Femmes entrepreneures

Par Rosalind Lockyer | 17 avril 2023 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Une femme devant un ordi qui regarde sa tablette.
Delmaine Donson / iStock

Manque de modèles d’identification. Accès inégal au financement. Stéréotypes au sujet des femmes dans les affaires. Défis liés à la prestation de soins. Longs délais d’attente pour les services de santé.

Bien avant la COVID-19, il s’agissait déjà d’obstacles fréquents pour les femmes qui dirigent leur propre entreprise, en particulier pour les propriétaires de petites entreprises et les travailleuses indépendantes. La pandémie a toutefois exacerbé ces difficultés.

Une récente enquête menée auprès de 147 femmes entrepreneures en Ontario par l’organisme sans but lucratif PARO Centre pour l’entreprise des femmes montre que la pandémie a alourdi le fardeau des femmes entrepreneures, ce qui a eu pour effet de ralentir la croissance de leur entreprise et d’affecter leur santé mentale.

Outre les restrictions liées à la pandémie, les pénuries de personnel, les problèmes liés à la chaîne d’approvisionnement et les pressions inflationnistes bien connues de la plupart des entreprises, les femmes entrepreneures ont rencontré des obstacles supplémentaires. Parmi ceux-ci, mentionnons notamment les préjugés sexistes lorsqu’il s’agit d’obtenir un soutien financier pour leur entreprise, le fait qu’elles ont moins de mentors et d’occasions de réseautage que les entrepreneurs masculins, la pénurie d’options abordables de garde d’enfants et de soins aux personnes âgées – qui incombe souvent aux femmes –, et le manque d’accès aux services en santé mentale.

Les défis pour les femmes entrepreneures dans les zones rurales et éloignées sont encore plus grands en raison de l’isolement, du manque d’infrastructures appropriées, d’une connexion Internet peu fiable et du manque d’accès aux services de soins de santé en général.

Trouver des solutions à ces problèmes n’est pas seulement important pour les femmes entrepreneures; c’est essentiel pour la croissance économique du pays.

En effet, des études montrent que les entreprises appartenant à des femmes injectent plus de 150 milliards de dollars dans l’économie canadienne et emploient plus de 1,5 million de personnes. La création d’un climat dans lequel les femmes entrepreneures peuvent participer plus pleinement à l’économie et prospérer profite à tous.

Afin de favoriser ce genre d’environnement, les gouvernements de tous les paliers doivent éliminer les préjugés sexistes systémiques intégrés dans leurs politiques et leurs pratiques, en particulier en ce qui concerne le soutien financier aux petites entreprises. L’enquête de PARO a révélé que la pandémie a entraîné des difficultés pour près de 30 % des femmes entrepreneures interrogées pour ce qui est du respect de leurs obligations financières. Environ cinq pour cent d’entre elles ont déclaré avoir complètement perdu leur entreprise.

Bien que le gouvernement fédéral ait fourni un soutien financier aux entreprises au cours des deux premières années de la pandémie, de nombreuses femmes entrepreneures n’étaient pas admissibles aux mesures de soutien ou hésitaient à s’inscrire à des programmes de prêts qui risquaient d’entraîner un endettement plus important.

Le gouvernement fédéral a également développé des programmes de soutien destinés spécifiquement aux femmes dans les affaires. Cela représentait déjà un premier pas important! Cependant, de nombreuses femmes entrepreneures se sont vues exclues de ces programmes, parce que ceux-ci n’incluent pas les microentreprises (celles de moins de 20 employés) ou les entrepreneurs individuels (travailleurs indépendants) – qui sont les principaux modèles d’affaires pour les femmes entrepreneures.

Afin de permettre aux femmes entrepreneures d’obtenir plus facilement du financement, le gouvernement fédéral doit concevoir des programmes de soutien qui ciblent spécifiquement les microentreprises et les entrepreneurs individuels.

Les gouvernements doivent également soutenir les organisations axées sur les femmes qui encadrent les femmes entrepreneures et leur offrent des possibilités de réseautage, notamment un soutien financier.

Les femmes entrepreneures se heurtent souvent à des obstacles systémiques lorsqu’elles demandent des prêts ou des subventions par l’intermédiaire d’établissements de crédit traditionnels. En effet, malheureusement, ceux-ci considèrent parfois encore les entreprises appartenant à des femmes comme un « passe-temps » ou une « activité secondaire », ce qui les amène à rejeter la demande d’une femme ou à imposer des conditions trop strictes au financement.

Les changements apportés aux politiques gouvernementales doivent également s’attaquer aux obstacles particuliers auxquels font face les femmes entrepreneures autochtones.

Les Autochtones du Canada démarrent des entreprises à un taux neuf fois plus élevé que les Canadiens non autochtones – et les femmes sont à l’origine d’une grande partie de la croissance. Les femmes autochtones font toutefois face à des obstacles importants, notamment le racisme, la pauvreté, la violence et le manque d’infrastructures, de soins de santé adéquats, et de possibilités d’éducation.

Les politiques et les programmes visant à résoudre ces problèmes sont essentiels. Un meilleur accès aux subventions et aux prêts non remboursables, au mentorat, à la formation et aux possibilités de réseautage conçues pour les femmes autochtones est tout aussi nécessaire.

Les coûts élevés et les listes d’attente pour les services de garde d’enfants continuent également d’être un obstacle majeur pour les femmes entrepreneures, et ce, malgré l’introduction de politiques de garde d’enfants à 10 $ par jour. Les gouvernements doivent encourager davantage de garderies à s’inscrire à ces programmes, ce qui permettrait davantage de places en garderie à des tarifs abordables.

Des politiques et des programmes visant à aider les personnes qui s’occupent d’un proche âgé doivent aussi être mis en place.

Par ailleurs, l’accès à des services de soutien en santé mentale est essentiel. De nombreuses femmes qui ont répondu à l’enquête de PARO ont déclaré avoir souffert d’anxiété et de dépression pendant la pandémie en raison du stress financier, de l’isolement, des soins aux enfants ou des membres âgés de la famille, et de l’inquiétude quant à la façon dont elles maintiendraient leur entreprise à flot.

Le gouvernement fédéral doit travailler avec les gouvernements municipaux et provinciaux pour s’assurer que des services de santé mentale opportuns et accessibles sont disponibles pour tous les Canadiens, en particulier ceux qui vivent dans les collectivités rurales, éloignées et nordiques, où les services sont souvent rares.

Les femmes entrepreneures sont résilientes et déterminées, mais elles ont besoin d’un environnement plus inclusif pour atteindre leur plein potentiel. Les gouvernements doivent agir dès maintenant pour éliminer les obstacles qui se dressent sur la route des femmes propriétaires d’entreprises. C’est notre économie qui en récoltera les fruits!

 

Rosalind Lockyer est fondatrice et cheffe de la direction de PARO Centre pour l’entreprise des femmes-Ontario, PARO Canada, et membre du conseil d’administration de l’organisme Organisations d’entreprises de femmes du Canada (OEFC).

 Les opinions émises dans ce billet sont celles de son auteur et ne reflètent pas nécessairement les vues de Conseiller. Le contenu du billet signé par Rosalind Lockyer a été fourni gracieusement par QUOI Media Group et se trouve sous licence Creative Commons Attribution-NoDerivatives 4.0 International License

Une femme devant un ordi qui regarde sa tablette.

Rosalind Lockyer

Rosalind Lockyer est fondatrice et cheffe de la direction de PARO Centre pour l’entreprise des femmes-Ontario, PARO Canada, et membre du conseil d’administration de l’organisme Organisations d’entreprises de femmes du Canada (OEFC).