Le contribuable n’est pas un puits sans fond

Par Denis Méthot | 12 novembre 2014 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
4 minutes de lecture

Le président de la Commission d’examen sur la fiscalité québécoise, le fiscalise Luc Godbout. Photo : Denis Méthot

Chacun à leur manière, des intervenants du milieu des services financiers, des assurances de personnes et de la fiscalité ont rappelé que la capacité de payer des contribuables avait une limite devant la Commission d’examen sur la fiscalité québécoise qui a siégé à Montréal, puis à Québec au cours des dernières semaines.

Le fondateur du Centre québécois de formation en fiscalité (CQFF), Yves Chartrand, a lancé un message très clair aux membres de la Commission et à son président, Luc Godbout : « Nous vous rappelons qu’il ne faut pas taxer plus les riches, mais avoir plus de riches à taxer. »

« Dans la vraie vie, peut-on aussi lire dans le mémoire du CQFF, dont Conseiller a obtenu copie, il ne faut pas franchir la fine ligne psychologique entre l’imposition et la…confiscation. »

Se rangeant tantôt du côté des contribuables, tantôt de celui du gouvernement du Québec, le fiscaliste souligne que de nombreuses dépenses fiscales lui semblent injustifiées. Il dénonce notamment la lenteur du système à abolir le fractionnement du revenu de pension avant l’âge de 65 ans, une mesure que le CQFF exige avec insistance depuis quatre ans et qui a fait perdre des dizaines de millions de dollars à la province, estime-t-il.

« Incompétence » chez Revenu Québec

Yves Chartrand dénonce aussi avec véhémence l’attitude d’employés de Revenu Québec. Il évoque « un manque de respect des droits fondamentaux des contribuables, une attitude de profond mépris, une incompétence très grave du personnel [en gras dans le mémoire, NDLR], et un acharnement injustifié couplés d’une volonté qui se limite à tenter de récolter des sommes à tout prix. […] De plus en plus de vérifications fiscales ou de contestations par le fisc québécois ressemblent à de véritables arnaques ».

Intervention de l’APSCF

De son côté, l’Association professionnelle des conseillers en services financiers (APCSF) s’en est prise devant la Commission au mythe de la « parfaite » progressivité de l’imposition québécoise. Elle compte sept paliers, mais dans les faits, ces derniers sont faussés par une quarantaine de mesures socio-fiscales qui fluctuent tantôt en fonction du revenu personnel, tantôt en fonction du revenu familial, ce qui crée beaucoup d’iniquités entre les différents groupes de la population, croit l’organisation.

Se baser sur des quartiles de revenus

La solution préconisée par Jean-François Robert, représentant de courtier en épargne collective et collaborateur du mémoire de l’APCSF, pour mettre fin à l’éparpillement de l’État et assurer une véritable équité serait d’établir les mesures socio-fiscales sur la base des quartiles de revenus, c’est-à-dire la répartition des revenus des ménages en quatre parts égales.

Le premier quartile (chiffre sous lequel se situent 25 % des revenus) serait formé des contribuables qui doivent concentrer leurs ressources sur leurs besoins vitaux : se loger, se nourrir et se vêtir. Le second quartile (sous lequel se trouvent 50 % des revenus) comprendrait les gens de la classe modeste, le troisième ceux de la classe moyenne (sous lequel se trouvent 75 % des revenus) et le quatrième, des individus qui n’ont pas besoin d’aide financière. Inversement, 75 % des revenus dépassent le premier quartile, 50 % le deuxième et 25 % le troisième.

M. Robert se demande s’il est normal qu’un ménage doive payer la cotisation maximale à la RAMQ alors qu’il bénéficie du crédit solidarité, voire de la prime au travail. Autrement dit, comment peut-on dire que ce ménage a besoin d’une aide financière, tout en le considérant suffisamment fortuné pour contribuer pleinement à la RAMQ? s’interroge-t-il.

Instauration du ticket modérateur en santé

L’APCSF ne craint pas de nager à contre-courant. Alors que les derniers gouvernements semblent avoir fermé la porte à un ticket modérateur en santé, l’Association le ramène sur le tapis et en réclame l’instauration. Elle compare la situation à celle qui prévaut dans le domaine des services de garde. Pour bénéficier de ce service, les usagers des centres de la petite enfance doivent payer un montant de 7 $ par jour. S’il est normal de débourser 7 $ pour faire garder un enfant, pourquoi ne serait-ce pas la même chose pour voir un médecin? se demande Jean-François Robert.

Il souhaite aussi que la participation financière annuelle versée à la RAMQ soit établie en fonction du revenu personnel du contribuable, comme c’est le cas pour la contribution santé.

Page suivante >>

Denis Méthot