PL 141 : le MÉDAC et les comptables entendus

Par La rédaction | 18 janvier 2018 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Le Mouvement d’éducation et de défense des actionnaires (MÉDAC), l’Ordre des comptables agréés du Québec (CPA) et le regroupement des cabinets de comptables ont pu faire part de leurs critiques sur le projet de loi 141, mardi, lors de la deuxième journée de consultations particulières.

Parmi les nombreuses recommandations du MÉDAC, on retrouve, comme pour d’autres organismes entendus ce jour-là, une certaine inquiétude face à l’encadrement de la distribution d’assurances par internet. Selon eux, cette pratique pourrait mener à des contrats invalides, des assurances inadéquates, trop coûteuses, voire multiples car le consommateur pourrait déjà être couvert par une autre assurance pour le risque en question.

« Le consommateur choisit un assureur uniquement en raison du prix offert sur internet », prévient le MÉDAC. De plus, le nombre de choix sur internet est bien trop élevé. Selon eux, le consommateur aurait besoin d’être guidé par un conseiller.

Le MÉDAC approuve l’élargissement de la couverture du Fonds d’indemnisation des services financiers (FISF). Il pense que cela permettra de mieux protéger les victimes de fraude. Il recommande toutefois que le FISF soit piloté et géré par un conseil d’administration indépendant. Il a même pris la peine de décomposer ce qui constituerait selon lui un conseil d’administration idéal où chaque groupe, l’AMF, les représentants et le public, serait représenté. Dans ses recommandations, le MÉDAC suggère également de développer le rôle de prévention et d’information du Fonds.

Le point qui a suscité le plus de réactions de la part du ministre et de l’opposition officielle est la position du MÉDAC sur l’abolition des deux chambres et leur intégration à l’AMF. « On va continuer dans l’AMF à offrir les mêmes services que les chambres apportent pour le moment. Quel est le gain dans cette intégration? » s’interroge Daniel Thouin, président du MÉDAC.

Si le MÉDAC ne s’oppose pas à cette intégration qui, selon eux, pourrait faciliter la compréhension par les épargnants et les consommateurs des mécanismes de réglementation, il émet quelques réserves. Il se demande si l’AMF n’est pas déjà une structure trop importante et craint que cette intégration permette de déléguer des responsabilités à l’OCRCVM.

Le MÉDAC aimerait que les organisations de la vie civile soient représentées dans la future AMF. « L’augmentation du pouvoir de l’AMF devrait s’accompagner d’une contrepartie en tant que citoyen », affirme Willie Gagnon, coordonnateur du MÉDAC.

LA POSITION DES COMPTABLES

Les deux derniers organismes entendus le 17 janvier dernier étaient l’Ordre des comptables agréés du Québec (CPA) et le regroupement des cabinets de comptables. Selon les deux groupes, le projet de loi 141 touche au fondement même de la profession de comptable.

« Le projet de loi 141 traduit une méconnaissance du rôle d’audit et de CPA, affirme Geneviève Mottard, président et chef de la direction de l’Ordre des CPA. Le législateur a perdu de vue la nature et l’importance de la contribution des CPA dans le maintien de la confiance du public à l’égard de l’information financière et de la saine gouvernance des entreprises. »

Le point le plus critiqué dans les deux dernières consultations particulières de la journée était celui concernant la dénonciation. Selon l’article 17.0.1 de la Loi sur l’encadrement du secteur financier, des renseignements protégés par le secret professionnel peuvent être communiqués à l’AMF pour dénoncer « tout manquement ». Comme Geneviève Mottard, plus tôt dans la soirée, Alain Côté, associé Deloitte du regroupement des cabinets de comptables, s’est attardé sur ce fait : « il n’y a pas d’encadrement sur la gravité du préjudice, sur les manques corrigés, ni sur comment cette information sera utilisée une fois divulguée », note-t-il.

La loi ne force pas à dénoncer, cependant, un professionnel pourrait juger plus prudent de le faire, pense-t-il. « Il y a un sérieux risque de dérapage », commente Geneviève Mottard. Selon elle, il faudrait plutôt parler de « dénonciation de qualité ». La présidente et chef de la direction de l’ordre des CPA souligne qu’aucun pays, ni le reste du Canada, ne possède une telle loi.

Dans le mémoire des CPA présenté à la commission, on peut lire : « L’ouverture à la dénonciation par un CPA à une autorité externe est limitée à des manquements dont la gravité est susceptible d’avoir un impact sur les états financiers ou sur la continuité de l’exploitation de l’entreprise et elle est clairement balisée. »

Martin Deschênes, associé directeur, conseils financiers, Raymond Chabot Grant Thornton du regroupement des cabinets de comptables, prévient qu’une telle disposition de loi risque d’isoler le Québec du reste du monde. « D’un point de vue économique, c’est très important d’avoir des normes harmonisées », affirme-t-il.

Carlos Leitao a tenté d’expliquer qu’il ne voulait pas de dérapages, mais bien trouver une solution pour faire évoluer les règles et trouver une façon d’être plus transparent. Il a même proposé de retravailler avec eux ces lois pour mieux les adapter aux besoins de la profession.

La rédaction