Les finances en solo

Par Nathalie Côté | 8 mai 2017 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Les célibataires de tous âges sont plus nombreux qu’avant et leur situation entraîne des besoins spécifiques. Comment adapter sa pratique à cette clientèle particulière?

« Ce n’est pas parce qu’on est deux que ça coûte deux fois plus cher, au contraire, remarque Guylaine Dufresne, directrice principale, investissement et planification financière, à la Banque Laurentienne. Le célibataire doit payer son loyer et son chauffage tout seul, par exemple. En vieillissant, les personnes célibataires ressentent souvent davantage d’insécurité. Elles se demandent qui prendra soin d’elles en cas de maladie, par exemple. »

De plus, les célibataires peuvent aussi avoir tendance à dépenser plus, en divertissement notamment, surtout quand ils n’ont aucun enfant à charge.

« Il est important pour eux de faire un budget et de le respecter afin de dégager un montant pour l’épargne, indique Hadi Ajab, planificateur financier au Centre financier Carrefour. Le conseiller peut inciter le célibataire à bien gérer ses finances personnelles en lui exposant des situations très réalistes. Par exemple, il est plus difficile d’accumuler une mise de fonds et obtenir une hypothèque pour acheter une maison lorsqu’on est seul. » Il doit donc être doublement vigilant.

PRÉVOIR LES COUPS DURS

La première tâche à laquelle les célibataires devraient s’atteler est la constitution d’un fonds d’urgence. « Ils sont plus vulnérables, car ils ne peuvent compter que sur un seul revenu, souligne M. Ajab. Personne d’autre ne peut les aider en cas de perte d’emploi, de réparation urgente, etc. » Pour la même raison, vous devriez vous assurer que vos clients qui ne sont pas en couple possèdent une bonne assurance invalidité.

Guylaine Dufresne

Guylaine Dufresne

Quant à l’assurance vie, elle est souvent jugée moins prioritaire chez un célibataire, car personne ne compte sur son revenu pour vivre. « Les assurances maladies graves et de soins de longue durée peuvent prendre davantage d’importance, car la personne ne peut pas compter sur un conjoint pour prendre soin d’elle », souligne Mme Dufresne.

D’ailleurs, vous devriez inciter votre client à réfléchir à son mandat d’inaptitude. Qui, dans son entourage, pourra s’occuper de ses soins et de ses biens, si nécessaire?

« Quand la personne devient inapte, c’est trop tard, note Martin Hébert, planificateur financier et directeur des ventes en assurance de personnes chez Lussier Dale Parizeau. Si rien n’a été prévu, le Curateur [pourrait devenir son représentant légal] . C’est peut-être moins ce qu’elle désirait quand elle était saine d’esprit. »

Le mandat de protection doit être rédigé lorsque la personne est apte, confirme le Curateur public. Si elle devient inapte sans avoir de mandat de protection, qu’elle est bien entourée et que ses biens sont faciles à gérer, ses proches peuvent prendre soin d’elle et de son patrimoine sans qu’il soit nécessaire d’ouvrir un régime de protection (tutelle ou curatelle).

Si un régime de protection doit être ouvert, une assemblée de parents et d’amis devra alors désigner un représentant légal. Ce n’est que si aucun proche de la personne inapte ne peut ou ne veut accepter cette charge que le Curateur public sera désigné représentant légal.

PRÉVOIR LA FIN DE LA VIE ACTIVE

Pour la retraite, le choix entre le CELI et le REER dépend notamment du revenu de la personne. Lorsqu’il est élevé, le REER permet une réduction d’impôt intéressante. Pour une personne avec peu de moyens, le CELI est souvent privilégié pour éviter que son revenu soit trop élevé à la retraite et qu’elle soit ainsi privée du Supplément de revenu garanti.

Ces deux outils sont particulièrement intéressants pour les célibataires en raison de leurs avantages fiscaux. Contrairement aux couples et aux familles, plusieurs crédits et déductions leur sont inaccessibles.

Certaines personnes seules peuvent se sentir plus vulnérables et être préoccupées par la gestion de leurs avoirs à la retraite. « Parfois, une rente viagère qui assure le paiement fixe des coûts de vie les rassure », souligne Guylaine Dufresne.

Martin Hébert

Martin Hébert

AU DÉCÈS

Votre client pourrait vouloir léguer ses biens à ses frères et sœurs ou ses neveux et nièces après son décès. Il pourrait toutefois préférer autre chose. « La personne peut désirer se diriger vers les dons planifiés pour redonner à la communauté et obtenir du même coup un avantage fiscal, suggère M. Hébert. C’est un produit qui pourrait être intéressant. »

Évidemment, il devrait aussi s’assurer d’avoir un testament pour inscrire ses dernières volontés.

Célibataire un jour…

Rien ne dit qu’un célibataire le restera pour toujours. L’inverse est aussi vrai pour les personnes en couple. Vous auriez intérêt à envisager ces cas de figure avec vos clients, estiment plusieurs intervenants.

« Mieux vaut se préparer, croit M. Hébert. Le client peut ne pas vouloir d’assurance vie pour protéger son prêt hypothécaire en se disant que s’il meurt, ça ne sera pas grave. Mais s’il a un conjoint dans quelques années, il faudra le protéger. Comme la personne va être plus vieille, ça va lui coûter plus cher. »

Souscrire une assurance à un plus jeune âge permet non seulement à votre client d’économiser, mais aussi de protéger son assurabilité. Ainsi, il pourra éventuellement augmenter sa couverture jusqu’à un certain montant prévu au contrat sans devoir fournir de preuves sur sa santé. Il ne sera pas pénalisé s’il développe une maladie ou de mauvaises habitudes de vie après la signature du contrat.

Vous auriez aussi avantage à expliquer aux couples quelle serait leur situation advenant une séparation, recommande Mme Dufresne.

Le célibat en chiffres

Le Québec comptait 3,3 millions de célibataires l’an dernier, soit 1,8 million d’hommes et 1,5 million de femmes, selon Statistique Canada. Et ces chiffres n’incluent pas les personnes séparées et divorcées!

Les personnes seules au Québec avaient un revenu médian de 20 400 $ en 2014. En comparaison, il était de 79 980 $ pour les familles comptant un couple. Il faut dire que plusieurs jeunes, qui ont un revenu moins élevé, sont célibataires et que dans la majorité des couples, les deux membres travaillent.

Les dépenses de consommation courante ont totalisé 35 816 $ en 2015 pour les Canadiens vivant seuls contre 60 516 $ pour l’ensemble des ménages. Leurs paiements moyens pour des assurances individuelles et les cotisations à des régimes de retraite se sont élevés à 2126 $. En comparaison, ils étaient de 4880 $ pour tous les types de ménages confondus.

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Nathalie Côté