Clauses importantes dans un contrat de vente

1 janvier 2014 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Le traitement de ces éléments doit être prévu dans le contrat de vente, afin de bien définir les droits et obligations de chaque partie à leur égard.

Ces éléments vont bien au-delà de l’identification des biens faisant l’objet de la vente, du prix de vente et des modalités de paiement du prix. Parfois, les clauses du contrat traitant de ces éléments sont nécessaires pour la protection du vendeur alors que d’autres clauses visent plutôt à assurer celle de l’acheteur.

Dans cet article, nous allons présenter quelques-unes des clauses que nous considérons parmi les plus importantes dans le contexte d’une vente d’entreprise et particulièrement dans le cadre d’une transaction de vente et d’acquisition d’actions.

CLAUSES IMPORTANTES POUR L’ACHETEUR

1.1 REPRÉSENTATIONS ET GARANTIES

Lorsque l’acheteur procède à l’acquisition d’une entreprise en achetant les actions de la société qui l’exploite, il héritera de l’ensemble des éléments de l’actif et du passif de la société. De plus, parce que la société continue d’être responsable de ses agissements passés, l’acheteur assume cette responsabilité lorsqu’il achète les actions. Cette responsabilité pourrait inclure, notamment, des sommes d’impôt ou de taxes dont elle pourrait être redevable relativement à des exercices financiers antérieurs à la vente ou la responsabilité civile (contractuelle ou extracontractuelle) pour des biens vendus ou des services rendus par la société avant la vente des actions. L’acheteur assume donc un risque important lorsqu’il se porte acquéreur des actions, car ces responsabilités pourraient se manifester, que ce soit en la forme d’une cotisation fiscale, d’une poursuite judiciaire ou autrement, plusieurs années après la transaction.

C’est pour cette raison qu’il est primordial que le vendeur fasse des représentations à l’effet qu’aucune responsabilité de la sorte n’existe pour la société. Ces représentations devraient couvrir tous les aspects de l’activité de la société incluant, notamment, le respect de ses obligations fiscales, ses obligations en tant qu’employeur, ses obligations environnementales, les sûretés affectant ses biens et, de façon générale, sa situation financière y compris l’étendue de ses dettes existantes. Cette dernière représentation devrait en principe se rattacher à la situation financière qui sera décrite aux états financiers pour l’exercice financier qui se termine immédiatement avant la transaction d’acquisition.

Ainsi, le portrait de la société au moment de la vente sera dressé de façon définitive dans le contrat et les états financiers de clôture qui s’y rattachent. En effet, l’acheteur paie un prix donné pour les actions d’une société qui se trouve dans une situation financière donnée et toute responsabilité relative aux activités antérieures de la société qui aggrave cette situation financière, si elle avait été dévoilée au moment de l’acquisition, aurait eu un impact sur le prix que l’acheteur aurait payé pour les actions. Ainsi, s’il s’avérait qu’une responsabilité qui n’était pas stipulée au contrat était imputée à la société après la date de la transaction, c’est le vendeur qui en serait responsable, car ce serait contraire à ses représentations.

1.2 CLAUSE D’INDEMNISATION

La clause d’indemnisation est le pendant des représentations du vendeur. Elle prévoit l’obligation pour ce dernier d’indemniser l’acheteur pour toute responsabilité de la société relative à ses activités antérieures à l’acquisition qui n’a pas été dévoilée au moment de la vente, même si elle n’était pas connue du vendeur. De plus, elle donne au vendeur l’occasion de défendre la société contre les responsabilités que des tiers tentent de lui imputer.

Puisque les représentations et garanties du vendeur et la clause d’indemnisation assurent la protection de l’acheteur, il est parfois utile de rattacher des garanties à ces clauses. S’il y a un solde de prix de vente pour la transaction (soit une créance du vendeur en faveur de l’acheteur), cette garantie pourrait prendre la forme de la possibilité pour l’acheteur de retenir une portion de ce solde advenant une réclamation en vertu de la clause d’indemnisation, et ce, en attendant que la réclamation soit réglée. En l’absence d’un solde de prix de vente, une retenue sur le prix de vente entiercée auprès d’un dépositaire de confiance, par exemple l’avocat de l’acheteur, est une garantie souvent utilisée.

1.3 CLAUSES DE CONFIDENTIALITÉ, DE NON-CONCURRENCE ET DE NON-SOLLICITATION

Lorsqu’il fait l’acquisition d’une entreprise, l’acheteur veut s’assurer que l’actionnaire vendeur n’utilise pas ses connaissances dans le domaine d’activité de l’entreprise, l’information confidentielle qui la concerne et les contacts privilégiés qu’il a eus avec les clients, employés et fournisseurs de l’entreprise, au détriment de celle-ci.

