Marchés émergents : la diversification est essentielle

Par Atul Tiwari | 26 février 2013 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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L’idée semble judicieuse : sélectionnez un marché émergent qui selon vous a du potentiel puis, pour optimiser votre investissement, achetez des parts d’un FNB axé sur un pays au sein de cette région émergente, et il ne vous reste plus qu’à encaisser les profits!

Seulement voilà, il y a un problème. Investir dans un seul marché émergent comporte des risques considérables.

La fourchette des rendements annuels des pays composant l’indice Marchés émergents MSCI entre 1988 et 2010 (voir tableau ci-dessous) en dit long sur ces risques. Un investisseur qui aurait choisi avec succès les pays les plus performants aurait certes généré un rendement passablement supérieur à celui du marché mondial dans son ensemble, mais le contraste aurait été saisissant s’il avait plutôt misé sur des pays qui ont eu moins de chance.

Effectivement, on constate souvent un profond écart entre les pays émergents gagnants et ceux qui tirent de l’arrière. Par exemple, à la fin de 2010, deux pays de l’indice marchés émergents MSCI offraient des portraits bien différents : la Thaïlande affichait une croissance de 50 %, alors que la Pologne terminait en baisse de 10 %. Une telle disparité peut provoquer une volatilité notable au sein des portefeuilles axés sur des pays précis.

Large fourchette de rendements Variation substantielle des rendements des pays émergents individuels.

Choisir le bon pays n’est pas sans difficulté Il peut s’avérer beaucoup moins efficace de sélectionner un à un des pays émergents que d’investir dans un indice boursier élargi. Les titres boursiers d’entreprises établies dans des pays individuels sont généralement plus volatiles, sans pour autant récompenser les investisseurs en leur versant des rendements plus intéressants. Entre 1993 et 2010, l’indice Marchés émergents MSCI a généré une combinaison de risque et de rendement qui a surpassé le rendement ajusté au risque de la plupart de ses composantes. Même si cinq pays ont inscrit des rendements ajustés au risque proportionnellement plus élevés, seul le Chili jouissait d’une volatilité inférieure à celle du marché élargi (voir le tableau ci-dessous).

Un indice boursier élargi axé sur les marchés émergents est avantageux sur les plans du risque et du rendement Lien entre le rendement et la volatilité des pays individuels composant l’indice marchés émergents MSCI entre 1993 et 2010.

Pour profiter de cette volatilité moyenne plus faible, il aurait fallu investir au Chili pendant toute la période, sans toucher aux répartitions. Alors, peut-on sélectionner à l’avance les pays qui offriront de solides rendements ajustés au risque, puis y investir en procédant à une répartition stratégique couvrant à la fois les bons et les mauvais marchés? Pour répondre à cette question, examinons comment les investisseurs évaluent les occasions qui se présentent sur le marché boursier.

Mesures fréquentes du marché des actions La valorisation et le taux de croissance économique sont deux mesures souvent utilisées dans le secteur boursier. Cependant, nos recherches démontrent que ces mesures ne réussissent pas toujours à cibler les occasions d’investissement dans les marchés émergents.

En réalité, il n’existe aucune corrélation entre le rendement économique réel et le rendement des marchés émergents. La corrélation entre une croissance économique de longue haleine (soit la croissance réelle du PIB par personne) et le rendement des actions à long terme est nulle. Un défi se pose donc : même si la croissance économique est un incontournable pour les investisseurs en actions, ces derniers ne sont pas nécessairement récompensés pour avoir motivé leur décision sur une croissance anticipée, qui est donc déjà reflétée dans les cours fixés sur les marchés boursiers. De plus, puisque le surrendement est davantage fonction d’une croissance inattendue, les investisseurs doivent être en mesure d’anticiper celle-ci avec exactitude, ce qui, avouons-le, n’est pas une mince affaire.

Même si les valorisations ont joué un rôle important dans l’estimation du rendement futur des marchés développés (comme le Canada), le lien entre les ratios cours/bénéfices initiaux et les rendements subséquents s’effritte lorsqu’on l’applique à des marchés émergents individuels. Il saute aux yeux que les faibles ratios cours/bénéfice initiaux ne se sont pas traduits par de meilleurs rendements subséquents et, à l’inverse, que des ratios cours/bénéfice élevés à l’origine n’ont pas été synonymes de maigres rendements subséquents.

Le risque idiosyncrasique, c’est-à-dire le risque propre à chaque pays, est la principale différence entre les divers pays émergents sur le plan du lien entre la valorisation et le rendement. Par exemple, entre décembre 2004 et octobre 2006, le marché boursier du Vénézuela était évalué à moins de 10 fois les bénéfices. Par le passé, une valorisation aussi modeste aurait été un bon indicateur d’un rendement futur supérieur à la moyenne d’un marché diversifié et développé comme le Canada.

Les ratios de valorisation des marchés émergents peuvent cependant être modestes puisque l’on s’attend à une croissance plus lente des bénéfices. Dans le cas du Vénézuela, les risques géopolitiques endémiques et la saisie par l’État d’actifs privés et de capitaux étrangers ont mené à son expulsion de l’univers de l’investissement public, une mesure qui a réduit à néant tout avantage potentiel lié à son cours/bénéfices intéressant.

La diversification est la clé Ces éléments probants laissent entendre qu’il est difficile, voire impossible, de viser juste et de choisir un marché émergent qui inscrira un rendement supérieur. Dans les pires des cas, les investisseurs et conseillers peuvent s’exposer à une volatilité marquée, à des coûts accrus, à un rendement inférieur, ainsi qu’à des risques sans lien avec le marché. En effet, comme pour la plupart des catégories d’actifs ou stratégies non diversifiées et volatiles, le risque de se tromper l’emporte parfois largement sur les avantages potentiels recherchés.

Le message est limpide : au moment de donner des conseils sur les marchés émergents à vos clients, n’oubliez pas que la diversification est un élément décisif. Les FNB à marché élargi ont fait leurs preuves et s’avèrent l’outil le plus fiable pour optimiser les chances de succès des investisseurs dans ce secteur.


Atul Tiwari est directeur général de Placements Vanguard Canada Inc.

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