Les Panama Papers, un an plus tard

Par La rédaction | 5 avril 2017 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Un an après la publication des Panama Papers par plus d’une centaine de médias membres du Consortium international des journalistes d’investigation, les conséquences de ce scandale d’ampleur mondiale sont multiples, rapporte Le Monde.

Ce dernier rappelle que les révélations contenues dans les quelque 11,5 millions de fichiers provenant des archives du cabinet panaméen Mossack Fonseca, spécialisé dans la domiciliation de sociétés offshore, ont éclaboussé de nombreuses institutions financières et personnalités partout sur la planète, dont des chefs d’État, des milliardaires ainsi des grands noms du sport ou du spectacle.

Le quotidien français estime néanmoins que les retombées des Panama Papers demeurent pour l’instant modestes, même si elles ont contribué à donner « un important coup d’accélérateur » à la lutte contre le blanchiment d’argent. En effet, insiste-t-il, aucun dirigeant de premier plan ni aucune compagnie impliquée dans ce dossier n’ont jamais véritablement été inquiétés.

UN SEUL DIRIGEANT A DÉMISSIONNÉ

Ainsi, sur les six chefs d’État ou de gouvernement en activité visés par le scandale, un seul, le premier ministre islandais Sigmundur David Gunnlaugsson, a dû démissionner à la suite d’une série de manifestations populaires dans les rues de la capitale, Reykjavik. Mais Le Monde souligne que celui-ci a été remplacé par son ministre des finances, le conservateur Bjarni Benediktsson, également cité dans les Panama Papers… Quant à l’ex-premier ministre, il est tout simplement redevenu député.

De son côté, le président argentin Mauricio Macri fait l’objet d’une instruction judiciaire ouverte après le dépôt d’une plainte par un membre de l’opposition à propos, notamment, de la valeur réelle de son patrimoine. Mais cela ne l’a pas empêché de demeurer en fonction. De même, les autres dirigeants mondiaux mouillés dans le scandale, comme le roi Salmane d’Arabie saoudite, Khalifa ben Zayed Al-Nahyane aux Émirats arabes unis, Petro Porochenko en Ukraine et Michael Turnbull en Australie, s’en sont sortis sans conséquences.

Sur le Vieux Continent, les retombées de l’affaire sont un peu plus tangibles, relève Le Monde, puisque dès le mois de juin 2016, le Parlement européen a instauré une commission d’enquête composée de 65 membres pour passer au crible les révélations contenues dans les Panama Papers. Son rapport, qui devrait être rendu « d’ici à juin » portera sur « de possibles infractions de la législation européenne en matière de blanchiment d’argent et d’évasion fiscale », ce qui permettra à la Commission européenne de se pencher sur « les failles actuelles de la lutte anti-paradis fiscaux », précise le journal français.

LE CANADA, NOUVEL ELDORADO FISCAL?

Enfin, en France, les trois grandes banques de l’Hexagone impliquées dans le scandale, la Société générale, le Crédit agricole et BNP Paribas, ont été convoquées par le ministre des Finances, Michel Sapin, à qui elles ont promis de « faire la transparence sur leurs activités offshore ».

La divulgation des Panama Papers a par ailleurs eu comme conséquence inattendue de montrer que le Canada est loin d’être exempt de tout reproche, au point qu’il semble être devenu une destination de choix pour les riches investisseurs étrangers désireux de créer des sociétés-écrans, comme l’a dévoilé une récente enquête menée conjointement par le Toronto Star et CBC-Radio-Canada. En effet, « la fiscalité avantageuse proposée par différentes provinces, l’opacité juridique et fiscale, et la bonne réputation à l’international du voisin des États-Unis font que bon nombre de cabinets spécialisés proposent d’y créer des compagnies offshore », écrit même Le Monde, qui reprend l’opinion d’un cabinet suisse selon lequel « le Canada est un nouveau joueur dans le monde des sociétés-écrans ».

Enfin, au pays par qui le scandale est arrivé, les Panama Papers ont également eu diverses retombées. Réintégré dès le printemps 2016 dans la liste noire établie par la France et d’autres pays européens des « États et territoires non coopératifs », le Panama se bat depuis lors pour ne pas figurer sur la future liste noire mondiale des paradis fiscaux, qui sera dévoilée lors du sommet du G20 de Hambourg, en Allemagne, au mois de juillet.

MOSSACK ET FONSECA SONT EN PRISON

Quant au principal protagoniste, le cabinet Mossack Fonseca, il semble qu’il ait du plomb dans l’aile et, en l’espace de quelques mois, il a renvoyé 250 employés et fermé une dizaine de succursales sur les 40 dont il disposait dans le monde, notamment celles qui étaient installées en Nouvelle-Zélande, au Luxembourg, dans les territoires britanniques de Jersey, de Gibraltar et de l’île de Man, ainsi qu’en Suisse et au Nevada, aux États-Unis.

Toutefois, si les deux fondateurs de la firme, Jürgen Mossack et Ramon Fonseca, dorment aujourd’hui en prison, ce n’est pas pour avoir favorisé l’immatriculation de 212 000 sociétés-écrans dans des paradis fiscaux opaques, mais à la suite de l’opération « Lava Jato » visant une autre affaire de corruption, cette fois autour du groupe brésilien Petrobras.

Conclusion du Monde : un an après la divulgation des Panama Papers, « la pression internationale sur les États et les territoires non coopératifs est telle qu’elle fait progresser la régulation comme jamais jusqu’ici ». En effet, « pour éviter le fichage sur liste noire et la mise au ban de leur économie, les dernières places fortes du secret bancaire tombent une à une; jusqu’au Panama, qui vient lui aussi de signer l’accord sur l’échange automatique de données financières entre États, l’outil le plus efficace pour enrayer la fraude et l’évasion fiscales ».

La rédaction