Virements injustifiés et fausses réclamations

Par La rédaction | 27 février 2018 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Virements injustifiés d’un côté, fausses réclamations d’assurance de l’autre : cette conseillère et ce représentant écopent de deux ans de radiation. Retour sur ces deux affaires.

Le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière a ordonné la radiation temporaire de Ravneet Singh et de Mathieu Labelle-Desbiens.

Dans la première affaire, Ravneet Singh a plaidé coupable à l’unique chef d’infraction contenu à la plainte disciplinaire, soit de ne pas avoir agi avec intégrité et compétence en effectuant des transactions non autorisées, contrevenant ainsi aux articles 10 et 14 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières.

Aujourd’hui âgée de 29 ans, la conseillère (certificat no 199100, BDNI no 2954621) avait été embauchée en février 2011 pour occuper à temps partiel le poste de gérante du service à la clientèle de la Banque TD pour une succursale située dans l’arrondissement St-Laurent, à Montréal.

PLUSIEURS VIREMENTS INJUSTIFIÉS

Entre le 10 novembre 2014 et le 31 janvier 2015, la jeune femme a effectué à six reprises des virements de frais de service à son compte bancaire personnel, pour un montant total de 285 dollars. Afin d’effectuer ces opérations, elle a utilisé le code d’accès d’autres employés, et ce, à leur insu. Jugeant ces virements injustifiés, son employeur l’a congédiée en mars 2015 à la suite d’une enquête interne et, depuis le mois d’août de cette année-là, elle travaille pour une autre banque à titre d’assistante aux conseillers financiers.

Pour justifier ses gestes, Ravneet Singh a expliqué que, dans le cadre de ses fonctions, elle devait organiser diverses activités promotionnelles. Par exemple, lors de la rentrée, elle pouvait acheter des crayons à remettre aux clients ou bien faire tirer des sacs d’école contenant divers effets scolaires. Or, pour mener à bien ces activités promotionnelles, elle devait acheter des biens, mais ne s’était pas souciée d’en obtenir le remboursement ni de conserver les reçus de ses achats. En effet, personne ne lui avait demandé d’organiser précisément ce type d’activités. Malgré tout, la jeune femme avait estimé que ce genre d’initiatives pourrait lui valoir de la reconnaissance à l’interne et l’aider à progresser dans sa carrière.

Se rendant compte qu’elle avait finalement dépensé entre 200 et 300 dollars de son argent pour effectuer ces achats, elle s’est renseigné auprès de collègues pour savoir comment se faire rembourser alors qu’elle n’avait pas conservé de reçus. Et elle s’est fait dire qu’elle pouvait procéder par virements de frais de service. Toutefois, comme elle ne pouvait créditer elle-même son propre compte, elle devait dans ce cas utiliser le code d’accès d’autres employés, ce qu’elle a décidé de faire pour un montant total de 285 dollars mais sans en aviser son supérieur.

« TRAUMATISÉE DE FAÇON AIGUË »

Lors de son audition, l’intimée a admis avoir fait preuve d’un très mauvais jugement en agissant de la sorte et le comité de discipline a noté qu’il est « évident que les conséquences de son geste, de même que les remords et regrets d’avoir posé ceux-ci, [la] traumatisent encore de façon aiguë », et ce, d’autant plus qu’elle souhaite faire carrière dans le domaine financier. Toutefois, même si aucun client de la Banque TD n’a formulé de plainte contre l’intimée et si ses agissements n’ont occasionné aucune perte à la banque ou à des consommateurs, la poursuite a estimé que les gestes posés s’apparentaient à de l’appropriation de fonds, visée par l’article 14 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières.

De son côté, la défense de la jeune femme a argué du fait que lorsque les faits reprochés avaient été commis, celle-ci occupait un poste dont les mandats ne requéraient pas son inscription comme courtier. Elle a également mis en avant une série de facteurs atténuants, notamment qu’elle n’avait aucun antécédents disciplinaires, avait collaboré à l’enquête du syndic et avait plaidé coupable, qu’elle était consciente de la conséquence de ses gestes et avait manifesté les remords les plus sincères, qu’elle avait offert de rembourser les sommes virées à son compte et enfin qu’elle avait déjà subi une lourde sanction avec son congédiement de la Banque TD.

Après avoir reconnu, comme le suggérait le procureur du plaignant, que les gestes commis par l’intimée s’apparentaient à de l’appropriation de fonds, qu’ils étaient « objectivement graves » et qu’ils constituaient « un manquement aux qualités premières que doit posséder un représentant de la Chambre, à savoir l’honnêteté, l’intégrité et la probité », le comité de discipline a donc ordonné la radiation temporaire de Ravneet Singh pour une période de deux ans.

FAUSSES RÉCLAMATIONS D’ASSURANCE

Dans une seconde affaire, Mathieu Labelle-Desbiens (certificat no 176541, BDNI no 2159821), âgé de 34 ans, a lui aussi plaidé coupable à l’unique chef d’infraction contenu à la plainte disciplinaire, soit d’avoir fait défaut d’agir de manière responsable avec respect et intégrité, en présentant des réclamations d’assurance frauduleuses, contrevenant ainsi aux articles 10 et 14 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières.

Les faits qui lui étaient reprochés se sont déroulés à Saint‑Eustache entre le 30 décembre 2013 et le 18 avril 2014, alors qu’il était représentant de courtier pour un courtier en épargne collective à la Banque Scotia où, en tant qu’employé, il bénéficiait d’un régime d’assurance collective. Or, à la suite de problèmes financiers, il a effectué à sept reprises de fausses réclamations auprès de l’assureur de ce régime. Plus précisément, il s’agissait de réclamations qui étaient soit complètement fausses, soit dont le montant avait été frauduleusement augmenté, le tout pour un montant d’environ 800 dollars. Un stratagème qui, lorsqu’il a été découvert par son employeur, a valu à Mathieu Labelle-Desbiens d’être licencié en décembre 2015. À cette date, il détenait depuis huit ans un certificat dans le domaine de l’épargne collective.

Prenant acte du fait que l’intimé avait, depuis, remboursé à l’assureur le montant qu’il avait faussement réclamé et obtenu, le comité de discipline a néanmoins estimé que même si les gestes reprochés ne visaient pas directement la clientèle de la banque, l’obligation d’agir avec honnêteté et probité s’appliquait tant à l’égard de l’employeur que de l’assureur du régime d’assurance collective. Il s’est également dit d’accord avec la poursuite à l’effet que l’infraction reprochée était d’une « gravité objective importante », qu’il s’agissait de « gestes délibérés » et que l’intimé avait « agi de façon malhonnête » à plusieurs reprises.

SITUATION PERSONNELLE DIFFICILE

Pour sa défense, Mathieu Labelle-Desbiens a notamment fait valoir qu’il se trouvait dans une situation personnelle difficile, qu’il vivait séparé de son ex-conjointe et avait la garde partagée de trois enfants. Il a indiqué qu’au moment où il avait commis les actes qui lui sont reprochés, lui et sa conjointe de l’époque avaient six enfants à leur charge, et qu’elle avait alors perdu son emploi, ce qui avait occasionné momentanément des problèmes financiers pour le couple. Il a enfin précisé qu’il n’avait pas l’intention de revenir travailler dans le domaine financier.

Après avoir pris en compte le fait que l’intimé n’avait aucun antécédent disciplinaire, qu’il avait collaboré pleinement à l’enquête, avait admis sa culpabilité à la première occasion et que ni son ex-employeur ni l’assureur du régime d’assurance collective n’avaient subi de préjudice, le comité de discipline l’a donc condamné à une radiation temporaire de deux ans.

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