Succession à l’international : quatre situations à surveiller

Par Nathalie Côté | 28 mai 2018 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Plusieurs personnes choisissent d’habiter successivement dans différents pays, en raison de leur emploi, ou pour toutes sortes d’autres raisons. Ce qui n’est pas sans conséquence sur leur patrimoine en cas de décès….

Votre client se retrouve dans une telle situation? Voici quatre situations courantes auxquelles il devrait porter attention.

1. MARIAGE À L’ÉTRANGER 

« Lors d’un mariage à l’étranger, c’est le lieu de résidence des époux et non le lieu du mariage qui est pris en compte pour déterminer ce qui est prévu en cas de décès », indique André Phan, notaire à AHP notaire. Ainsi, deux Québécois qui se marient pendant un voyage dans le Sud sont soumis au droit québécois.

Pour des immigrants mariés à l’étranger, la situation peut toutefois être plus complexe.

« Le patrimoine familial s’applique à toute personne mariée domiciliée au Québec, note Nathalène Chapuis, notaire à l’étude de Me Stéphane Larose, notaire et fiscaliste. Par contre, les autres biens sont régis par le régime matrimonial des gens. »

Les règles varieront donc en fonction de l’endroit où ils étaient domiciliés lors du mariage ou du contrat de mariage, par exemple. Cela peut entraîner des recherches et des coûts supplémentaires.

Si le couple a un contrat de mariage, il pourrait être opportun de le refaire. Les époux qui n’en ont pas pourraient quant à eux faire enregistrer leur certificat de mariage au Québec. « Ça va apporter une certaine reconnaissance et le droit québécois va s’appliquer », explique Me Phan.

2. IMMEUBLES ET PLACEMENTS À L’ÉTRANGER 

Si votre client détient un immeuble, des comptes bancaires ou d’autres biens à l’étranger, il devrait s’assurer que tout est bel et bien mentionné dans son testament.

Le notaire pourra ainsi veiller à minimiser l’incidence fiscale au moment du décès. « Au Québec, on présume avoir vendu les biens la veille du décès et on analyse les conséquences de la vente sur chacun des biens, explique Me Chapuis. Certains biens, comme les comptes bancaires, ne génèrent pas de gain en capital. En France, par exemple, c’est très différent. La succession est imposée sur l’intégralité des biens. Et l’imposition se fait en fonction du lien de parenté avec l’héritier. Plus il est éloigné du défunt, plus les droits de succession sont élevés. »

« Au Québec, le droit applicable est celui où se situe le bien immobilier en cas de décès, ajoute Me Phan. Il faut donc voir au cas par cas ce qu’il en est. » En Floride, l’immeuble devient automatiquement la propriété du conjoint, par exemple.

3. FAMILLE DISPERSÉE DANS DIFFÉRENTS PAYS 

Il n’est pas rare que les membres d’une famille ne résident pas dans le même État. Dans ce cas, une bonne planification peut éviter bien des soucis. « L’héritier qui reçoit des biens peut avoir des obligations fiscales liées à son lieu de résidence en plus de celui du défunt, prévient Me Chapuis. Cette double fiscalité peut être atténuée ou pas par des conventions fiscales entre le Québec et le pays en question. »

Le testament de vos clients devrait tenir compte de cette réalité. « Il arrive fréquemment qu’une personne ait des enfants dans des pays différents, ajoute-t-elle. Le parent veut partager l’héritage à parts égales entre tous ses enfants. Mais est-ce qu’on veut leur donner la même chose avant ou après le paiement des droits de succession? Il faut y penser. » Dans certains cas, faire des dons de son vivant peut être plus avantageux.

Vos clients devraient aussi, autant que possible, trouver un exécuteur testamentaire au Québec. « Le problème, c’est qu’au moment du décès, l’exécuteur testamentaire devient le représentant légal du défunt, explique Me Phan. S’il réside à l’extérieur du pays, c’est comme s’il y avait un transfert de fonds à l’étranger. Toutes les dispositions fiscales sur les transferts de biens meubles vont s’appliquer. »

4. TESTAMENT RÉDIGÉ AILLEURS 

Techniquement, un testament rédigé dans un autre pays peut demeurer valide au Québec. Dans certains cas, son application pourrait toutefois être complexe. « Certains testaments sont rédigés en utilisant les termes de la loi étrangère, donc ils sont valides, mais peu clairs et difficiles d’application », constate Me Chapuis.

Les notaires recommandent donc de faire rédiger un nouveau testament en s’assurant qu’il soit conforme aux règles internationales et que le coût fiscal des volontés exprimées ne soit pas démesuré. Dans certains cas, par exemple, il pourrait être plus avantageux de nommer un héritier comme bénéficiaire d’une assurance vie plutôt que de lui léguer un immeuble pour limiter l’impôt à payer.

« Il faut aussi s’assurer de révoquer ceux qui ont été faits avant parce qu’on pourrait faire sans le vouloir un testament qui ne concerne qu’une partie de nos biens, souligne Me Chapuis. Le danger, c’est de se retrouver avec deux testaments parallèles, ce qui deviendrait très compliqué. »

En cas de décès, la situation peut rapidement devenir un casse-tête pour les héritiers de vos clients. Afin d’avoir des documents juridiques bien adaptés à leur situation, ils devraient contacter un notaire spécialisé et lui fournir le plus de détails possible sur ce qu’ils possèdent. Ils s’assureront ainsi que leurs volontés seront respectées et éviteront des soucis à leur succession.

Nathalie Côté