Loi 188 : gare à l’étouffement administratif!

Par Jean Dupriez | 22 avril 2016 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Saksan Maneechay / 123RF

« Summum ius, summa iniuria », disait Cicéron à l’époque de Jules César. Traduction : l’application excessive du droit conduit à l’injustice.

Dans un billet précédent, je dénonçais les textes alambiqués et incompréhensibles de nos législateurs. J’en critiquais la piètre qualité. Aujourd’hui, je vais parler de leur quantité, et de leurs contradictions meurtrières.

Je lisais récemment dans une chronique de Lise Ravary la honte de notre société frappée de règlementite aigüe :

  • Des ambulanciers refusent de porter secours à un motoneigiste accidenté et gravement blessé, car un protocole ministériel stipule que leur responsabilité s’arrête à la limite de la route. Un mort, un meurtre!
  • Un chirurgien n’a pas opéré un patient dans un état gravissime parce que de nouvelles règles administratives lui interdisaient de le faire à cet endroit. Un autre mort, un autre meurtre!

Deux morts pour le protocole! Vous me direz que, dans les services financiers, la règlementite aigüe ne tue pas. En êtes-vous certain?

La procédure au service de quels intérêts?

Lorsque j’étudiais en droit à l’Université de Montréal (diplômé en 1961), mon professeur de procédure civile nous enseignait que la procédure est un outil au service du droit, une aide à l’application de la Loi. Un demi-siècle plus tard, la situation s’est inversée : nos législateurs ont pondu des logorrhées, des torrents, des fleuves de textes de lois, de règlements, de codes de déontologie ou d’éthique pleins de contradictions qui font le bonheur des avocats.

Montesquieu doit se retourner dans sa tombe et se demander pourquoi il a écrit De l’esprit des lois. La procédure n’est plus au service de la loi ; c’est la loi qui est au service de la procédure! Est-il besoin de mentionner à qui ce crime profite? La judiciarisation a dépassé les limites de la raison et de l’humanité.

Obsolescence programmée

Les autorités réalisent qu’il y a un problème et révisent la loi 188. Une fois de plus, elles vont nous proposer – nous imposer – de nouvelles règlementations. Ces dernières nous offriront un luxe de détails et de précisions qui les condamneront à une obsolescence quasi-immédiate de par leur difficulté d’application et leurs contradictions. Elles oublieront l’essentiel : la dimension humaine et subjective.

Messieurs les législateurs, relisez donc Montesquieu avant que le poids de vos trop nombreux textes meurtriers ne cause, parmi les conseillers en services financiers, quelque mort par étouffement administratif. Il ne sera même pas mort pour la Patrie et restera le soldat inconnu.

Cinq main qui placent des roues crantées les unes contre les autres sur un fonds bleu clair.

Jean Dupriez

Jean Dupriez, LL.L., DAE., Pl.fin. (ex Adm.A., ex PFA., ex GPP., ex détenteur de permis en épargne collective, en assurance de personne et en assurance collective), mais heureusement toujours marié avec Françoise depuis 57 années!) possède une formation internationale en Droit (UdeM) ainsi qu’en Financement et Administration d’entreprises (London School of Economics + Louvain). Il est planificateur financier et membre de l’association des MBA du Québec. Après 20 années dans le commerce international au sein de grandes compagnies, son goût pour l’indépendance l’a incité, en 1984, à se lancer dans une seconde carrière, plus sédentaire, dans les services financiers personnels, dont 20 ans associé au Groupe Peak. En juin 2002, il publie «Le classement des documents personnels» et en 2010 «Savoir choisir son conseiller financier». Depuis 2013, dans une semi-retraite active, il se consacre à la création de diverses formations. Vers 2015, il met en ligne sa 3e œuvre : «Comprendre l’investissement», une formation illustrée à la fois technique et comportementale destinée au grand public et aux conseillers financiers. Actuellement, il offre aux conseillers et planificateurs financiers 2 formations en ligne, dûment accréditées de plusieurs UFC (CSF et IQPF) sur le site de Campus finance. Voici le lien pour les atteindre.