En effet, souvent, le succès d’une entreprise est basé sur ces éléments et l’acheteur a tout intérêt à les protéger. Les clauses de confidentialité, de non-concurrence et de non-sollicitation sont le moyen d’obtenir cette protection.

Les obligations de confidentialité prévoient l’interdiction pour l’actionnaire vendeur d’utiliser personnellement ou au bénéfice de toute autre personne et de dévoiler à qui que ce soit les informations confidentielles qu’il détient au sujet de la société et son entreprise. Ces obligations sont parfois limitées dans le temps, mais rien n’empêche que la durée de ces obligations soit illimitée.

En ce qui concerne les obligations de non-concurrence et de non-sollicitation, elles prévoient quant à elles l’obligation pour l’actionnaire vendeur de s’abstenir d’être impliqué, que ce soit en tant qu’actionnaire, employé ou dirigeant, au sein d’une entreprise concurrente de l’entreprise acquise ou de solliciter ses employés, clients ou fournisseurs sans le consentement du vendeur. Les clauses de non-concurrence doivent cependant être limitées dans leur portée temporelle et géographique.

De fait, la jurisprudence est constante et veut que les clauses restrictives de cette nature ne puissent avoir pour effet d’empêcher un individu de gagner sa vie et, conséquemment, seulement une durée limitée raisonnable et un territoire restreint seront considérés comme valides. Dans le contexte d’une vente d’entreprise, étant donné que le vendeur reçoit un prix de vente, les limites sont moins exigeantes qu’en matière d’emploi. Ainsi, il n’est pas rare qu’une durée de cinq ans soit considérée comme valide. Juger si une clause restrictive est raisonnable ou non demeure toutefois une question de fait qui dépendra des circonstances précises de chaque cas.

CLAUSES D’IMPORTANCE POUR LE VENDEUR

2.1 SOLDE DE PRIX DE VENTE

Du côté du vendeur, le principal risque entourant une transaction de vente concerne le paiement du solde de prix de vente. En effet, lorsqu’il y a un solde de prix de vente, il est important que le vendeur obtienne, dans le contrat de vente, les garanties et protections nécessaires pour lui assurer le paiement de ce solde.

Les garanties que l’acheteur peut offrir au vendeur sont nombreuses et, souvent, il est possible d’obtenir une combinaison de celles-ci afin d’assurer une meilleure protection du vendeur. Voici quelques exemples de clauses de garantie ou de protection :

  • ■ L’octroi d’une hypothèque mobilière sur les actions vendues

Une hypothèque mobilière peut être avec ou sans dépossession. Dans le premier cas, l’acheteur dépose les certificats d’actions auprès d’un tiers de confiance, souvent l’avocat du vendeur ou de l’acheteur, de manière à faciliter l’exécution des recours hypothécaires advenant un défaut. Généralement, tant qu’il n’y a pas de défaut, le propriétaire des actions, soit l’acheteur, conserve le droit d’exercer le droit de vote rattaché aux actions et celui de recevoir les dividendes.

  • ■ L’octroi d’une hypothèque mobilière sur les actifs de la société acquise incluant les équipements et les comptes client

Ce type d’hypothèque est généralement sans dépossession, car la société a besoin de ses actifs pour exploiter son entreprise. Si l’acheteur a aussi obtenu un financement bancaire pour procéder à l’acquisition, il est fort probable que celle-ci ait déjà exigé une hypothèque sur les actifs de l’entreprise pour garantir son prêt de sorte que le vendeur sera généralement contraint d’accepter une hypothèque de deuxième rang.

      • ■ L’octroi d’un cautionnement personnel par les actionnaires de l’acheteur lorsque ce dernier est une personne morale

    </ul style= »list-style:none; »> Cette garantie est de très grande valeur, car le ou les individus qui sont derrière la société acquéreuse courent un risque personnel en mettant leurs biens personnels, par exemple leur résidence et leurs économies, à la disposition du vendeur advenant que l’acheteur fasse défaut de payer le solde de prix de vente. S’il est facile pour une société de se défaire de ses obligations lorsque les choses vont mal en déclarant faillite, il est plus difficile pour un individu d’en faire autant.

      • ■ L’obligation pour l’acheteur de soumettre au vendeur les états financiers intérimaires et annuels de la société

Ceci permet au vendeur de surveiller la santé financière de la société, qui est souvent la principale source de revenus de l’acheteur lui permettant de payer sa dette envers le vendeur. L’obligation pour l’acheteur, lorsque celui-ci est une personne morale, de ne pas verser de dividendes à ses actionnaires sans l’autorisation préalable du vendeur Une telle obligation vise à assurer que le vendeur soit payé avant que les actionnaires de la société acquéreuse puissent commencer à bénéficier des revenus générés par la société.

