Trois signaux d’alarme pour les conseillers

Par Pierre-Luc Trudel | 13 novembre 2015 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Le moins que l’on puisse dire, c’est que les conseillers auront du pain sur la planche au cours des prochaines années s’ils veulent conserver leur clientèle et faire croître leurs activités. Une attention toute particulière devra être portée aux frais, aux riches… et aux robots.

« Notre industrie change, et elle change pour toujours. Les changements qui s’opèrent sont un signal d’alarme, une occasion pour les conseillers de prendre du recul et d’améliorer leurs pratiques », a affirmé sans détour Grant Shorten, directeur, Analyses stratégiques à Investissements Renaissance lors d’une conférence organisée par la division de Gestion d’actifs CIBC jeudi à Montréal.

Selon lui, trois facteurs déterminants amèneront maints défis pour la profession, mais aussi de nombreuses opportunités : la révolution de la transparence des frais, la progression des conseillers-robots et l’invasion des investisseurs fortunés.

Grant Shorten

TROIS FACTEURS, TROIS IMPACTS

« Avec le MRCC 2, vos clients sauront exactement combien ils paient pour leurs placements », souligne M. Shorten, qui recommande aux conseillers de se préparer à gérer certains clients qui pourraient être bouleversés d’apprendre comment ils paient pour leurs placements et pourquoi ces renseignements ont été gardés secret aussi longtemps.

Car des clients insatisfaits pourraient bien se tourner vers des conseillers-robots pour leurs besoins de planification financière. Grâce à leurs frais modiques (aussi peu que 0,3 à 0,5 % de l’actif) et leur faible seuil de placement minimal (parfois 1 $), les conseillers-robots séduisent de plus en plus d’investisseurs. Leur actif sous gestion total atteint 20 G$ aux États-Unis et 4 G$ au Canada.

Les conseillers « humains », peuvent toutefois se consoler : l’actif des clients les plus fortunés croît rapidement. En effet, le nombre de ménages qui ont des actifs de plus de 1 M$ à investir devrait doubler au cours des prochaines années, si bien que ces ménages détiendront 82 % des actifs personnels totaux au Canada d’ici 2022. Mais si ces clients représentent une belle opportunité d’affaires pour les conseillers, ils sont en revanche très exigeants et s’attendent à recevoir un service VIP, mais surtout à bénéficier de frais plus bas que les clients qui ont moins d’actif à investir.

Transparence des frais, robots-conseillers, clientèle fortunée… Concrètement, quels seront les impacts de ces trois facteurs sur le quotidien des conseillers? Une pression à la baisse sur les frais, une demande accrue de démonstration de la valeur et une demande accrue de service à la clientèle exceptionnel, répond Grant Shorten, qui formule six stratégies pour les conseillers « du nouvel ordre mondial ».

1. Maîtriser l’ensemble de l’éventail de la valeur

« Le coût ne devient un problème qu’en l’absence de valeur », soutient M. Shorten. Mais encore faut-il savoir ce qu’est la valeur. « Ça dépend de la perception du client », croit-il.

Ainsi, certains clients accorderont plus de valeur aux aspects émotionnels, comme le contact humain, alors que d’autres préfèreront la logique et les aspects techniques. De là l’importance pour les conseillers de demander aux clients ce qu’ils veulent vraiment et ce qui a de la valeur à leurs yeux.

2. Établir une liste complète de ses services

Comme c’est le cas pour une maison, un téléphone intelligent ou n’importe quel autre achat, le client doit être en mesure de justifier ses dépenses liées à la planification financière. « Le conseiller doit articuler la valeur qu’il offre dans des termes clairs. Il doit simplifier, éduquer et démontrer », affirme Grant Shorten. Établir une liste complète des services offerts est un bon moyen d’y arriver.

3. Profiter de la force d’un réseau

« Pas besoin de retourner à l’université pour offrir toute une gamme de services, il suffit de développer un réseau d’alliances stratégiques avec d’autres professionnels », lance M. Shorten. Ces professionnels peuvent inclure des avocats, des notaires, des comptables ou encore des courtiers immobiliers. Les clients seront alors en mesure de bénéficier de services de placement, de fiscalité, d’assurance et de droit, un peu à la manière d’un « bureau familial ».

4. Prioriser le marché des clients à valeur nette élevée

Les clients fortunés ont une vie compliquée, et ce n’est certainement pas des robots qui vont pouvoir répondre à leurs besoins complexes! « Ils en sont incapables », affirme Grant Shorten.

5. Intégrer quelques placements à faible coût

Il s’agit là d’un scénario triplement gagnant, selon M. Shorten. Intégrer des placements à faible coût au portefeuille d’un client, deux fonds indiciels par exemple, permet à la fois de réfuter l’accusation selon laquelle les conseillers ne proposent que des placements coûteux, de réduire les coûts globaux du portefeuille et de démontrer son objectivité.

6. Se préparer à répondre aux questions difficiles sur les frais

Pourquoi dois-je payer continuellement des commissions de suivi? Pourquoi dois-je payer des frais quand mon portefeuille produit des rendements médiocres? Voilà des questions auxquelles tous les conseillers doivent être capables de répondre clairement et de manière persuasive.

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Pierre-Luc Trudel