Insolite : vignobles français et blanchiment d’argent

Par La rédaction | 19 août 2013 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
3 minutes de lecture

La simple évocation de noms comme Saint-Émilion ou Pomerol fait rêver les amateurs de grands vins de partout dans le monde. Ce qui est moins connu : plusieurs des vignobles de ces deux communes viticoles ont été rachetés au cours des dernières années par des investisseurs russes et chinois.

Ces mouvements de capitaux inquiètent les autorités françaises chargées de surveiller les activités de blanchiment d’argent, rapporte le quotidien Le Figaro.

Le service de renseignement financier rattaché au ministère de l’Économie s’intéresse au secteur viticole dans son plus récent rapport annuel. On y souligne que plusieurs rachats par des investisseurs russes, chinois et ukrainiens se font par des montages juridiques complexes et opaques.

Les transactions se font par l’entremise de « sociétés en cascades installées dans des pays à fiscalité privilégiées », détaille le rapport. En 2007, les cas de soupçons d’argent sale dans le domaine viticole se chiffraient à seulement quatre ou cinq cas par année. En 2010, ce nombre avait triplé.

Des millions en jeu « Un montage astucieux dans ce domaine doit être réalisable. Le prix du vin a atteint de tels niveaux! Des millions sont en jeu. C’est logique que cela puisse attirer des personnes pour un business douteux», a déclaré au Figaro Jacques-Olivier Pesme, un spécialiste du commerce du vin.

«Je connais beaucoup de propriétaires chinois sur Bordeaux. Leurs investissements sont propres», a pour sa part affirmé Grégory Pécastaing, directeur du Musée du vin à Bordeaux. «Il est très difficile de sortir son argent en Chine, il y a beaucoup de démarches, donc je n’imagine pas du blanchiment possible. Avec les Russes, c’est un peu différent car on ne sait jamais d’où provient l’argent», a-t-il cependant ajouté.

Cercle vicieux Dans certaines régions, la valeur des vignobles a monté en flèche dans les dernières années, en raison des investissements venus de l’étranger. C’est un peu un cercle vicieux, car plusieurs propriétaires n’ont désormais plus les moyens de céder leur domaine à leurs descendants. En effet, les droits de succession à payer sont établis en fonction de la valeur au marché du vignoble. Pour plusieurs propriétaires, la seule option viable est alors de se tourner vers un acheteur étranger.

À titre d’exemple, le château de Gevrey-Chambertin, en Bourgogne, a récemment été vendu à la suite du décès de son propriétaire. Un investisseur de Macao a payé dix millions de dollars pour le minuscule domaine de 2,3 hectares, alors que l’estimation était d’environ quatre millions de dollars. Mais il s’agit aussi d’un petit morceau d’histoire, puisque c’était le vin préféré de Napoléon !

La rédaction