« Shawgers » va-t-il bouleverser le marché des télécoms?

Par Chase Bethel, CFA | 28 avril 2021 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Une tour de télécommunication sur un fonds de ciel nuageux au coucher du soleil.
shaunl / iStock

L’achat de Shaw par Rogers ouvre la voie à plusieurs scénarios, analyse Chase Bethel, analyste spécialisé en biens de consommation et en télécommunications à Gestion d’actifs CIBC.

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« Les rumeurs d’une telle transaction circulaient dans l’industrie depuis plusieurs années. La nouvelle entité proposée a même reçu le surnom Shawgers, un type de mot-valise habituellement réservé aux vedettes de Hollywood ! Cela démontre le niveau d’anticipation qui entourait la transaction », rapporte Chase Bethel.

La nouvelle est survenue en mars peu avant que le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) termine son examen complet du marché des services sans fil. Le régulateur a annoncé que les nouveaux venus pourraient jouer dans la cour des grands pendant une période de sept ans en profitant des installations des joueurs en place à titre d’opérateur de réseau mobile virtuel (MVNO). Une société qui acquiert une fréquence de spectre de niveau 4 ou supérieur et qui investit dans des infrastructures au niveau régional pourra ainsi offrir des forfaits nationaux. Le but étant bien sûr de favoriser une concurrence saine entre opérateurs.

« Mais l’avantage pour les joueurs en place, c’est que le régulateur n’a pas établi de façon unilatérale les tarifs de gros qu’ils factureront pour l’accès à leurs réseaux », précise Chase Bethel.

Le CRTC sera aussi appelé à trancher sur la transaction « Shawgers », mais probablement pas avant 2022 selon lui. Il entrevoit plusieurs scénarios possibles.

« Shaw était le quatrième opérateur sans fil et gagnait des parts de marché avec sa marque Freedom, surtout dans le centre du pays. Si Rogers s’empare des actifs sans fil de Shaw, cela lui donnera une position dominante en Ontario et en Colombie-Britannique. Nous nous attendons donc à ce qu’il lui soit permis d’acquérir uniquement la portion filaire du réseau de Shaw, mais qu’il doive se départir des actifs sans fil », dit Chase Bethel.

« Dans le contexte de la décision récente du CRTC concernant les MVNO, si Rogers vent les actifs sans fil de Shaw, je vois mal comment l’industrie ne pourrait pas devenir plus concurrentielle que par le passé », poursuit l’expert.

Les investisseurs en ont encore pour des mois avant de connaître l’issue de la transaction, qui pourrait même devenir un enjeu de campagne électorale fédérale selon lui. Il faudra ensuite obtenir des approbations du côté du Bureau de la concurrence ainsi que d’Innovation, Sciences et Développement économique Canada (ISDE), rappelle toutefois Chase Bethel.

« De plus, il faudra analyser les détails de la transaction pour comprendre quelles clauses favorisent Rogers ou Shaw. Il y a la possibilité que Rogers doive abandonner sa participation dans Cogeco. Il y a les enjeux d’après la transaction, comme le développement du réseau 5G, et la possibilité pour Rogers de combiner ses services filaires et sans fil en forfait dans toutes les régions. Enfin, il y a le milliard d’économies que l’entreprise compte réaliser par effet de synergie. »

Ce texte fait partie du programme Gestionnaires en direct, de la CIBC. Il a été rédigé sans apport du commanditaire.

Chase Bethel, CFA

Analyste des actions, consommation, Gestion de portefeuille et recherche Chase Bethel est membre de l’équipe de recherche sur les actions et est responsable de l’analyse fondamentale du secteur de la consommation en Amérique du Nord. Avant son arrivée à Gestion d’actifs CIBC en 2016, M. Bethel occupait le poste d’analyste de recherche sur les actions à Desjardins Marchés des capitaux et se spécialisait dans les sociétés en situation particulière, y compris certaines sociétés liées au secteur canadien de la consommation. Il a auparavant été analyste en placements institutionnels à Fidelity Investments Canada. M. Bethel est titulaire d’un baccalauréat ès arts, avec spécialisation en administration des affaires de la Richard Ivey School of Business. Il détient également le titre de CFA.