchés. Parler de risques et de rendement peut sembler inutile avec lui, car il est persuadé d’avoir le meilleur, étant donné ses revenus et les frais souvent élevés qu’il paie.

Pour ébranler ses certitudes, demandez-lui si le rendement de ses placements tourne autour de 10 % par année. Ce serait normal avec un gestionnaire, mais ce n’est pas toujours le cas par manque de suivi.

Gardez contact aux anniversaires. Si vous en avez les compétences pour le faire, parlez-lui de planification successorale et de fiscalité des placements non enregistrés.

  • Le client émotif

Avec lui, ce sont les montagnes russes. Il y a d’abord celui qui s’est fait avoir une fois, comme il dit. Ce client croit connaître la Bourse : « Tous des voleurs. »

Deuxième variante du client émotif : celui qui veut faire de l’argent vite en prenant des risques. Le meilleur conseil que je puisse vous donner est d’oublier cette clientèle. Vous ne récolterez que des frustrations, car ces clients ont des attentes inatteignables. Les incompréhensions seront sources de conflits, qui saperont votre temps.

Si un émotif se trouve dans votre bloc d’affaires, détaillez abondamment vos conversations dans son dossier physique. Vous en aurez besoin, car c’est ce genre de client qui dépose souvent des plaintes contre les conseillers.

Divisez ses placements selon le niveau de risque en mettant l’accent sur la sécurité plus que sur le rendement. S’il s’agit du genre d’individu qui veut faire des profits rapidement, dirigez-le vers un conseiller en valeurs mobilières.

  • Le client analytique

Il va scruter ses états financiers à la loupe et vérifiera tout ce que vous direz. S’il manque 10 $, il vous appellera, « pas pour le montant, mais pour comprendre ce qui s’est passé », dira-t-il.

Par exemple, une de mes clientes avait vu son fonds de placement en obligations perdre 300 $ en trois jours. Sur 25 000 $, cela représentait à peine 1 %, mais cela démontrait que « mes conseils n’étaient peut-être pas très judicieux, car les actions n’avaient pas compensé les pertes en obligations. » Cela m’a pris près d’une heure à tenter de lui en expliquer les raisons… sans succès.

N’acceptez un client analytique que si vous pouvez tout recalculer, tout revérifier en plus de fournir les preuves écrites de ce que vous affirmez. Remplissez avec précaution son profil d’investisseur et mettez plus de notes qu’il n’en faut au dossier physique.

Les émotifs et les analytiques nécessitent que tout soit couché par écrit : dates, sujet discuté, ce que vous avez dit, la réaction du client, l’entente prise. Un client, à la suite d’un emprunt sur police d’assurance, avait vu son capital amputé de plusieurs milliers de dollars. Mes notes n’étaient pas assez détaillées pour l’enquête. Cela m’a coûté 400 dollars. Après cela, avec un tel client, j’écrivais beaucoup!

Concentrez votre discours sur la sécurité plutôt que sur le rendement, car les clients analytiques sont conservateurs.

  • Le client qui en sait plus que vous

Vous le rencontrerez rarement. Il s’occupe de ses placements lui-même et suit les marchés quotidiennement. Ce client connaît vraiment la Bourse : il achète des options, connaît les ventes à découvert et les contrats à terme.

Ne rêvez pas de l’avoir comme client. Inutile aussi de parler de risque.

Mais gardez tout de même le contact aux anniversaires en ne manquant pas de lui demander son avis sur les marchés. Parlez surtout de rendement. Abordez la fiscalité des fonds de placement et la planification successorale. Éventuellement, il vous référera des connaissances parce que vous aurez gagné sa confiance.

Bernard Viau est un conseiller à la retraite.

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