Entreprise de placement déterminé et entreprise de prestation de service personnel

Par Michel Lavoie | 1 juin 2013 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Pour faire suite à l’article publié en avril [Imposition des sociétés par actions : comment s’y retrouver ?], nous discutons ce mois-ci de deux concepts fiscaux : l’entreprise de placement déterminé (EPD) et l’entreprise de prestation de service personnel (EPSP).

EPD

Une EPD est une entreprise dont le but principal est de tirer un revenu de biens, notamment des intérêts, des dividendes, des loyers de biens immobiliers, des redevances, etc. Sont exclues de cette définition les entreprises exploitées par une caisse de crédit et les entreprises de location de biens autres que des biens immeubles.

Par ailleurs, sauf dans le cas où la société est une société à capital de risque de travailleurs visée par règlement au cours de l’année, l’entreprise exploitée par une société au cours d’une année d’imposition n’est pas une EPD si, selon le cas :

  • La société emploie dans l’entreprise, tout au long de l’année, plus de cinq employés à plein temps;
  • Une autre société associée à la société précitée fournit à cette dernière, dans le cadre de l’exploitation active d’une entreprise, des services de gestion ou d’administration, des services financiers, des services d’entretien ou d’autres services semblables. Et s’il est raisonnable de considérer que la société qui bénéficie de ces services aurait eu besoin d’employer plus de cinq personnes à temps plein dans l’entreprise si les services en question ne lui avaient pas ainsi été fournis.

Considération pratique : Toute planification de transfert de biens qui génèrent du revenu de placement dans une société par actions sera, sauf exception, couverte par cette règle et les revenus nets seront imposés à un taux de 46,57 % plutôt qu’à un taux de 19,00 % sur la première tranche de 500 000 $.

EPSP

Pour être qualifié d’EPSP, il faut que la société exploite une entreprise de fourniture de services et que les conditions suivantes soient satisfaites :

  • Un particulier, appelé « employé constitué en société », fournit des services à une autre personne ou société de personnes (ci-après « entité »), pour le compte de la société. De plus, il serait raisonnable de le considérer comme un cadre ou un employé de l’entité, si ce n’était de l’existence de la société;
  • L’employé constitué en société ou une personne qui lui est liée est un actionnaire déterminé de la société (un contribuable qui, directement ou indirectement, à un moment donné de l’année, possède au moins 10 % des actions émises d’une catégorie donnée du capital-actions de la société ou de toute autre société liée à celle-ci);
  • La société emploie dans l’entreprise durant l’année moins de six employés à temps plein, en comptant les employés constitués en société et les autres employés;
  • Le montant payé ou payable à la société pour les services n’est pas reçu ni à recevoir d’une société à laquelle elle est associée au cours de l’année.

Un EPSP n’aura donc pas droit à la déduction pour petite entreprise sur le premier 500 000 $ de revenus nets.

De plus, les dépenses d’une telle entreprise sont limitées quant à leur déductibilité. Règle générale, les salaires et les dépenses d’emploi ne seront pas assujettis à cette limitation.[1]

Nous constatons que ce concept fiscal fait appel à la notion d’employé versus celle de travailleur autonome. Me Alain Ménard, avocat et fiscaliste, abordera ce sujet dans la prochaine chronique, en juin.

Considération pratique Il arrive souvent, en pratique, que les donneurs d’ouvrage obligent le fournisseur d’ouvrage à s’incorporer (pensons au domaine du camionnage). Dans bien des cas, la nouvelle société sera une EPSP, assujettie à un taux d’imposition corporatif élevé tout en subissant une limitation sur la déductibilité de ses dépenses. Y a-t-il une façon de s’en sortir pour le fournisseur d’ouvrage ? Heureusement, oui. La stratégie consiste à reverser les revenus de la société sous forme de salaire à l’actionnaire, réduisant ainsi le revenu corporatif – assujetti à un taux d’imposition élevé – au minimum.

CONCLUSION

La connaissance de ces deux concepts fiscaux est importante afin de mieux conseiller un client qui désire s’incorporer.

Deux questions que le conseiller en sécurité financière devrait poser à son client:

1 Est-ce que les placements dans une société qui se qualifie à titre de EPD ou de EPSP offrent la possibilité d’un report d’impôt sur son revenu ?

2 Sachant qu’il faut privilégier sous forme de salaire la rémunération de l’actionnaire d’une EPSP, serait-il à son avantage pour sa retraite de se doter d’un régime de pension tel un RRI, et bénéficier à l’avenir d’un montant additionnel au plafond de ses cotisations REER?

Jean-Guy Grenier, BAA, CMC, Adm.A., Pl. Fin., directeur régional – Elite, Développement et Mise en marché, Assurance et Épargne pour les particuliers, Desjardins Sécurité financière, Montréal.

Michel Lavoie, M.Fisc., Pl. Fin., CPA, CA.

Note de l’auteur : Cet article est inspiré du cours PFPI-10 préparé et présenté par l’auteur et par Monique Lemire, M.Fisc., Pl. Fin., CPA, CA, dans le cadre de la formation continue de l’Institut québécois de planification financière.


• Ce texte est paru dans l’édition de juin 2013 de Conseiller

[1] Les lecteurs peuvent consulter le Bulletin d’interprétation IT-73R6 aux paragraphes 11 à 17 pour de plus amples informations.

Michel Lavoie