Les champions de l’opacité financière sont…

Par La rédaction | 5 février 2018 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Les États-Unis figurent au 2e rang des pays les plus « opaques » en matière d’évasion fiscale, juste derrière la Suisse mais bien avant plusieurs paradis fiscaux avérés, selon un rapport de l’association Tax Justice Network (TJN).

Dévoilé la semaine dernière, ce document (en anglais) passe en revue quelque 112 pays ou juridictions avant de les classer en fonction de l’ampleur de leur culture d’opacité financière et de leur facilitation des activités financières extraterritoriales. Et comme le souligne Le Monde, cette liste noire est bien loin de celle qui a récemment été établie à grand-peine par l’Union européenne.

Pour réaliser son « palmarès » des États tricheurs, l’ONG fondée en 2003 utilise un indice (en anglais) spécialement mis au point par ses chercheurs. Cet outil est destiné à « comprendre l’opacité financière mondiale, les paradis fiscaux, les juridictions opaques, les flux financiers illicites et l’évasion de capitaux », ainsi que l’infrastructure mondiale et les facilitateurs qui les rendent possibles, explique le Mouvement d’éducation et de défense des actionnaires (MÉDAC) sur son site web.

LE CANADA SE CLASSE À LA 21E PLACE

L’édition 2018 de cette liste noire des champions de l’opacité financière place la Suisse en tête, suivie des États-Unis et des îles Caïmans. Le Canada arrive pour sa part en 21e position, juste après Jersey, les Bahamas et Malte, mais avant Macao (22e), le Royaume-Uni (23e), Chypre (24e) et la France (25e). Comme le souligne le MÉDAC, « on retrouve derrière le Canada des pays qui sont généralement considérés comme étant des paradis fiscaux, tels que Chypre, l’Irlande, les Bermudes, la Barbade, Monaco, Andorre, ainsi que Trinité et Tobago ».

L’une des principales surprises de ce palmarès est la montée en puissance des États-Unis, relève Le Monde. Classés 6e dans l’édition 2013 de l’enquête de TJN, puis 3e en 2015, ils figurent désormais à la 2e place. « Et si cela continue, il est bien possible qu’ils se retrouvent en tête lors du prochain classement », selon le président de l’ONG, John Christensen. Le dirigeant estime en effet que les États-Unis ont choisi de lutter avec force contre les paradis fiscaux à l’étranger mais qu’ils se montrent très laxistes chez eux. D’après lui, la stratégie américaine peut se résumer ainsi : « Se défendre contre les paradis fiscaux étrangers, tout en étant un paradis fiscal pour les étrangers. »

« Au cœur de cette approche unilatérale se trouve le refus des Américains de se joindre à l’échange automatique de données de l’OCDE, Washington estimant qu’il n’en a pas besoin puisqu’il a sa propre législation (…) fondée sur le même principe, le FATCA (Foreign Account Tax Compliance Act) », analyse Le Monde. Résultat : les institutions financières américaines « ont mis en place un marketing très agressif à l’international, insistant sur le fait que le FATCA n’est pas réciproque », accuse John Christensen. Ce dernier pointe aussi l’attitude laxiste d’États américains comme le Delaware, le Wyoming et le Nevada, qui permettent très facilement d’enregistrer des sociétés prête-noms et des trusts anonymes. Et ce système fonctionne, note Le Monde, puisque la part de marché de nos voisins du Sud dans les flux financiers internationaux est passée de 19,6 % en 2016 à 22,3 % aujourd’hui.

« SOUVENT LES PLUS GROS ET LES PLUS RICHES PAYS »

Quant à la raison pour laquelle des États comme le Canada ou la France se retrouvent moins bien classés que des paradis fiscaux avérés, elle est en partie liée à la méthodologie utilisée. Selon la chaîne de télévision France 24, TJN tient en effet compte, outre les taux d’imposition les plus bas, d’une dizaine de critères, dont l’opacité du système judiciaire, les lourdeurs ou failles administratives, le secret bancaire, la transparence d’une juridiction (échange automatique de données ou pas, existence d’un registre des bénéficiaires des entreprises ou pas, etc.) ainsi que la taille de son secteur financier.

« En identifiant les plus importants fournisseurs d’opacité financière internationale, l’Indice d’opacité financière révèle que les stéréotypes traditionnels sur les paradis fiscaux sont faux. Les plus importants fournisseurs d’opacité financière au monde qui abritent ou canalisent des éléments d’actifs détournés ne sont pas, pour la plupart, des petits pays ou des îles comme beaucoup de gens le supposent, mais plutôt certains des plus gros et des plus riches pays », notamment des membres de l’OCDE, explique TNJ.

LES 10 PRINCIPAUX PARADIS FISCAUX EN 2018

  • Suisse
  • États-Unis
  • Îles Caïmans
  • Hongkong
  • Singapour
  • Luxembourg
  • Allemagne
  • Taïwan
  • Émirats arabes unis
  • Guernesey

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