Négociation à haute vitesse : la justice enquête aux États-Unis

Par Rémi Maillard | 11 avril 2014 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Le département américain de la Justice a lancé une vaste enquête la semaine dernière sur le courtage à haute fréquence, rapporte l’Agence France-Presse (AFP).

« Dans le secteur financier, des inquiétudes ont été émises récemment sur une pratique appelée “courtage à haute fréquence” », utilisant des algorithmes informatiques complexes et des réseaux ultrarapides pour réaliser des transactions parfois en quelques millisecondes, a déclaré le ministre de la Justice, Eric Holder devant une sous-commission de la Chambre des représentants.

« Nous enquêtons sur cette pratique pour déterminer si elle viole les lois sur les délits d’initiés », a-t-il ajouté.

Pas illégal, mais… Rendu possible par les avancées technologiques de ces dernières années, le courtage à haute fréquence, également appelé « négociation à haute vitesse », n’est pas en soi illégal, même s’il suscite beaucoup de controverses.

La polémique a été relancée au début du mois par la sortie du livre Flash Boys, du journaliste Michael Lewis. Celui-ci soutient que les échanges sont manipulés au profit des courtiers à haute fréquence, qui bénéficient d’un avantage en matière de temps sur les investisseurs n’ayant pas accès à ces techniques sophistiquées (et très coûteuses).

Le FBI enquête déjà depuis un certain temps sur le courtage à haute fréquence à Wall Street.

Selon l’AFP, les enquêteurs cherchent en particulier à savoir si de possibles violations de la réglementation boursière, fraudes informatiques ou délits d’initiés ont été commis par des entreprises ou des individus spécialisés dans cette pratique.

Le département de la Justice de l’État de New York s’est également saisi de ce dossier et a ouvert une enquête officielle en mars dernier.

L’OCRCVM se dit vigilant

Au pays, l’Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières (OCRCVM) se dit vigilant par rapport à ce genre de pratiques.

« Nous suivons de près les changements rapides qui s’opèrent dans la négociation sur les marchés boursiers et nous investissons dans la technologie pour assurer leur surveillance », explique Carmen Crépin, sa vice-présidente pour le Québec.

Ainsi, l’OCRCVM a publié l’an dernier une note décrivant cinq stratégies de négociation qui font appel à des systèmes automatisés d’acheminement des ordres ou qui impliquent un accès électronique direct au marché.

Des stratégies que l’organisme considère comme « manipulatrices ou trompeuses ».

« Même si elles sont souvent associées à la négociation à haute vitesse, de telles activités sont interdites, peu importe qu’elles soient réalisées manuellement ou par voie électronique. Nous avons créé des alertes pour les détecter et nous effectuons une surveillance active pour repérer ces contraventions aux règles », affirme Carmen Crépin.

Conscient des défis que les nouvelles technologies représentent sur le plan réglementaire, l’OCRCVM a lancé en 2012 une étude sur la négociation à haute vitesse.

« Nous amorçons aujourd’hui la troisième et dernière phase de cette étude, qui concerne l’analyse d’impact. Cela nous aidera à élaborer de nouvelles politiques ou à préparer nos interventions futures », précise-t-elle.

Les outils dont dispose l’OCRCVM

  • La plateforme d’enrichissement des technologies de surveillance, ou système STEP. « Ce système, lancé en 2010, nous permet de surveiller en temps réel les opérations qui sont effectuées sur l’ensemble des marchés boursiers au Canada », explique Carmen Crépin.
  • Un « entrepôt de données des titres de capitaux propres », qui permet d’extraire et d’analyser les données de négociation passées afin d’en repérer les grandes tendances. L’OCRCVM a lancé cet outil en 2013, en complément du système STEP.
  • L’organisme a également instauré un système de coupe-circuits, de nouveaux contrôles du risque à effectuer par les courtiers avant l’exécution des opérations et, plus récemment, des propositions de seuils de cours pour les marchés.

Autant d’initiatives qui visent « à atténuer la volatilité et à raffermir la confiance dans l’intégrité des marchés », selon Carmen Crépin.

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Rémi Maillard

Journaliste multimédia. Santé, environnement, société, finances personnelles. Également intéressé par les affaires publiques, les relations internationales, la culture… Passionné de cyclisme.