Penser placements alternatifs

Par Denis Méthot | 2 Décembre 2014 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Les placements alternatifs n’ont pas encore la cote des produits traditionnels en 2014, mais ils demeurent une option intéressante en raison de leur solidité et de leur résistance aux fluctuations. Ces derniers prendre plusieurs formes : terres agricoles et terres à bois, infrastructures directes, immobilier direct, placements directs, matières premières.

Selon un spécialiste qui a pris part au colloque Retraite et placements tenu à Québec, on a assisté ces dernières années à une évolution et une accessibilité des placements alternatifs parce que plusieurs de ces produits sont en croissance, que les barrières à l’entrée sont souvent moins contraignantes que pour certains autres placements et que les petits investisseurs sont désormais en mesure de reproduire les stratégies des grands fonds de placements en ce domaine.

Le choix du gestionnaire est extrêmement important dans les placements alternatifs, dit Alexandre Bernard, de Normandin-Beaudry. On privilégiera des gestionnaires qui parviennent à demeurer dans le premier quartile en raison de leur excellente connaissance de leur secteur.

Jean-François Tessier, directeur des ventes institutionnelles Gestion d’actifs à Manuvie. Photo : Denis Méthot

Les terres agricoles

Selon Jean-François Tessier, directeur général des ventes institutionnelles, Gestion d’actifs à Manuvie, la raréfaction à venir des aliments et des fibres ligneuses dans le monde devrait relever la valeur des terres agricoles et des terrains forestiers exploitables.

La valeur marchande des terres agricoles offrant des possibilités de placement est évaluée à mille milliards de dollars dans le monde. Pour l’instant, les investisseurs institutionnels n’en détiennent qu’une infime partie. La plus grande partie de cette immense tarte, 640 milliards, se trouve aux États-Unis. Le Brésil en possède pour 140 milliards, l’Argentine et l’Australie, 90 milliards, la Nouvelle-Zélande, le Chili et l’Uruguay, 30 milliards.

Malgré ses immenses terres agricoles, le Canada est un petit joueur dans cet immense marché, avec 10 milliards de dollars, d’abord à cause du climat et ensuite pour les barrières à l’acquisition de grandes terres destinées à l’agriculture, notamment dans les Prairies. En comparaison, le climat plus chaud et très varié aux États-Unis permet d’obtenir plusieurs types de cultures durant toute l’année et les freins à l’achat de terres destinées à l’agriculture sont moins grands qu’ici.

Les investisseurs répartissent les terres agricoles en deux catégories. Celles qui produisent des cultures annuelles sont souvent louées à des exploitants locaux. Elles présentent une faible volatilité. L’autre groupe offre des cultures pérennes, des pommes et des raisins, par exemple. Le profil risque-rendement est y considéré plus élevé que pour les culturelles annuelles.

Les terres agricoles offrent un solide rendement durant les périodes d’inflation. Ces dernières années, alors que le taux se situait à 1,9 %, elles produisaient un rendement de 9,6 %.

Les terres forestières

La valeur marchande des terrains forestiers exploitables est évaluée à 285 milliards de dollars. Le quart de ces étendues dans le monde appartient à des investisseurs institutionnels. Près de la moitié de ces terres se retrouvent dans le sud des États-Unis, 46 milliards dans l’Ouest américain, 55 milliards en Amérique du Sud et à peine 5 milliards au Canada. Le rendement des placements dans les terres à bois va varier selon le pays. Avec un portefeuille global, dit Jean-François Tessier, le rendement après inflation espéré au cours des prochaines années est d’un peu plus de 7 % avec un écart type de près de 10 %.

Les terres forestières exploitables présentent cependant trois risques : le premier est lié au prix du bois d’œuvre, le deuxième est en lien avec l’importance de la récolte, qui peut être affectée par les incendies, les maladies et la réglementation environnementale. Le troisième risque est de ne pas réaliser la valeur marchande projetée des terres le moment venu.

Jean-François Tessier a indiqué que les placements dans les terres agricoles ont dégagé des rendements élevés depuis 20 ans, avec une seule année négative, mais les investisseurs craignent actuellement la surchauffe du marché de ces terres et des terrains forestiers exploitables.

L’investissement en infrastructure

L’investissement en infrastructure représente une autre forme intéressante de placements alternatifs. Une infrastructure peut prendre la forme d’installations physiques, d’équipements et services nécessaires au bien-être public, hôpitaux, ponts, écoles, bâtiments institutionnels. Les infrastructures comprennent aussi les routes, les ponts, les systèmes de transport, la production, la transmission et la distribution d’électricité et autres sources d’énergie.

Les placements dans ce secteur ont beaucoup d’avantages, dit Dominic Chalifoux, vice-président et directeur principal opérations des actifs à Fiera Axum Infrastructures : elles offrent un flux de trésorerie prévisible à long terme, ont une faible corrélation avec les autres catégories d’actifs et représentent une excellente protection contre l’inflation. En 2013, des grands groupes institutionnels qui ont investi dans les infrastructures et les outils d’investissements de ce type au Canada ont obtenu des rendements variant entre 10,1 % et 14 %.

En raison de l’historique de sous-investissement dans les infrastructures, de l’utilisation croissante de ces équipements et de la négligence à les entretenir, les gouvernements devront dépenser des montants colossaux dans ce secteur. La firme américaine Booz Allen Hamilton estime à 41 trillions de dollars les dépenses qui devront être faites en infrastructures à travers le monde d’ici 2030. Les opportunités seront donc nombreuses pour les investisseurs.

Dossier Colloque Retraite et placements

Denis Méthot