Dans tous les cas, il est également primordial de prévoir qu’en cas de défaut par l’acheteur, il perdra le bénéfice du délai de paiement accordé et la totalité du solde deviendra alors immédiatement due et exigible. Il est également important de bien définir les cas qui constitueront des défauts. Ces cas incluraient notamment le défaut de payer entièrement ou en partie le solde du prix de vente à échéance et une situation d’insolvabilité ou de faillite de l’acheteur, mais pourraient également prévoir la vente de l’entreprise, sous forme d’une vente d’actions ou de vente d’actifs. En effet, si de son côté l’acheteur vend l’entreprise, encaissant ainsi à son tour un prix de vente, il est juste et logique que le vendeur se fasse payer à ce moment tout solde que l’acheteur lui doit.

2.2 LIBÉRATION DES ENDOSSEMENTS DU VENDEUR

Il n’est pas inhabituel de voir que le vendeur, lorsqu’il était toujours propriétaire des actions de la société faisant l’objet de la transaction de vente, ait donné aux créanciers de la société des garanties personnelles relativement aux sommes que la société pourrait leur devoir. C’est généralement vrai pour les institutions financières qui ont prêté des fonds à la société. Ce pourrait également être le cas pour certains fournisseurs de la société, par exemple le locateur des lieux occupés par la société. Par ailleurs, il n’est pas inhabituel non plus, pour un actionnaire, d’avoir donné une telle garantie sans trop s’en rendre compte, en signant des documents qu’il n’a pas pris le temps de lire et de comprendre. Une fois que les cautionnements ou garanties sont donnés, le consentement du créancier est nécessaire afin de dégager la caution de sa responsabilité à cet égard, et ce, même s’il a vendu ses actions.

Le vendeur devrait faire son possible pour obtenir de la part des créanciers sa libération pour tout endossement, cautionnement ou autre garantie personnelle qu’il a pu donner relativement aux activités de la société avant de procéder à la transaction de vente. En effet, il ne voudra plus être responsable personnellement des dettes d’une société qu’il ne contrôle plus. Cependant, il n’est pas toujours possible d’obtenir toutes ces libérations à temps et parfois la libération n’est pas obtenue par simple oubli, notamment lorsque le vendeur oublie qu’il avait donné le cautionnement ou encore advenant le cas où le cautionnement a été donné à son insu.

Une des clauses essentielles dans tout contrat de vente pour le vendeur est donc l’obligation, pour l’acheteur, d’obtenir ou de collaborer avec le vendeur pour l’obtention de toutes les libérations qui n’ont pas encore été obtenues. De plus, la clause pourrait également prévoir l’obligation pour l’acheteur d’indemniser le vendeur pour toute somme qu’il peut être appelé à payer en vertu des garanties personnelles qu’il a données à l’égard de la société. Cette obligation de l’acheteur pourrait également être garantie personnellement par les actionnaires de l’acheteur.

CONCLUSION

Nous avons présenté dans cet article une sélection des éléments essentiels d’un contrat de vente d’actions. Notre exposé n’est toutefois pas exhaustif. En effet, il peut y avoir autant de combinaisons de clauses importantes qu’il y a de transactions de vente et d’acquisition. Le seul élément clé dans toute transaction est donc pour chacune des parties de se faire accompagner par les conseillers juridiques qui sauront définir les clauses essentielles pour elle.

DEUX QUESTIONS que le conseiller en sécurité financière devrait poser à son client :

1 À la suite de l’achat des actions, existe-t-il, pour les actionnaires actuels, un risque de responsabilité civile (contractuelle ou extracontractuelle) antérieur à l’achat desdites actions, suffisamment important pour devoir les protéger en cas de décès ? De maladie grave ?

2 Est-il pertinent pour l’acheteur d’ajouter comme garantie à la clause d’indemnisation du vendeur une assurance sur la vie dudit vendeur et dont la société acquise serait titulaire et bénéficiaire ?

Jean-Guy Grenier, BAA, CMC, Adm.A., Pl. Fin., directeur régional – Elite, Développement et Mise en marché, Assurance et Épargne pour les particuliers, Desjardins Sécurité financière, Montréal.

Me Alain Ménard

Me Katia Sebastiani

Me Alain Ménard, M.B.A., avocat, responsable du comité professionnel Fiscalité, et Me Katia Sebastiani, avocate, Cain Lamarre Casgrain Wells s.e.n.c.r.l.


• Ce texte est paru dans l’édition de janvier 2014 de Conseiller