La Chambre propose des consultations sur son avenir

Par La rédaction | 4 mai 2017 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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La Chambre de la sécurité financière (CSF) a invité Carlos Leitao à la prudence mercredi après qu’il ait jugé souhaitable qu’elle soit intégrée à l’Autorité des marchés financiers (AMF).

« Nous avons pris acte des propos du ministre des Finances », déclare Marie Elaine Farley, présidente de la CSF, dans un courriel à Conseiller.

La dirigeante mesure ses mots, se contentant d’indiquer que « tout changement aux règles entourant les mécanismes de protection du public nécessite la plus grande prudence » et qu’il est très important de « tenir des consultations publiques afin d’en examiner les impacts pour donner la chance à des intervenants de bonifier la réflexion du ministre ».

« La Chambre, à titre d’organisme d’autorégulation multidisciplinaire qui inspire d’autres juridictions canadiennes, continuera de travailler pour élaborer un encadrement moderne et respectueux des nouvelles conditions de marché. La CSF, organisme de proximité unique au pays, assure la protection du public et encadre efficacement les professionnels afin qu’ils offrent des services répondant aux normes de qualité et d’intégrité de leur profession », conclut-elle.

DONNER « PLUS DE COHÉRENCE » AU SYSTÈME

Mardi, devant la commission des Finances publiques de l’Assemblée nationale, Carlos Leitão a dit être favorable à ce que l’AMF intègre les activités de la CSF ainsi que celles de la Chambre de l’assurance de dommages. Questionné par le député de Granby François Bonnardel (Coalition Avenir Québec), le ministre a répondu qu’« il serait souhaitable que cela se fasse », car cela donnerait « plus de cohérence » au système financier québécois et permettrait à l’AMF d’« accomplir encore mieux son travail », puisqu’elle aurait alors la responsabilité de tous les marchés financiers de la province.

« C’est quelque chose qu’on considère. Notre objectif est de rendre l’AMF la plus efficace possible dans son travail de régulateur des marchés financiers », déclare-t-il, tout en précisant que le but de l’opération ne serait pas tant de réaliser des économies que de donner davantage de pouvoirs à l’Autorité et de « mieux encadrer l’industrie ».

Rappelant que le projet de loi sur le secteur financier qu’il est en train de finaliser est très vaste et que ce secteur n’a pas été revu sur le fond depuis une trentaine d’années, le ministre soutient qu’il y a donc lieu de « moderniser toute cette législation-là pour que l’industrie puisse mieux fonctionner et s’adapter aussi aux nouvelles technologies », tout cela dans l’intérêt public. Son objectif est de déposer un projet de loi d’ici le 16 juin, date limite de la session parlementaire. « Ça s’en vient, on en est très proche », conclut-il.

L’AMF SE DIT PRÊTE

Présent à la commission des Finances publiques, le PDG de l’AMF, Louis Morisset, a pour sa part insisté sur le fait que son organisation était prête à toute éventualité. « Si le gouvernement voulait nous confier davantage de responsabilité, il faut y réfléchir et s’y préparer pour que cette transition, si elle se fait, se fasse de la manière la plus efficace et harmonieuse possible », a-t-il expliqué devant les députés.

« La CSF agit à l’égard de la déontologie des représentants, tandis que nous agissons à l’égard des cabinets. Il y a des synergies qui sont possibles. Les consommateurs doivent dans certains cas s’adresser à l’Autorité, dans d’autres, à la Chambre, donc on peut assurément voir qu’il y aurait synergie possible dans l’intérêt de mieux les protéger », affirme Louis Morisset.

Certaines lois au Québec n’ont pas été revues en profondeur depuis longtemps, en particulier la Loi sur la distribution de produits et services financiers, qui remonte à 1999, poursuit-il, relevant que « pendant ce temps, évidemment, les marchés financiers ont évolué ». La révision de ces lois est « d‘autant plus importante » que l’an prochain, l’Autorité sera évaluée par le Fonds monétaire international dans le cadre de son examen du cadre réglementaire québécois et canadien. « L’environnement législatif se doit d’évoluer et idéalement avant le passage du FMI », croit le patron de l’AMF.

TRANSFORMER LA CSF EN ORDRE PROFESSIONNEL?

Également interrogé par Conseiller, Flavio Vani s’est quant à lui de nouveau dit « favorable à l’abolition de la CSF telle qu’elle est constituée et gérée actuellement sous la loi 188 », même s’il croit que « courir après les malfrats [comme l’AMF] et gérer une multitude de professions en services financiers [comme la Chambre] sont deux missions aux antipodes ». En revanche, le président de l’Association professionnelle des conseillers en services financiers estime qu’« une refonte de la Chambre en ordre professionnel serait bénéfique à la société québécoise et au développement de la profession dans les services financiers ».

« Nous savons que la concentration de la distribution des produits et services financiers crée un problème de conflits d’intérêts, apparents ou non. Dans cette optique, un ordre professionnel limiterait ces effets en libérant les actes et le conseil des praticiens, en plus de donner de la crédibilité à la formation des conseillers en services financiers », ajoute Flavio Vani.

En mars 2016, ce dernier jugeait déjà que la CSF avait « failli à sa mission » et soutenait entre autres qu’« elle n’aide personne au sein de la profession », assurant « qu’un seul organisme s’acquitterait mieux et à meilleur coût de protéger le public ». « Nous croyons que la Chambre s’est mal acquittée de ses responsabilités professionnelles. L’une de ses premières tâches aurait dû être de promouvoir la profession et de démontrer au public l’importance d’avoir un conseiller », dénonçait-il alors.

La rédaction