Les Québécois adoptent des comportements financiers plus avisés

Par Pierre-Luc Trudel | 4 mai 2016 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Les Québécois sont encore loin d’être des modèles en matière de saine gestion de leurs finances personnelles, mais la situation s’améliore tranquillement, révèlent les plus récents résultats de l’Indice Autorité dévoilés hier.

Dans le cadre de ce sondage, qui est en à sa troisième édition, l’Autorité des marchés financiers (AMF) a demandé à 1 500 individus responsables de la gestion financière de leur ménage de juger de la pertinence de 40 comportements financiers dits avisés et à mentionner s’ils les ont adoptés ou non.

Résultats? Les bons comportements en matière financière ont été épousés par 61,2 % des répondants. À titre comparatif, l’indice avait atteint 58,5 % en 2012 et 60,1 % en 2014. « Il s’agit d’une progression statistiquement significative », a soutenu Camille Beaudoin, directeur de l’éducation financière à l’AMF lors de la 7e édition de la Journée éducation financière de l’organisme de réglementation.

Une nette différence a cependant été constatée entre les individus qui ont recours aux services d’un représentant en services financiers (64,1 %) et ceux qui gèrent leurs finances sans conseils professionnels (52,3 %).

AVISÉS, AMBIVALENTS OU INDIFFÉRENTS?

L’Indice permet de dégager trois profils d’individus selon l’approche qu’ils adoptent face à la gestion de leurs finances.

Les avisés, qui constituent 58 % des répondants, comprennent l’importance d’avoir de bons comportements financiers et les appliquent dans leur vie quotidienne. Ce sont eux qui sont les plus susceptibles d’avoir recours aux services d’un conseiller en services financiers.

Les ambivalents, qui représentent 33 % des répondants, comprennent également l’importance d’adopter de bons comportements financiers, mais ne s’y sont pas vraiment convertis. Ils ont aussi plus tendance à consulter leur entourage qu’un professionnel pour les aider à prendre des décisions financières.

Les indifférents (9 %) sont finalement peu intéressés par la gestion de leurs finances personnelles et se fient généralement à eux-mêmes pour prendre des décisions financières. « En 2012, 20 % des répondants étaient des indifférents, c’est une nette progression », a cependant souligné Camille Beaudoin.

MALAISE FACE AUX PLACEMENTS

Parmi toutes les préoccupations en lien avec la gestion des finances personnelles, c’est la question des placements qui hante le plus les Québécois. La moitié des répondants (49 %) affirment qu’il s’agit de l’aspect avec lequel ils sont le moins à l’aise. D’ailleurs, à peine le tiers d’entre eux vérifient périodiquement leur profil d’investisseurs et seulement la moitié croient que la documentation accompagnant leurs placements pourrait leur être utile.

Une telle méconnaissance de l’univers des placements fait en sorte que seulement 6 % des répondants indiquent avoir un profil d’investisseur audacieux. « C’est une statistique plutôt inquiétante quand l’on sait que les épargnants doivent combattre l’inflation pour atteindre leurs objectifs d’épargne », a commenté Camille Beaudoin.

Si les Québécois sont loin d’avoir maîtrisé toutes les subtilités de la gestion de leurs finances personnelles, 67 % d’entre eux souhaitent en revanche accroître leurs connaissances dans ce domaine. Une bonne nouvelle quand on sait qu’à l’heure actuelle, les Québécois sont plus à l’aise de parler de leurs problèmes de santé avec un médecin que de leurs problèmes financiers avec un conseiller!

UN CLIMAT PROPICE À L’ENDETTEMENT

Accroître ses connaissances en matière de finances personnelles semble une bonne idée lorsqu’on constate que le climat actuel est particulièrement propice à l’endettement des ménages. La précarité du marché de l’emploi et l’environnement de bas taux d’intérêt y contribuent activement, a expliqué l’économiste en chef de l’AMF, Mario Houle, lors de la même conférence.

Le ratio dette/revenu des ménages québécois a considérablement augmenté au cours des dernières années pour se situer à environ 155 % aujourd’hui. On ne doit toutefois pas se baser uniquement sur cette statistique pour juger de la situation financière globale des Québécois, prévient Mario Houle.

Sur la même période, le ratio patrimoine financier/revenu des ménages a doublé, passant de 400 à 800 %. Sans surprise, une grande part de ce patrimoine est constituée d’actifs immobiliers.

Grâce à la baisse constante des taux d’intérêt, le service de la dette des ménages a également pu se stabiliser, et ce, malgré l’importante hausse du prix des propriétés. Il se situe aujourd’hui à environ 14 % du revenu disponible, contre 12 % en 1991.

« Les paiements d’intérêts sont beaucoup moins lourds, une plus grande part du paiement des dettes est allouée au remboursement du capital », a expliqué Mario Houle.

La situation est tout de même très préoccupante pour les ménages hautement endettés (ratio dette/revenu de plus de 350 %). Depuis le début des années 2000, ceux-ci détiennent une part de plus en plus importante du total des dettes de ménages au Canada. Ils sont généralement jeunes, ont un faible patrimoine financier, un revenu inférieur à la médiane et ont tendance à être moins instruits.

« Ils sont beaucoup plus à risque de se trouver dans une situation financière précaire, d’être au chômage et d’avoir de la difficulté à se trouver un autre emploi. Ce sont ces ménages qu’il faut cibler dans nos efforts d’éducation », a affirmé Mario Houle.

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Pierre-Luc Trudel